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Actualités - INTERVIEWS

Aoun sur MTV : un rappel, sans coup d'éclat, de positions de principe

Sept ans après le 13 octobre 1990, le général Michel Aoun n’a rien perdu de sa combativité. Pour sa première interview-fleuve à la télévision libanaise depuis son départ mouvementé du palais de Baabda, l’ancien chef du gouvernement de militaires n’a pas mâché ses mots à l’égard du pouvoir en place, selon lui «illégitime», réitérant pour l’essentiel ses positions traditionnelles sur les principaux dossiers, en particulier sur la présence militaire syrienne au Liban et la Constitution de Taëf. Selon lui, cette interview réalisée en direct de Paris, prévue initialement le 14 décembre sur la MTV et annulée in extremis à la suite d’interférences gouvernementales, a finalement pu avoir lieu «grâce au soulèvement des jeunes», en référence aux manifestations estudiantines en faveur des libertés publiques qui ont suivi l’annulation de l’interview. Il a dénoncé la «répression des libertés» et s’est dit «hostile à toute censure» sur les médias et pour «une presse libre qui ne soit alignée ni sur le gouvernement ni sur l’opposition». Répondant aux questions de la présentatrice-vedette de la MTV Maguy Farah, le général a malgré tout tenté à certains moments des ouvertures timides en direction du régime et de la Syrie, se disant par exemple «prêt à faire la paix», mais soulignant que «pour faire la paix il faut être deux». A l’égard de Damas, il a usé d’un ton plutôt modéré, qui tranche avec ses déclarations fracassantes du temps où il était premier ministre ou dans des prises de position ultérieures, tout en ne cédant rien sur l’essentiel. Ainsi, il a parlé de la nécessaire concomitance des volets libanais et syrien du processus de paix, «mais seulement à condition qu’il y ait effectivement deux volets et non pas que le volet libanais soit totalement éliminé, comme c’est le cas aujourd’hui». Projetant une «vision d’avenir» des relations entre les deux pays, il s’est dit pour des rapports «amicaux» et une «entente sur une orientation politique et de sécurité». Cela n’empêche que pour le moment, la réalité de ces liens demeure selon lui «mauvaise» et il considère toujours que la présence syrienne est une «occupation», puisqu’elle n’obéit pas à un protocole bilatéral l’organisant. Il a d’autre part évoqué la question des Libanais détenus en Syrie, estimant qu’il s’agissait d’«otages» et non de prisonniers et invitant Damas à les libérer «pour préserver sa propre réputation». «Souveraineté, liberté, indépendance»: le général a naturellement égréné le chapelet des termes-clés de son discours politique tout au long de l’interview, réaffirmant par ailleurs son opposition déterminée à la Constitution née des accords de Taëf. Pour le reste, il s’est notamment employé à remémorer les événements qui ont accompagné ses derniers jours à Baabda, et s’est expliqué sur les accusations qui lui ont été lancées sur des questions financières. Niant les allégations faites à ce sujet, il a reproché notamment au président de la République Elias Hraoui d’avoir exprimé ces accusations par voie de presse et non par voie de justice. Prise de bec avec Dalloul Au sujet des tractations qui ont précédé sa chute, sous l’effet d’une opération militaire syro-libanaise, le général, perdant quelque peu son sang-froid, a eu une prise de bec avec le ministre de la Défense Mohsen Dalloul, un des témoins de l’époque. Intervenu au téléphone pour présenter une autre version des faits, M. Dalloul s’est attiré la colère du général quand il l’a accusé d’avoir «abandonné sa famille et son pays pour se réfugier à l’ambassade de France puis à l’étranger». A la journaliste, qui le priait de garder son calme, le général a répondu que c’était «un devoir de se mettre en colère lorsqu’on est confronté à des mensonges». «Comment peut-il savoir si j’ai abandonné ma famille ou pas? Qu’il s’en tienne aux faits», a-t-il lancé. Interrogé sur la guerre entre l’armée libanaise et les Forces libanaises de Samir Geagea, en 1990, il a une première fois indiqué qu’il préférait ne pas en parler puisque M. Geagea, se trouvant en prison, ne disposait pas d’un droit de réponse. Par la suite, il a eu l’occasion, en répondant à des questions du public, de revenir sur cette question, en rejetant une nouvelle fois sur les FL la responsabilité de cette guerre, tout en cherchant à éviter d’accabler ses adversaires de la veille. Disant craindre pour sa sécurité, il a indiqué qu’il ne rentrerait pas de sitôt au Liban et qu’il n’avait pas d’ambition immédiate de jouer un rôle dirigeant. Sur l’actualité, il a réaffirmé ses critiques contre la politique économique du gouvernement et déclaré, en riposte à l’interdiction de la diffusion par satellite des émissions politiques: «Ce que nous voulons, c’est de pouvoir transmettre par contagion le goût de la liberté à tout l’Orient». Au sujet du Liban sud et des propositions israéliennes d’application de la résolution 425 du Conseil de Sécurité de l’ONU, le général Aoun a développé, en substance, la thèse suivante: la 425 implique des obligations et de la part d’Israël (retrait) et de la part du Liban (assurer la sécurité à la frontière). Il ne sert donc à rien de réclamer à cor et à cri l’application de la 425 si le Liban n’a pas l’intention de respecter cette obligation. Il a qualifié de «bonne» la proposition israélienne de retrait et s’est dit étonné des réserves émises par le Liban et la Syrie à son égard, et souligné que la résistance n’avait plus lieu d’être. Il a estimé que Beyrouth et Damas pouvaient avoir de «bonnes raisons» d’émettre ces réserves, mais qu’alors, il faudrait cesser de réclamer la 425.
Sept ans après le 13 octobre 1990, le général Michel Aoun n’a rien perdu de sa combativité. Pour sa première interview-fleuve à la télévision libanaise depuis son départ mouvementé du palais de Baabda, l’ancien chef du gouvernement de militaires n’a pas mâché ses mots à l’égard du pouvoir en place, selon lui «illégitime», réitérant pour l’essentiel ses...