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Actualités - OPINION

Nazek Saba Yared : société en péril...

Une femme de lettres qui n’en est pas à son premier ouvrage de fiction et dont la carrière englobe aussi de nombreuses et importantes études de critiques littéraires (sur Ibn el-Roumi, Abou Nawass, Elias Abou Chabaké…). Nazek Saba Yared vient de publier son dernier roman en un arabe simple, moderne et fluide, d’une grande finesse d’analyse et de description intitulé «al-Zoukrayat al-Moulghat» («les souvenirs gommés», Naufal, 259 pages) avec en couverture le fragment d’une toile d’Edward Munch connue sous le nom de «Mélancolia». La romancière a opté pour une narration lente et où le «suspense» joue un rôle capital auprès du lecteur pris dans les rets des mots d’un auteur épris de littérature. On rappelle volontiers non seulement la riche production romanesque de Nazek Saba Yared qui a signé «L’écho étouffé» et «Le passé était demain» mais aussi des œuvres pour enfants. «Est-ce que nous connaissons Beyrouth» et «A l’ombre de la citadelle» (Prix des jeunes 1997) sans oublier les études de critiques littéraires sur Ibn el-Roumi, Abou Nawass et Elias Abou Chabaki (dont certains ont été déjà traduits en anglais). Aujourd’hui avec «les souvenirs gommés» Nazek Saba Yared renoue avec la tradition romanesque et décrit l’effritement des valeurs sociales à travers le danger qui guette toute famille désunie. Devant l’adversité, le malheur, la souffrance, une réalité amère cruelle et dure — «une bataille plus brutale qu’une bataille d’hommes», disait Rimbaud — un amour, une amitié ou un espoir peuvent-ils résister et tenir front à tant d’assauts d’une société hostile et aux valeurs éclatées? Devant le démembrement d’une famille, les enfants ont-ils une chance de salut, une possibilité de sortir indemnes? Beaucoup de versions pour des faits où la réalité est perçue comme à travers un miroir déformant… Entre le présent et le passé, les personnages sont ballottés et tentent par-delà les tempêtes du quotidien de se retrouver, de retrouver un équilibre en péril qui leur permettent de goûter au bonheur de vivre... La vie avec ses remous imprévisibles et ses impondérables surprend autant le lecteur que les protagonistes de ce roman, où les relations humaines, à Beyrouth, sont mises à rude épreuve. Avec infiniment de tact, de sensibilité et d’humanisme mais aussi un sens virulent et cinglant de la formule dans l’art de mener un dialogue ou de brosser un portrait, Nazek Saba Yared approche ses personnages et décrit une société où la confiance (en soi et dans les autres) est sérieusement ébranlée et où l’intérêt prime même les valeurs les plus sacrées et les plus fondamentales. Sans être désabusé, ce roman met à nu l’état d’esprit d’une certaine catégorie de Libanais malmenés par la vie où le mal-être et le malaise social sont devenus monnaie courante. Banaliser le drame de vivre dans une société aux maux multiples, voilà ce que dénonce avec talent une romancière qui a le courage de ses mots… Edgar DAVIDIAN
Une femme de lettres qui n’en est pas à son premier ouvrage de fiction et dont la carrière englobe aussi de nombreuses et importantes études de critiques littéraires (sur Ibn el-Roumi, Abou Nawass, Elias Abou Chabaké…). Nazek Saba Yared vient de publier son dernier roman en un arabe simple, moderne et fluide, d’une grande finesse d’analyse et de description intitulé...