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Actualités - CHRONOLOGIE

Gouvernement : le Kremlin et la Douma font monter les enchères

Le président russe Boris Eltsine et l’opposition communiste se sont engagés dans un bras de fer sur la formation du gouvernement, qui risque d’être ravageur pour la santé d’un pays déjà plongé dans une crise financière sans précédent. La Douma (chambre basse) a tiré la première, humiliant le candidat de M. Eltsine au poste de premier ministre, Viktor Tchernomyrdine, qui n’a recueilli lundi que 94 des 226 voix nécessaires à son investiture. Boris Eltsine a immédiatement représenté la candidature de M. Tchernomyrdine, même si le président communiste de la Douma Guennadi Seleznev a prévenu qu’elle n’avait «aucune chance» de passer lors du prochain scrutin lundi prochain. Eltsine, qui est déterminé, malgré tout, à former un gouvernement «cette semaine», tente ainsi de forcer la main aux députés en les mettant devant le fait accompli (VOIR PAGE 9). Si de telles joutes politiques se sont multipliées au point de ne plus susciter que l’indifférence de l’homme de la rue, le bras de fer en cours enlise un peu plus un pays privé de gouvernement depuis neuf jours, au rouble dévalué et aux marchés financiers moribonds. «Les députés, le président et le premier ministre par intérim se moquent du destin de la Russie. Tous ont été occupés hier (lundi) par un marchandage cynique ou une publicité politique creuse», fulmine le quotidien Nezavissimaïa Gazeta. Humiliée depuis des années par la toute-puissance de Boris Eltsine, l’opposition communiste, majoritaire à la Douma, estime que la crise lui donne enfin l’occasion de rogner les ailes du «tsar» du Kremlin. «Les communistes ne veulent surtout pas assumer la responsabilité du gouvernement, mais arracher un maximum de concessions. Non seulement pour la composition du gouvernement et son programme, mais aussi en termes d’amendements constitutionnels pour changer le rapport des forces» aujourd’hui à sens unique en faveur de M. Eltsine, analyse Nikolaï Petrov, de la fondation américaine Carnegie. Le vieux lion déprimé C’est pourquoi le chef du Parti communiste Guennadi Ziouganov a dénoncé au dernier moment dimanche un projet d’accord réduisant — insuffisamment à ses yeux — les pouvoirs présidentiels. L’opposition peut croire son heure venue: Boris Eltsine, 67 ans, est plus affaibli que jamais après l’effondrement du rouble, qui sanctionne sept ans de politique libérale conduite sous sa tutelle. Mais si le vieux lion était la semaine dernière déprimé au point que sa démission soit sur toutes les lèvres, il paraît avoir quelque peu repris le dessus. «Eltsine entre dans un nouveau cycle, il se sent plus fort. Et se battre contre la Douma est pour lui plus familier que se battre contre l’économie», estime Andreï Kortounov, un ancien conseiller de Mikhaïl Gorbatchev. L’épreuve de force pourrait donc bien s’intensifier, d’autant plus que la Douma ne court le risque d’une dissolution qu’après trois refus du candidat présenté par M. Eltsine. «Les deux camps vont le plus probablement tenter de faire du chantage l’un contre l’autre, et celui qui aura les nerfs les plus solides l’emportera», estime Vladimir Pribylovski, président de l’institut de recherche politique Panorama. Les protagonistes agitent les scénarios les plus alarmistes: dissolution de la Douma, voire coup de force de M. Eltsine ou émeutes populaires. Le chef du Service fédéral de sécurité (FSB, héritier du KGB), Vladimir Poutine, récemment nommé par Eltsine, a dû promettre à la télévision mardi que ses hommes ne préparaient aucune action «anticonstitutionnelle». Mais la plupart des analystes parient sur le fait que tout ce psychodrame se terminera sur un compromis. «L’opposition comprend qu’en cas de vraie crise du pouvoir, elle sera aussi perdante que le régime de Boris Eltsine. C’est pourquoi, je ne m’attends pas à ce qu’elle fasse des excès et qu’elle prenne le risque d’une dissolution», pronostique M. Pétrov. (AFP, Reuters)
Le président russe Boris Eltsine et l’opposition communiste se sont engagés dans un bras de fer sur la formation du gouvernement, qui risque d’être ravageur pour la santé d’un pays déjà plongé dans une crise financière sans précédent. La Douma (chambre basse) a tiré la première, humiliant le candidat de M. Eltsine au poste de premier ministre, Viktor Tchernomyrdine,...