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Actualités - ANALYSE

La cohérence du pouvoir sur la sellette..

Le pouvoir sous tutelle issu de Taëf prouve une fois de plus qu’il sait ce qu’il veut. En 1991 le ministre de l’Intérieur, alors Sami el-Khatib qui est considéré comme proche des décideurs d’autant qu’il vient de la Békaa, annonçait pour calmer les esprits lors des parachutages de «députés», que côté élections on procéderait d’abord aux municipales, pour se rôder avant d’aborder le degré supérieur des législatives. Il précisait même qu’on commencerait, comme test dans le test, par Beyrouth. Et faisait imprimer, pour quelques dizaines de centaines de milliers de dollars, des cartes électorales qui se sont avérées lamentablement inutilisables: on n’y avait prévu de place ni pour les empreintes digitales ni même pour la photo-passeport! Bref, comme on sait, les décideurs ayant changé d’avis le pays n’a pas eu de municipales mais des législatives si, et même à deux reprises, malgré les réticences populaires , surtout en 92.
Voilà que le gouvernement remet le couvert. Après avoir annoncé en 95 des municipales pour juin 97, il se ravise une fois aux portes de cette date, annule son projet au cours d’une séance «dramatique» à la Chambre, ce qui provoque une première fureur du chef de l’Etat et renvoie le rendez-vous à fin 99. Mais le Conseil constitutionnel casse sans hésiter cette mesure et somme l’Etat de maintenir les élections pour cette année même. Pris de court le pouvoir trouve une parade «géniale»: on va bien installer des urnes, mais elles ne serviront pas à grand-chose car il se réserve de nommer les édiles, surtout dans les grandes villes, en nombre assez suffisant pour contrôler de fait les municipales. L’opinion se soulève, le tollé est général, mais imperturbable le gouvernement qui se dit fort de l’appui des décideurs, maintient son projet. Et ne finit par céder que par la bande si on peut dire, à cause de l’agitation provoquée par l’affaire des libertés et qui en gagnant la rue a également englobé une forte campagne contre cette hérésie des désignations.
Donc avec encore plus d’enthousiasme que le zèle manifesté il y a encore dix jours pour les nominations, les loyalistes se sont ralliés à l’idée de vraies élections et les groupes parlementaires des dirigeants ont eu l’amusant culot de «dénoncer l’anomalie démocratique» des nominations dans des communiqués!
Voilà vraiment un pouvoir qui sait ce qu’il veut et où il va. L’opposition, infatigable, contente d’avoir remporté deux batailles de suite, celle des libertés et celle des élections, continue sur sa lancée en tirant maintenant à boulets rouges sur le gouvernement pour sa manifeste incohérence. Elle lui reproche presque d’avoir changé d’avis et de lui avoir donné raison!
«On ne doit pas oublier en effet, explique un opposant, que ce n’est pas par conviction — auquel cas on lui rendrait hommage car seuls les sots ne changent pas d’avis — que le gouvernement tourne casaque mais pour des considérations politiciennes tactiques. Il est en effet évident que c’est d’une part par réflexe démagogique, face à la pression de la rue, que les loyalistes ont renoncé à la mascarade des désignations qui a révulsé l’opinion. Et d’autre part parce que les deux membres mahométans de la troïka ont voulu de la sorte détourner en direction de Baabda la grogne populaire, en faisant oublier l’affaire des libertés. Ils savaient en effet que le président Elias Hraoui était attaché aux désignations, non pas par phobie de la démocratie mais parce qu’il y voyait le moyen de préserver la part des chrétiens dans le tableau municipal global. Ils l’ont pris en traître: sans le consulter ni a fortiori le prévenir, ils ont changé leur fusil d’épaule et «lâché» les désignations, pour se venger car dans l’affaire des libertés c’est lui qui avait eu raison et pour faire accroire à l’opinion que dans le système c’est Baabda qui prône l’antidémocratisme. Maintenant, le président Elias Hraoui, avalisant la loi telle qu’amendée par la Chambre réduit les dégâts et récupère même la mise politique avec gain sensible, car il fait constater à l’opinion qu’il est scrupuleusement respectueux de la volonté populaire censée s’exprimer par le biais de la Chambre. C’est bien pour lui mais dans l’ensemble tout le système se condamne une fois de plus par ses différentes pratiques comme par ses revirements qui ne sont pas du tout des repentances».
«D’ailleurs, conclut ce censeur, avec un pouvoir aussi versatile les jeux ne sont jamais faits. Ainsi malgré les apparences, malgré le vote de la loi à la Chambre, on peut encore aujourd’hui parier qu’en fin de compte les dirigeants s’arrangeront pour annuler les municipalités du printemps, sous un prétexte ou sous un autre. Cela non seulement parce qu’ils ne peuvent plus contrôler les conseils municipaux, mais aussi parce que les avoirs des municipalités , confiés à l’Etat — et qui représentent 500 millions de dollars —, ont déjà été dépensés! Après des élections il faudrait rendre des comptes et le gouvernement n’y tient évidemment pas».
Ph.A-A.
Le pouvoir sous tutelle issu de Taëf prouve une fois de plus qu’il sait ce qu’il veut. En 1991 le ministre de l’Intérieur, alors Sami el-Khatib qui est considéré comme proche des décideurs d’autant qu’il vient de la Békaa, annonçait pour calmer les esprits lors des parachutages de «députés», que côté élections on procéderait d’abord aux municipales, pour se...