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Actualités - CONFERENCES DE PRESSE

Tout en estimant que les circonstances actuelles ne lui sont pas favorables Harb annonce officiellement sa candidature à la présidence Le député de Batroun présente un programme de réformes global (photos)

M. Boutros Harb est réaliste. Comme l’ensemble des Libanais, il sait bien que le choix d’un président de la République est tributaire de nombreux facteurs régionaux et internationaux qui déterminent en définitive le profil de celui qui accédera à la première magistrature de l’Etat. Il n’est pas pour autant fataliste et croit qu’il est toujours possible, pour peu qu’«on s’y oppose», de modifier une situation qui semble a priori désespérée et qui est «le fait d’habitudes antidémocratiques et de pratiques répréhensibles lors d’échéances constitutionnelles passées». Cet optimisme à toute épreuve, M. Harb a voulu le faire partager par les Libanais pour susciter de nouveau leur intérêt dans l’élection présidentielle et leur rappeler qu’ils sont après tout les premiers concernés, donc les principaux électeurs, après avoir constaté «la tiédeur populaire» à l’approche de cette échéance. Tout en laissant entendre qu’il ne se fait pas trop d’illusions sur les résultats de sa démarche, M. Harb a solennellement annoncé hier sa candidature à la présidence de la République en présentant un programme présidentiel détaillé qui s’inscrit globalement dans le prolongement de la politique qu’il suit. Le choix du peuple M. Harb a tenu une conférence de presse place de l’Etoile pour présenter son programme présidentiel avant de se rendre à Baabda afin d’en remettre une copie au chef de l’Etat, M. Elias Hraoui. Dans l’hémicycle, il était entouré de MM. Mohamed Baalbacki, président de l’ordre de la presse, et Antoine Chidiac, représentant l’ordre des rédacteurs. M. Baalbacki a rendu un vibrant hommage au député, et a exprimé l’espoir que son initiative — qui dénote après tout du respect à l’égard d’un peuple qu’on a pris l’habitude de traiter en quantité négligeable — fasse boule de neige et marque le début d’une nouvelle pratique démocratique. D’emblée, M. Harb souligne l’indifférence des Libanais à l’égard de la présidentielle «parce qu’ils ont le sentiment que leurs points de vue ne seront pas pris en compte et que leurs positions n’affecteront en rien les résultats de l’élection qui est supposée engendrer un changement». Il brosse un tableau sombre de la situation et de l’action politique dans le pays avant de souligner qu’il est temps pour le peuple de participer au choix de son président. M. Harb est convaincu qu’il est possible de ne plus laisser le choix du futur président conditionné par des facteurs d’ordre régional et international ou plus exactement de «laisser les Libanais apprécier ces facteurs et d’en tenir compte dans le choix de leur leader». Un chef de l’Etat dont l’élection est décidée en catimini va droit vers un échec, selon lui: «Les présidents qu’on choisit secrètement dans les coulisses ne peuvent pas gagner la confiance du peuple et ne peuvent pas par conséquent conduire le pays vers le troisième millénaire, amorcer un processus de développement et de changement, récupérer une souveraineté spoliée, édifier l’Etat de droit, préserver l’indépendance et l’unité du pays, veiller au respect de sa Constitution et régler les conflits». Un président crédible M. Harb reconnaît que l’opportunité de sa démarche peut être contestée du moment qu’il n’appartient pas au chef de l’Etat de tracer seul la politique du pays et qu’il doit partager cette responsabilité avec le Conseil des ministres qui reste soumis au contrôle du Parlement. Il fait toutefois remarquer que les prérogatives attribuées aux termes de la Constitution au chef de l’Etat sont suffisamment importantes pour qu’un candidat à la magistrature suprême expose à l’opinion publique et à l’Assemblée nationale ses orientations et ses idées de réforme. «Il est extrêmement dangereux que la présidence de la République soit assumée par une personne n’ayant pas de vision d’avenir, des idées de réforme ou une crédibilité politique», dit-il, en soulignant que ce genre de personnes finit normalement par s’occuper de ses propres intérêts et de ceux de sa famille et de son clan. Toute la politique de l’Etat depuis la fin de la guerre jusqu’aujourd’hui est passée au crible par un député qui s’engage à faire de son programme présidentiel un plan d’action nationale et à tirer les leçons du passé pour guider les Libanais vers un avenir meilleur. Sur le plan politique, il met l’accent sur la nécessité d’un régime «monocéphale» par opposition à la «troïka» du Pouvoir, ce monstre à trois têtes qui a survécu pendant des années au détriment de l’Etat de droit. Il reprend à son compte la politique suivie par l’Etat dans ses rapports et ses négociations avec Israël au sujet du Liban-Sud. Les relations avec la Syrie Concernant les relations avec la Syrie, M. Harb reconnaît l’importance des «relations privilégiées et d’une coordination» entre ce pays et le Liban, mais note que la présence militaire syrienne au Liban reste provisoire «parce qu’il est inadmissible que le Liban demeure incapable d’accomplir ses missions nationales, de défendre sa terre et sa sécurité et de contribuer à la protection du flanc ouest de la Syrie». Selon lui, la présence militaire syrienne «doit être tenue à l’écart des conflits politiques intérieurs. Elle doit être commandée par les circonstances régionales et internationales prévalant ainsi que par le sens de solidarité qui implique l’assistance à un frère affaibli en raison notamment de l’occupation israélienne et de l’obstination de l’Etat hébreu à ne pas vouloir respecter les résolutions internationales». Partant, il a appelé à l’établissement de nouveaux rapports avec la Syrie, «fondés sur la confiance et le respect mutuel de la souveraineté, l’indépendance et la (liberté) de décision de chacun des deux pays». M. Harb se dit opposé à l’implantation palestinienne et rappelle que les Etats arabes s’étaient engagés à aider le Liban à se remettre sur pied avant d’indiquer que le futur président se doit de relancer les pays arabes à ce sujet. Il préconise une série de réformes intérieures. M. Harb propose deux idées pour l’amendement de la loi sur les législatives: une révision du découpage des circonscriptions électorales. Chaque circonscription sera formée d’un nouveau mohafazat plus grand qu’un caza mais plus petit que le mohafazat actuel, à condition que le nombre de sièges ne dépasse pas cinq par mohafazat. Il prône dans ce cas le scrutin à la majorité. Dans le second cas, il propose un scrutin à la proportionnelle dans les mohafazats représentés par plus de cinq sièges au Parlement tout en veillant à une représentation authentique des cazas. Le député s’engage à former un gouvernement d’entente nationale au sein duquel tous les courants politiques du pays seront représentés, à veiller au respect de la Constitution en rejetant tout texte en contradiction avec ces dispositions et à respecter le principe de la séparation des pouvoirs. Concernant ce dernier point, M. Harb propose, «pour établir un équilibre entre les deux pouvoirs législatif et exécutif, de revenir à l’ancien article 55 de la Constitution autorisant la dissolution du Parlement une fois durant son mandat, de manière à autoriser le Conseil des ministres, sur proposition justifiée du président de la République, de le dissoudre». L’amendement de l’article 49 Le parlementaire se dit aussi favorable à l’amendement de l’article 49 de la Constitution sur l’élection du chef de l’Etat de manière à interdire l’élection d’une personne qui n’aura pas officiellement présenté sa candidature. «De la sorte, nous mettrons un terme au climat d’ambiguïté qui marque chaque élection présidentielle», dit-il avant d’annoncer qu’il envisage de former une commission nationale qui planchera sur le projet d’élection du chef de l’Etat au suffrage universel. M. Harb recommande en outre l’amendement de l’article 44 de la Constitution relatif à l’élection du chef du Parlement pour «établir un équilibre entre le mécanisme d’élection du président et du vice-président de la Chambre et celui de leur mise en minorité». Il prône aussi l’établissement d’un règlement intérieur du Conseil des ministres et promet de barrer la route devant toute tentative de spolier ses prérogatives. M. Harb s’engage à œuvrer pour le vote de textes de lois consacrant l’indépendance de l’autorité judiciaire par rapport à l’autorité législative. Il souhaite ramener l’âge de vote à 18 ans, accorder la priorité au retour des déplacés, soumettre toutes les caisses autonomes à la surveillance des organes de contrôle, geler le décret de naturalisation de 1994 jusqu’à ce que le Conseil d’Etat achève son enquête (cette mesure ne s’appliquera pas aux habitants de Wadi Khaled), lancer un projet de réforme politique et administrative en faisant preuve de rigueur dans l’application de la loi sur l’enrichissement illicite, créer un ministère du Plan et supprimer les départements nouvellement établis à l’exception des ministères de la Culture, de l’Environnement et des Municipalités et mettre en vigueur une politique socio-économique tenant compte du développement équilibré des régions. L’économie Une bonne partie du programme de M. Harb est consacrée au chapitre économique. Le député brosse un tableau de la situation actuelle et s’engage à adopter une politique économique rationnelle couplée à un nouveau système fiscal suivant une échelle des priorités bien déterminée et tenant compte des besoins du pays. Sur le plan pédagogique, le député promet de développer l’enseignement public et de préserver les établissements privés tout en les soumettant au contrôle du ministère de l’Education sans porter atteinte à la liberté d’enseignement. Sur le plan social, il envisage de développer les transports en commun, d’établir un plan de l’habitat, de protéger le secteur agricole local contre la concurrence étrangère illégitime, de plancher sur le dossier de l’hospitalisation au Liban, de protéger la main-d’œuvre libanaise, de résoudre le problème du chômage et de lancer le projet d’assurance-vieillesse. Il conclut par ces termes: «L’annonce de ma candidature ne repose nullement sur mes chances de réussite ou d’échec dans la bataille électorale ou sur une mauvaise lecture des circonstances liées à cette bataille sachant bien qu’elles ne sont pas en faveur de ma candidature et qu’elles réduisent mes chances de succès. Ma candidature constitue un pas timide sur la voie du changement d’une tradition antidémocratique contraire à la Constitution qui précise que le peuple est la source de tous les pouvoirs. Il est du droit des Libanais de nous demander, à nous qui travaillons dans le domaine public, de faire preuve de transparence dans nos positions».
M. Boutros Harb est réaliste. Comme l’ensemble des Libanais, il sait bien que le choix d’un président de la République est tributaire de nombreux facteurs régionaux et internationaux qui déterminent en définitive le profil de celui qui accédera à la première magistrature de l’Etat. Il n’est pas pour autant fataliste et croit qu’il est toujours possible, pour peu...