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Actualités - REPORTAGE

MEA : Le parquet s'apprête à clôturer son enquête

Le parquet annoncera-t-il mardi la clôture de son enquête sur la MEA et son intention de classer l’affaire pour insuffisance de preuves? Hier, après la courte série d’auditions effectuée par le chef de la brigade criminelle, le général Béchara Salem, l’impression générale penchait vers l’imminence du dénouement. D’abord, le général Salem a passé la matinée à ranger ses affaires — il a été muté au commandement de la force chargée de la sécurité des présidents — alors que son successeur, le général Naoum Khoury, attendait patiemment son tour de prendre la relève. Ensuite, il a pratiquement fait le tour de l’affaire, en entendant toutes les personnes concernées, sans avoir apparemment pu prouver l’existence d’une dilapidation de fonds, dans le cadre du contrat de bail de trois avions «Airbus», conclu entre la MEA et la Singapore Airlines, le 4 juin 1997. Enfin, le général Salem — qui, en dépit de sa nomination au QG de Basta, continuera à suivre cette affaire jusqu’au bout — n’a convoqué pour mardi prochain que l’ancien PDG de la compagnie, M.Khaled Salam, et son fils Sélim, ainsi que M.Youssef Lahoud, directeur général, reconduit dans ses fonctions par le nouveau conseil d’administration. Ce qui laisse supposer qu’il procèdera probablement à une ultime confrontation entre ceux qu’il a convoqués à toutes les séries d’auditions qu’il a effectuées, avant de passer aux conclusions. D’ailleurs, selon de nombreux observateurs, la poursuite de l’enquête judiciaire — ouverte à la demande de la Banque centrale (principal actionnaire de la MEA) — ressemble de plus en plus au maintien en vie par respiration artificielle d’un malade condamné. Surtout depuis que la Banque centrale a retiré la note d’information adressée au parquet, après avoir obtenu une renégociation du contrat en faveur de la MEA. La Banque centrale a ainsi montré que, quelle que soit l’issue des investigations du parquet, elle n’a nullement l’intention de porter plainte contre les éventuels responsables du contrat jugé défavorable à la MEA. Malgré tout, le parquet a poursuivi ses investigations, essayant de trouver un délit pénal, qui lui permettrait d’entamer d’office une procédure judiciaire. L’enquête Pendant plusieurs séances d’auditions, le général a ainsi entendu tous les membres de l’ancien conseil d’administration, ainsi que la plupart des responsables financiers et de nombreux techniciens de la compagnie. Le chef de la brigade criminelle cherchait ainsi à savoir s’il y avait une falsification dans les procès-verbaux des réunions du conseil d’administration relatives au contrat contesté ou s’il y a eu, dans le cadre de ce contrat, un gaspillage intentionnel. Il a ensuite élargi ses investigations, pour se pencher sur la politique financière de la compagnie, afin d’étudier les causes de l’important déficit enregistré au cours de l’année 97 (53 millions de dollars). Mardi dernier, le général Salem avait ainsi entendu M. Kamal Accad, responsable des finances de la compagnie, qui aurait déclaré avoir alerté les responsables sur la politique financière erronée, en présence de M. Mansour Bardawil, directeur de la planification au sein de la MEA. Hier donc, le général a entendu M. Bardawil, pour faire des recoupements, ainsi que M. Joseph Fadl, chargé par la compagnie internationale d’audit «Touche-Ross» du contrôle des comptes de la MEA. Le général a même procédé à une rapide confrontation entre MM. Fadl, Bardawil et Accad, au cours de laquelle de violents éclats de voix ont été entendus. Selon des sources judiciaires, chacun des trois hommes est resté sur ses positions. M. Fadl aurait toutefois précisé qu’il faut faire une distinction entre le déficit de la compagnie et le gaspillage. Le déficit serait ainsi dû à l’absence de prévisions, au surplus d’employés (sur un total de près de 4000, dont 160 pilotes ou personnel naviguant technique, 330 hôtesses et stewards ou personnel naviguant commercial, 400 employés chargés des escales dans les divers pays, 1000 pour l’entretien des avions et le reste dispersé entre l’AIB, la comptabilité et les départements de marketing, de ticketting, de catering etc.) et aux considérations politiques qui bloquent toute initiative d’assainissement. Il n’y aurait donc pas dilapidation de fonds et donc de gaspillage intentionnel. Le nouveau contrat de location Le général a aussi longuement entendu l’ancien PDG de la compagnie, M. Khaled Salam, qui avait demandé, mardi, un délai pour s’informer des nouvelles clauses du contrat de location des Airbus. Hier, M. Salam aurait déclaré au chef de la brigade criminelle que, selon lui, le nouveau contrat n’est pas plus favorable à la MEA que celui qu’il avait lui-même signé. Interrogé sur la différence dans le montant du bail (qui dans le nouveau contrat est inférieur de 22.000 dollars par avion), M. Salam aurait répondu qu’avant d’accepter ce montant, proposé par la Singapore Airlines, il avait consulté les techniciens de la compagnie qui, selon lui, auraient affirmé que ce seraient là les prix actuellement en cours dans les opérations de bail d’avions. Interrogé ensuite sur les économies faites dans l’entretien des avions, qui, dans le nouveau contrat, sera confié à partir de mai à la nouvelle société que comptent former la MEA et la SOGERMA française, M. Salam aurait répondu que les nouvelles conditions ne sont pas plus favorables à la MEA que les précédentes. D’autant que, dans le nouveau contrat, il n’est pas fait mention du transport des pièces de rechange, nécessaires à l’entretien des avions. Ce transport coûterait cher selon lui. Pendant plus d’une heure, M. Salam aurait ainsi défendu point par point le contrat qu’il avait lui-même négocié et signé, sans toutefois apporter, selon des sources judiciaires, des preuves concluantes. Mais si le parquet est pratiquement convaincu que le nouveau contrat est beaucoup plus favorable à la MEA, rien n’indique que M. Salam ait eu un intérêt personnel à signer l’ancien ou ait fait bénéficier son fils Sélim du contrat d’entretien signé avec la Singapore Airlines, d’autant qu’en réalité, la MEA n’a payé qu’un petit acompte, avant de bloquer l’exécution du contrat pour en renégocier certaines clauses. C’est pourquoi après avoir épuisé toutes les pistes sans aboutir à des résultats probants, le parquet pourrait décider de clore l’enquête. D’autant que l’affaire commence à prendre une tournure politique, certaines sources laissant entendre que des pôles du pouvoir, qui considèrent avoir été exclus du nouveau conseil d’administration, manœuvrent pour que l’enquête reste ouverte. Selon les mêmes sources, ces pôles voudraient ainsi neutraliser des personnes occupant des postes importants au sein de la compagnie afin d’obtenir leur remplacement par d’autres qui leur sont acquises. Naturellement, les milieux judiciaires concernés ont totalement nié ces faits, précisant que si l’enquête est encore ouverte, c’est justement pour montrer l’indépendance du parquet et le fait qu’il ne peut être utilisé par qui que ce soit. S’il est chargé d’un dossier, il le poursuit jusqu’au bout et suit toutes les pistes avant de présenter ses conclusions. Selon ces milieux, il ne faut pas chercher d’autres explications, mais dans cette affaire extrêmement délicate, qui a mobilisé l’opinion publique pendant près de deux mois, il est difficile de croire que la politique ne joue aucun rôle... Scarlett HADDAD
Le parquet annoncera-t-il mardi la clôture de son enquête sur la MEA et son intention de classer l’affaire pour insuffisance de preuves? Hier, après la courte série d’auditions effectuée par le chef de la brigade criminelle, le général Béchara Salem, l’impression générale penchait vers l’imminence du dénouement. D’abord, le général Salem a passé la matinée à...