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Actualités - ANALYSE

Municipales : le pouvoir jouera-t-il le jeu ?

Après mille péripéties picaresques et plusieurs fausses couches, le pouvoir a fini par «pondre» une loi sur les municipales massivement approuvée à la Chambre et fixant le scrutin — sans désignations — au prochain printemps…
Mais le gouvernement en est sorti divisé. Nombre de ministres n’ont en effet pas cru devoir rejoindre le président du Conseil dans son revirement contre la mouture initiale qui faisait la part belle aux désignations. Lors du débat place de l’Etoile, ils ont ainsi gagné les travées des députés pour pouvoir, à ce titre, contester librement le texte présenté par le Cabinet auquel ils appartiennent! Vu cette opposition de l’intérieur et comme il y a loin de la coupe aux lèvres (d’autant que tous les antécédents prouvent que cette république n’a pas un respect forcené pour les rendez-vous qu’elle-même elle fixe), on continue malgré l’adoption de la loi à se demander si les élections auront bien lieu cette année…
«Ce doute, souligne un député opposant, est entretenu par l’incroyable versatilité du pouvoir. Il a commencé en effet par renvoyer le scrutin à fin 99, ce qui à dire vrai l’arrange le mieux; le Conseil constitutionnel ayant cassé cette loi, qui avait en outre provoqué une formidable levée de boucliers populaire, les dirigeants ont opté pour un simulacre de scrutin à la faveur duquel ils s’autorisaient à désigner les plus importants conseils municipaux du pays. C’est devant le nouveau tollé et dans le climat de la campagne parallèle pour les libertés qu’ils ont renoncé à ce nouveau partage des parts d’influence, pour paraître se soumettre enfin à la volonté populaire en décidant d’organiser dans les délais légaux de vraies élections municipales. Mais cette formule leur convient si peu, en termes d’acquis personnels, qu’on est curieux de voir s’ils vont vraiment s’exécuter. On commencera à cerner un peu mieux leurs intentions réelles dans les prochaines semaines, en constatant si oui ou non ils entament les divers préparatifs techniques nécessaires à la tenue de ces élections…».
Ce député affirme, en prêchant pour sa paroisse, que «Damas pour sa part est favorable aux municipales rapprochées parce qu’il y va de la crédibilité des autorités libanaises et parce que ce pays est laissé municipalement à l’abandon depuis trop d’années, les dernières élections remontant à 1963».
Mais un loyaliste relève pour sa part que «les Syriens, tout en applaudissant à la mise en place d’une nouvelle loi sur les municipales, se refusent à entrer dans les détails… ». Ce qui sous-entend que la porte reste ouverte à toutes les éventualités, dont le report, sous un prétexte ou sous un autre.
Les Américains, de leur côté, indiquent des politiciens locaux, sont pour les municipales au printemps et encouragent toutes les parties à y participer, pour promouvoir la relance du développement urbain et rural, comme pour dynamiser la démocratie. Des principes que l’émissaire U.S., Martin Indyk, a développés lors de ses rencontres à Beyrouth avec les officiels libanais. «La position américaine, dit un ancien ministre, tire son importance du fait que cette même année une autre échéance électorale, les présidentielles, doit en principe concerner d’assez près Washington qui recherche traditionnellement un consensus dans ce cadre avec Damas».
Toujours est-il que, pour en revenir au pouvoir, les présidents Nabih Berry et Rafic Hariri sont tout à fait déterminés, à en croire leur entourage, à organiser effectivement en mai des élections municipales… sauf en cas de force majeure imposé par un quelconque événement soudain, comme une agression israélienne d’envergure.
Du côté de Baabda, maintenant que les désignations sont rayées de la liste, on affirme que le chef de l’Etat est également soucieux que les municipales aient bien lieu sous son mandat, qui est en train comme on sait de tirer à sa fin.
Mais il reste des détails à régler, comme la liste des villages «déplacés» où les élections n’auront pas lieu; ou comme la configuration géographique des municipalités, étant donné que beaucoup plaident — à l’instar de Bkerké — pour des «circonscriptions» réduites, quitte à les relier ensuite dans des fédérations régionalisées, pour mieux servir la population et pour assurer une représentation communautaire plus équilibrée au sein des conseils municipaux. Tout cela pour dire que le pouvoir garde sous la main tous les prétextes techniques qu’il veut pour reporter éventuellement le scrutin…

Après mille péripéties picaresques et plusieurs fausses couches, le pouvoir a fini par «pondre» une loi sur les municipales massivement approuvée à la Chambre et fixant le scrutin — sans désignations — au prochain printemps…Mais le gouvernement en est sorti divisé. Nombre de ministres n’ont en effet pas cru devoir rejoindre le président du Conseil dans son revirement...