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Actualités - REPORTAGE

Le réalisateur de Farnell à Beyrouth pour la clôture du festival du cinéma européen Le cinéma de Gérard Corbiau, une porte ouverte sur le monde foisonnant de la musique ...

Le Festival du cinéma européen a clôturé ses activités vendredi soir par la projection de «Farinelli» de Gérard Corbiau. Cette co-production franco-italo-germano-espano-belge de 1994 était présentée pour la première fois au Liban. Pour l’occasion, le réalisateur ainsi que son épouse, Andrée, également scénariste du film, étaient à Beyrouth.
C’est à travers le récit de la vie de «Farinelli», Carlo Broschi, le castrat le plus célèbre du 18e siècle, le parcours de son frère Ricardo, compositeur, dont l’histoire n’a retenu aucune création... Ce film montre l’interdépendance dans laquelle vivent les deux frères, tant au niveau artistique que charnel... Ricardo a besoin de la voix de Carlo pour interpréter ses partitions; les cordes de Farinelli ne peuvent vibrer qu’avec les notes du musicien. Quant à leur rapport aux femmes, ils sont comme les deux moitiés d’une même personne: la femme qui s’aventure dans le lit du premier accepte implicitement d’accueillir le deuxième. «Ce sont les termes du contrat» fait remarquer, laconique, Ricardo à l’une des nombreuses conquêtes de son frère... Un contrat auquel mettront fin les deux Broschi. Le musicien donnant, comme en offrande, sa semence pour engrosser la femme du castrat...

Interview

Après la projection du film, Gérard Corbiau s’est prêté, pour «L’Orient-Le-Jour», au jeu des questions. Barbe et cheveux grisonnants, front largement dégagé, yeux bleu-gris timidement retranchés derrière de fines lunettes en métal, Gérard Corbiau affiche un sourire avenant. Il est ravi d’être au Liban et ému par la chaleur de l’accueil. Il ne cache cependant pas sa déception, quand on lui demande la raison pour laquelle son film n’est pas distribué à Beyrouth. «Bien que les droits soient acquis, je ne sais pourquoi il n’est pas passé en salle» dit-il, contrarié.
Mais il suffit de le lancer sur la réalisation du film pour que réapparaisse son sourire bienveillant. ««Farinelli» a été tourné il y a quatre ans» souligne-t-il. «C’est la première fois, je pense, qu’un film raconte la vie d’un castrat. Il y a eu, dans les années soixante, une comédie italienne qui a abordé le sujet sur le mode de la dérision».
C’est loin d’être le langage qu’a adopté Gérard Corbiau. Pour lui, l’humanité n’est que l’addition de différents destins d’hommes. A l’instar de l’«Amadeus» de Milos Forman où le spectateur découvre le destin tragique de Salieri à travers la vie de Mozart, dans «Farinelli» Gérard Corbiau prend prétexte de l’existence de Carlo Broschi pour tracer la vie de Ricardo Broschi, compositeur dont l’instrument de musique est la voix même du castrat. «Et là, l’instrument de musique qu’est la voix prend ses distances d’avec le compositeur» dit M. Corbiau. «On connaît peu de choses sur la vie de ce castrat», relève-t-il. «Il y a deux documents qui en parlent: une longue interview de Carlo Broschi lui-même, faite à la fin de sa vie, il avait plus de 75 ans. Et on sait la part de réalité que comporte une pareille entrevue. Il y a, par ailleurs, une vingtaine de pages écrites sur lui deux ans après sa mort...».
Gérard Corbiau a toujours donné une place, dans ses réalisations, à la musique. «Je cherche à trouver des formules pour intéresser le public à la musique», souligne-t-il. Rarement associé au cinéma, le monde foisonnant de la composition musicale est un terrain où Gérard Corbiau dit se sentir libre. «C’est un terrain peu exploité et dont le traitement trouve un écho très favorable auprès du public», constate-t-il. Outre «Farinelli», Corbiau a signé la réalisation du «Maître de musique» (1987) nominé aux Oscars et de «L’année de l’éveil» (1990).

Opéras de rêve...

Les magnifiques salles d’opéra où a été filmé «Farinelli» sont en Allemagne. «Nous avons tourné la plupart des scènes d’opéra à Bayreuth, dans un magnifique théâtre en bois construit en 1750. C’est un des plus beaux théâtres baroques d’Europe», indique Corbiau. «Les autorisations pour y travailler ne nous ont été délivrées que quinze jours avant le début du tournage. Tout au long de notre travail, nous avons été sous la haute surveillance... des pompiers. Les risques de feu n’étant pas négligeables». Quant à la voix du castrat, elle est le résultat du mixage de deux voix: «celle grave de Derek Lee Ragin, ténor noir américain et celle de la soprano polonaise, Ewa Mallas Godelewska», explique le réalisateur. «Elles ont été passées au crible sur ordinateur dans le but de les faire tendre l’une vers l’autre. On a ainsi créé une voix médiane, virtuelle en agissant sur le timbre».
Le film a coûté quelque 60 millions de FF, soit un peu plus de 10 millions de dollars.
Gérard Corbiau a collaboré pendant plus de 25 ans à la télévision belge. «Je faisais des reportages, un travail sur le réel. Au début des années 80, j’ai senti le besoin de changer de direction professionnelle. La musique m’intéressait déjà, j’ai choisi d’en faire un terrain de travail». Prochain projet: la danse et la musique baroque. «Louis XIV, le roi soleil, a été un brillant danseur. Entre 15 et 30 ans, il a été le centre des danses de cour».
Le chef de la délégation de la Commission européenne au Liban, M. Dimitris Kourkoulas, a indiqué, pour sa part, que ce Festival avait permis de «montrer à travers la projection de 15 films que l’Europe est un espace où la diversité culturelle est respectée». Les 26 séances qui se sont déroulées pendant une semaine ont attiré un public nombreux, «plus de 10.000 spectateurs», selon M. Kourkoulas. Quant au coût de l’opération, «il s’élève à 35.000 dollars», indique l’ambassadeur européen.

Aline GEMAYELPour l’occasion, le réalisateur ainsi que son épouse, Andrée, également scénariste du film, étaient à Beyrouth.
Le Festival du cinéma européen a clôturé ses activités vendredi soir par la projection de «Farinelli» de Gérard Corbiau. Cette co-production franco-italo-germano-espano-belge de 1994 était présentée pour la première fois au Liban. Pour l’occasion, le réalisateur ainsi que son épouse, Andrée, également scénariste du film, étaient à Beyrouth.C’est à travers le...