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Actualités - REPORTAGE

A l'USJ, l'AUB, l'UL , l'USEK, la Sagesse , la NDU ... Mobilisation estudiantine pour la défense des libertés (photos)

Pour la première fois depuis des années, les étudiants du Liban se sont mobilisés pour défendre le droit à l’expression, libre. Le mouvement estudiantin, déclenché après l’arrestation, dimanche soir, des partisans de l’ancien premier ministre, le général Michel Aoun, a atteint hier son apogée. Des sit-in et des marches pacifiques ont été organisés dans la majorité des universités du Liban, pour protester contre la répression des libertés. Certains de ces sit-in se sont poursuivis jusqu’en fin de journée, malgré l’élargissement des manifestants emprisonnés.
«Liberté! Indépendance», entend-on crier dans le campus de l’Université Saint-Joseph. Ces mêmes slogans sont répétés en cœur dans un grand nombre d’autres universités: USEK, AUB, Sagesse, Université Libanaise (faculté de droit), ESIB, Balamand, NDU. Une marche a même été organisée à l’intérieur du campus de l’AUB.
Les étudiants arrêtés dimanche soir ont été libérés hier en milieu de journée. Pourquoi les sit-in se sont-ils quand même poursuivis? Un étudiant nous répond: «Nous sommes satisfaits du résultat de nos manifestations, mais nous n’abandonnons pas notre lutte pour autant».
Les revendications, justement, prouvent que les étudiants sont très éveillés et concernés sinon par la politique, du moins par l’avenir de la nation. Ils se sont lancés dans cette aventure à l’issue incertaine avec un enthousiasme évident. Celui-ci était très visible dans les différentes universités, notamment à l’USJ, où le nombre des étudiants contestataires a atteint plusieurs milliers.
Rejoints au campus de l’USJ par les étudiants de l’ESIB, de la Sagesse, de l’AUB, de la LAU, de l’USEK et de bien d’autres, ils chantent l’hymne national à tout bout de champ, et poussent des clameurs sous n’importe quel prétexte: quand un énorme drapeau est déroulé le long d’une fenêtre, ou à l’arrivée de leurs compagnons en provenance de Bkerké. Ces derniers débarquent en une longue procession, klaxons à l’appui, brandissant des drapeaux munis de rubans noirs en signe de deuil (de la liberté). Des scènes semblables se produisent en même temps à la faculté de droit de l’UL, à Jal el-Dib, où les aounistes, majoritaires, agitent les portraits de leur leader.

L’attitude envers les FSI

Tous les lieux de sit-in ou de manifestations ont été encerclés par les Forces de sécurité intérieure. «Occupez-vous de la circulation», leur crient les étudiants de l’intérieur du campus. Les FSI ont généralement gardé une attitude patiente avec les jeunes, ce qui n’a pas empêché certains incidents de se produire.
A titre d’exemple, une bousculade a éclaté à l’USJ vers le soir. Le bruit court que les étudiants ont décidé d’organiser une manifestation, place Sassine, à Achrafieh. Les agents de l’ordre menacent alors de recourir à des sanctions sévères s’ils quittent leur campus. La situation est très tendue pendant quelques temps. Deux ambulances de la Croix-Rouge se trouvent sur place, et une brigade anti-émeute est dépêchée sur les lieux. Elle est même introduite dans le parking de l’université. Mais un dialogue s’engage finalement entre les deux parties. Les étudiants renoncent momentanément à leur marche, et sortent par petits groupes, non sans promettre de revenir le lendemain.

Témoignages

A noter qu’un grand nombre des jeunes libérés durant la journée ont regagné directement leurs universités. Leurs témoignages ne concordent pas toujours. Bassam Lteif, étudiant à l’USJ, avoue avoir été bien traité pendant sa détention. Mais il n’en est pas de même pour Paul Bassil, étudiant à l’UL de Jal el-Dib. «Nous avons été brutalisés lors de la manifestation, et j’ai été frappé à la tête et au pied», raconte-t-il, un bandage sur le front témoignant de la véracité de ses paroles. «Je n’ai été emmené à l’hôpital qu’après trois heures d’hémorragie», poursuit-il.
Mais pourquoi ont-ils été libérés si vite et quelles en sont les conséquences? «Il n’y aura pas de poursuites judiciaires, pense Bassam Lteif, mais nous serons continuellement des suspects à l’avenir». Chafic Sassine, un autre étudiant de l’UL, pense le contraire. «Nous avons été libérés sous caution d’élection de domicile, ce qui veut dire que nous sommes sujets à des poursuites judiciaires», affirme-t-il. «Mais nous n’avons toujours pas une idée exacte des accusations retenues contre nous ni de la peine que nous risquons», ajoute-t-il.
Mais il y a un point sur lequel les étudiants relâchés sont tout à fait d’accord: le rôle de leurs camarades dans leur libération. «Le mouvement estudiantin a exercé une pression très efficace sur les responsables», disent-ils.
Si ce mouvement estudiantin généralisé constitue un phénomène assez exceptionnel dans la conjoncture présente, c’est bien parce qu’il est un exemple rare de solidarité et de coopération entre les étudiants de différentes universités. Toutes les personnes que nous avons interrogées mettent l’accent sur ce point: «C’est la première fois que nous nous unissons ainsi pour une même cause, et je crois que le contact sera maintenu dorénavant», nous confie l’un d’entre eux.
Quant au climat politique, il est intéressant de noter que des étudiants, d’horizons politiques différents, se sont engagés, cette fois, dans une même bataille. Cela ne s’est pas toujours passé sans incident. A la faculté de Droit de l’UL, à Hamra, une bagarre a éclaté entre étudiants de Amal, opposés au sit-in, et des partisans du mouvement estudiantin, qui avaient inscrit l’article 13 de la Constitution sur un tableau à l’université. La situation s’est calmée par la suite, à la suite de l’intervention du directeur de la faculté.
Il n’en reste pas moins que pour la première fois des étudiants de tous bords, de l’USJ, à l’AUB en passant par l’UL se sont mobilisés pour défendre leurs droits. Les sit-in se poursuivront donc aujourd’hui et les étudiants se sont donnés rendez-vous dans leurs différentes facultés pour assurer le suivi de leur action.

Suzanne BAAKLINI
Pour la première fois depuis des années, les étudiants du Liban se sont mobilisés pour défendre le droit à l’expression, libre. Le mouvement estudiantin, déclenché après l’arrestation, dimanche soir, des partisans de l’ancien premier ministre, le général Michel Aoun, a atteint hier son apogée. Des sit-in et des marches pacifiques ont été organisés dans la...