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Actualités - REPORTAGE

Dernier week-end festivalier à Beiteddine Al Mayssa, entre fiction et réalité (photos)

Dernier week-end festivalier à Beiteddine placé sous le signe de l’opérette libanaise, avec «Al Mayssan». Dans un décor dépouillé à l’extrême où l’imagination est constamment sollicitée, Roger Assaf signe une mise en scène de qualité. Inspirée de la pièce «Fuente Ovejuna» du grand écrivain espagnol du 17e siècle, Lope de Vega, «Al Mayssan» est une comédie dramatique qui, à travers les tableaux qui se répétent comme le leitmotiv d’une chanson, développe un même thème: la lutte contre le despotisme. La tyrannie exercée contre les villageois de «Fuente Ovejuna» est la même subie par les habitants de nos villages tout au long des siècles… elle est semblable à celle qu’affrontent les habitants de «Zaf es Sama» confrontés à la dictature des soldats israéliens qui s’imposent par la force des armes, dans la pièce en préparation pour la fête du village… Outre les trois échafaudages sur roulettes, la scène est vide de tout élément de décor. Au spectateur d’imaginer la place du village, les maisons la bordant, la source d’eau… Les premières notes de musique — signée Paul Mattar — suggèrent l’ambiance joyeuse d’un village qui se prépare à la fête. On installe les projecteurs, un chanteur pousse un «ôf» inspiré, les jeunes s’exercent à la dabké… Le metteur en scène — comme il se doit — se plaint: «le décor n’est pas prêt; les acteurs ne connaissent pas leur texte…». Il bat le rappel des troupes, réunissant les habitants pour une dernière mise au point… et demande qu’on éteigne «les téléphones portables. Leurs ondes ont des interférences sur le son…». Et «sur nos cœurs…» lance, sarcastique, le «clown» du village. Le scepticisme à fleur d’esprit, les réflexions caustiques et le ton moqueur de cet idiot — pas si bête — du village donneront le tempo. Coup d’envoi du spectacle: le rideau rouge — qu’on avance sur le centre de la scène sur des roulettes — ouvre ses deux pans laissant passer la troupe de villageois-comédiens. «Une parodie de théâtre pour un semblant de public», dixit le clown. L’histoire est simple — simpliste? —: dans le village soumis au despotisme d’un seigneur féodal soutenu par une puissance étrangère, on s’apprête à célébrer un mariage. Mais le despote, imposant aux villageois ses quatre volontés, exige un droit de cuissage sur la nouvelle mariée. Le village se révolte et massacre le seigneur… L’enquête ne réussira pas à trouver de coupable, chaque villageois s’accusant du meurtre… Au fur et à mesure que la scène est répétée, l’enthousiasme des villageois monte crescendo. La dabké fait trembler les planches; les déclarations enflammées — amoureuses ou patriotiques — gagnent en conviction. L’ambiance est plutôt bon enfant… Les piques tantôt acerbes, tantôt sincèrement admiratives de «l’idiot» font valser le spectacle entre rires et larmes… La pièce semble être bien sur rail. Soudain, des soldats font irruption sur scène. Arrogants, ils exigent de tenir des rôles… Au départ farouchement opposé à leur participation, le metteur en scène se radoucit, assurant aux villageois qu’il maîtrise la situation. Les scènes avec les soldats tournent rapidement au vinaigre: ces derniers tenant un peu trop bien leur rôle. Brutalités, emprisonnements, menaces… Le viol d’une des filles du village par un soldat israélien noue le drame. Mayssan, l’héroïne qui s’identifie à Souha Béchara (enfermée à la prison de Khiam depuis plus de dix ans, pour avoir tenté d’assassiner le général Lahd), orchestrera une danse macabre autour du commandant israélien… La technique du théâtre dans le théâtre utilisée par Roger Assaf donne du souffle à «Al Mayssan». La valse des échafaudages qui traversent l’espace scénique et la profusion d’étoffes aux couleurs chatoyantes impriment à la pièce un mouvement tantôt harmonieux, tantôt saccadé… que la musique vient confirmer. Cependant, et malgré la dérision qui émaille ce spectacle «populaire, folklorique et politico-social», la pièce souffre de quelques longueurs. «Al Mayssan» est servi par une troupe d’acteurs au jeu juste, notamment Fadi Abi Samra en idiot du village et Bernadette Hadib en Mayssan-pasionaria-désenchantée. La musique de Paul Mattar donne le «la» avec une composition qui seconde le texte avec efficacité… Dans «Al Mayssan», le spectateur est constamment transporté de la fiction à la réalité… des deux côtés d’un même miroir…
Dernier week-end festivalier à Beiteddine placé sous le signe de l’opérette libanaise, avec «Al Mayssan». Dans un décor dépouillé à l’extrême où l’imagination est constamment sollicitée, Roger Assaf signe une mise en scène de qualité. Inspirée de la pièce «Fuente Ovejuna» du grand écrivain espagnol du 17e siècle, Lope de Vega, «Al Mayssan» est une comédie...