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Actualités - ANALYSE

Scepticisme voilé quant aux potentialités du prochain régime

Comme au jeu du pictionary, chacun fait un dessin et il faut deviner de quoi — ou plutôt de qui — il s’agit… Après le président Rafic Hariri, M. Abdel-Halim Khaddam s’est essayé en week-end à cet exercice de tableau. Mais les contours qu’il a tracés, en indiquant quels critères de sélection importent à la Syrie, restent trop généraux, s’appliquent à trop de personnalités, pour bien rendre la silhouette exacte, unique, du futur président. On sait néanmoins ce que ce parachuté ne devra pas être: une figure de défi soulevant des objections formelles de la part d’un des camps politiques principaux au Liban. Un homme de consensus satisfaisant, fait-on dire à M. Khaddam, la majorité des Libanais puisque l’unanimité n’est pas possible. Toujours est-il qu’un vieux loup de mer note, non sans pertinence, que, «dans le système en place, même Superman s’il était élu ne pourrait pas grand-chose. Tout le monde se déclare pour un changement de fond, tout le monde affirme que c’est ce que l’on attend avant tout du futur régime. Et tout le monde feint d’ignorer que le système se protège lui-même avec beaucoup d’efficacité contre toute velléité de le modifier. Le chef de l’Etat peut proposer — et on a vu M. Hraoui le faire avec insistance au sujet de la Constitution —, mais ne peut pas disposer. Il n’a plus, il n’est plus, le pouvoir exécutif. D’ailleurs, on se demande où le pouvoir se situe au juste. Même M. Rafic Hariri, pourtant débarquant en 92 comme un sauveur, n’a pu alors vaincre les hallucinantes complexités du labyrinthe local pour enclencher comme il le voulait la réforme de l’administration et par contrecoup des mœurs politiques. Il a finalement choisi de s’intégrer à la toile d’araignée en créant son propre camp, son propre courant pour rivaliser avec d’autres dans le jeu du partage. Le président du Conseil garde néanmoins apparemment la nostalgie de son premier élan de preux chevalier blanc, brisé répète-t-il par la «mentalité de guerre», entendre par la définition des rapports de force que les ex-miliciens ont transposée après Taëf dans le domaine politique. On ne voit donc pas aujourd’hui où est vraiment le pouvoir ni comment démêler l’imbroglio interne…» Lutte d’influence Ce politicien d’expérience souligne ensuite que «les déclarations d’intention sont une chose et les actes en sont une autre. Les pôles qui prétendent vouloir le changement font tout pour le rendre impossible. Que voit-on en effet: avant même que l’actuel régime ne soit terminé, on se dispute ses dépouilles opimes; et avant même que le nouveau régime ne soit en place on se déchire autour des avantages qu’il pourrait offrir. Non content de vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué, chacun conteste à l’autre le droit d’en marchander sa part virtuelle. C’est un véritable corps-à-corps politique auquel on assiste, avec échange d’allusions plus lourdes de sens les unes que les autres et de menaces mutuelles de révélations scandaleuses. Chacun veut écraser l’autre pour prendre dès le départ de l’ascendant sur le nouveau régime. Pratiquement inamovibles, les deux présidents mahométans sont également inchangeables et ce n’est certainement pas de ce côté-ci qu’on peut attendre le changement requis…» «Dans de telles conditions on voit mal comment le futur président, du reste voué par le système à être politiquement moins puissant que ses deux partenaires, pourrait initier une vraie réforme de fond. D’autant qu’il lui faudrait également lutter contre les innombrables foyers de résistance des différentes «zaamates» politiques, sectaires ou économiques qui se grugent du système et en font leurs choux gras». «Ceci étant, souligne le vétéran, le devoir est le devoir: le prochain président devra quand même tenter de faire quelque chose. L’occasion lui en sera fournie dès le départ par l’influence qu’il pourrait exercer au niveau de la formation du premier Cabinet de son mandat. S’il a assez de personnalité, s’il est assez habile, s’il a de la chance aussi, il pourrait peut-être obtenir que ce gouvernement soit formé de personnalités compétentes, capables notamment de traiter avec succès la récession socio-économique qui garde la priorité sur tout autre problème. Il y aurait ensuite à réviser la politique fiscale, à réformer l’administration, à mener à bien les projets de retour des réfugiés et de développement des régions… Il faudra probablement que ce gouvernement, pour pouvoir travailler sérieusement, demande les pouvoirs exceptionnels». Jamais donnés d’avance, comme M. Hariri l’a expérimenté à son arrivée en 92 au pouvoir. Un pouvoir, un système, qui changent apparemment les meilleurs. Et que les meilleurs ne peuvent changer.
Comme au jeu du pictionary, chacun fait un dessin et il faut deviner de quoi — ou plutôt de qui — il s’agit… Après le président Rafic Hariri, M. Abdel-Halim Khaddam s’est essayé en week-end à cet exercice de tableau. Mais les contours qu’il a tracés, en indiquant quels critères de sélection importent à la Syrie, restent trop généraux, s’appliquent à trop de...