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Actualités - REPORTAGE

Encombrement des vols, réservations fictives, impératifs de rentabilité A l'AIB, depuis deux semaines, des voyageurs restent au sol

Vous partez aujourd’hui pour l’étranger. Quarante-huit heures avant votre départ, vous avez pris soin de confirmer votre voyage auprès de la compagnie d’aviation qui vous transporte. Vous n’avez rien oublié: adieux à la famille et aux amis, passeport, billet d’avion et valises... Vous voilà en route pour l’aéroport de Beyrouth. Arrivé sur place, devant le guichet de booking de votre compagnie d’aviation, la personne en charge vous annonce qu’il n’y a «pas de place pour vous à bord de l’avion». Non, ce n’est pas un mauvais rêve. C’est bel et bien ce qui est en train d’arriver à des voyageurs depuis la dernière semaine d’août devant les guichets de diverses compagnies d’aviation opérant à l’AIB. Et ce cauchemar devenu réalité se poursuivra jusqu’à la mi-septembre. La période qui va du 15 août au 15 septembre fait partie de la haute saison internationale de l’Aviation civile. L’augmentation du nombre de départs à partir de Beyrouth est due au retour des vacanciers, aux diverses foires tenues en Europe et aux rentrées scolaires et universitaires à l’étranger. L’encombrement des passagers est notamment signalé sur les lignes Beyrouth-Paris, Beyrouth-Londres, Beyrouth-Milan et Beyrouth-Francfort. De plus, les vols longs courriers étant inexistants à partir de l’AIB, le voyage d’un grand nombre de passagers ne s’arrête pas à ces destinations. Ils prennent d’autres vols à partir des villes européennes vers des capitales situées en Afrique ou en Amérique. Les représentants des diverses compagnies d’aviation tentent de minimiser le problème et affirment tous qu’en «Europe et aux Etats-Unis, tous les jours, des passagers qui ont confirmé leurs voyages sont refoulés à l’aéroport». «Au Liban ça n’arrive qu’en cette saison où les estivants libanais rentrent au pays hôte», ajoutent-ils. Il est nécessaire cependant de mettre en évidence une particularité libanaise. Ici, la situation est différente des pays étrangers, car elle dépend de plusieurs facteurs et, notamment de la mentalité des voyageurs. Les agences de voyages, les compagnies d’aviation et les milieux aéronautiques tentent de s’adapter au marché libanais pour ne pas perdre de l’argent. 20 à 30% de défections Une compagnie d’aviation est avant tout une entreprise commerciale. A bord de chaque vol, notamment au Liban, 20 à 30% des voyageurs qui confirment leur réservation ne se présentent pas au booking de l’aéroport. Or, aucune compagnie ne voit d’un bon œil — pour des raisons de rentabilité — ses avions partir à moitié vide. C’est pour cette raison que l’International Air Transport Association (IATA) a autorisé les compagnies d’aviation à se réserver, au niveau des confirmations de vol, une marge de 5% excédant la capacité de l’avion. C’est quand toutes les personnes qui ont confirmé leurs voyages se présentent à l’aéroport que les problèmes commencent: elles ne pourront pas toutes embarquer. La compagnie Air France, par exemple, qui affrète sur la ligne Paris-Beyrouth des Airbus A 340, ayant une capacité de 215 passagers, accepte les confirmations pour 10 passagers de plus. Une source à Air France souligne que «la plupart du temps, plusieurs passagers ne se présentent pas au guichet. Le problème se pose quand les 225 personnes qui ont confirmé leur vol arrivent à l’aéroport». M. Charbel Ghosn, propriétaire de l’agence de voyages «Liban Loisirs», souligne que «les voyageurs libanais fixent la date de leur départ à la dernière minute. De plus, ils se préparent à voyager en réservant des places à bord de plusieurs compagnies d’aviation». Le voyageur, une fois qu’il a choisi sa compagnie d’aviation et qu’il a son billet en main, ne prend même plus la peine d’annuler les autres réservations. Diverses agences de voyages — soit pour s’adapter au marché libanais, soit par mercantilisme — effectuent des réservations libellées aux noms de personnes fictives et, même après la confirmation du voyage, elles modifient le nom (toujours fictif) du client. De plus, certaines agences de voyages libanaises, établies à l’étranger, délivrent des billets aux voyageurs sans pour autant garantir à leurs clients qu’ils reviendront à destination. Que de Libanais établis à l’étranger ont entendu la phrase suivante: «Arrive au Liban et débrouille-toi. La compagnie assurera sûrement un vol supplémentaire». D’autres innocents ne savent même pas qu’ils n’auront pas de siège pour le retour. Pas de place à bord de l’avion Tel est le cas d’un entrepreneur libanais établi en Côte d’Ivoire avec sa famille. Venant d’Abidjan via Paris, au début du mois d’août, il a acheté son billet auprès d’une agence tenue par des Libanais, dans la grande cité ivoirienne. Vendredi dernier, il téléphone au bureau d’Air France pour confirmer son retour, celui de sa femme et de ses quatre enfants. On l’informe que ses enfants n’ont pas de place à bord de l’avion: l’agence de voyages a fixé les dates de leur retour pour le 15 décembre. La famille devait quitter Beyrouth dimanche dernier pour la rentrée des classes à Abidjan. De plus si le voyage est retardé, la haute saison étant mondiale, ils ne pourront plus prendre un vol Paris-Abidjan avant la fin septembre. Quand les passagers ne peuvent pas embarquer, comme c’est le cas actuellement, le client est indemnisé. La compagnie nationale Middle East Airlines (MEA) paie par exemple une somme d’au moins 300 dollars et variant selon la destination, à tout passager ayant confirmé son vol et qui n’embarque pas faute de place. Le transport vers l’hôtel ainsi que le séjour sont également prévus. La MEA, qui ne dispose que de 7 Airbus de 143 places chacun, n’a pas prévu de vols supplémentaires. «Nous en sommes incapables», indique une source de la compagnie. Et de poursuivre: «Nous pouvons cependant transférer, si c’est possible, les voyageurs sur d’autres vols à bord d’autres compagnies». Jusqu’à présent, au Liban, aucune pénalité visant les passagers qui ne se présentent pas à l’aéroport ou les agences de voyages qui violent les lois n’a été prévue. Il faut relever que les milieux spécialisés indiquent que «80% des billets d’avions sont vendus par les agences de voyages tandis que 20% seulement sont écoulés par les compagnies d’aviation». Une source bien informée à Air France indique que, pour régler le problème des excès dans les réservations (surbooking) «l’entreprise procède au «nettoyage des vols» en contactant tous les passagers qui ont confirmé leur réservation afin de déterminer qui viendra effectivement à l’aéroport». Et d’ajouter: «Selon les lois en vigueur à l’IATA, nous ne pouvons pas prendre d’autres mesures du moment que la compagnie d’aviation locale n’a pas décidé d’agir». La source à la MEA estime que «c’est contre les lois de l’aviation de pénaliser les passagers, qui, s’ils ne se présentent pas au guichet d’embarquement, pourraient avoir des problèmes graves tels que la maladie ou la mort d’un proche». Et de souligner «qu’au Moyen-Orient, seule la Saudi Airlines vend des billets non remboursables». Entre-temps, tous les jours, des voyageurs, dont le nombre n’a pas été précisé, sont refoulés à l’AIB. Si vous voyagez durant la première quinzaine de ce mois, confirmez votre voyage trois ou quatre jours avant la date fixée; et le jour de votre départ arrivez à l’aéroport trois heures à l’avance. Sinon vous aurez de fortes chances de voir l’avion, qui devait vous emmener à destination, décoller en vous laissant au sol.
Vous partez aujourd’hui pour l’étranger. Quarante-huit heures avant votre départ, vous avez pris soin de confirmer votre voyage auprès de la compagnie d’aviation qui vous transporte. Vous n’avez rien oublié: adieux à la famille et aux amis, passeport, billet d’avion et valises... Vous voilà en route pour l’aéroport de Beyrouth. Arrivé sur place, devant le guichet de...