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Actualités - CONFERENCES ET SEMINAIRES

Séminaire sur l'implication de la femme dans la vie publique

Qui a dit que lorsque les femmes se rencontrent elles ne parlent que de mode et de potins? Un séminaire sur l’importance de l’implication de la femme dans la vie publique, notamment dans les institutions gouvernementales et les pouvoirs municipaux, s’est tenu en fin de semaine à l’hôtel Commodore, à Hamra, à l’initiative du comité de suivi (non-gouvernemental) issu du sommet de Beijing sur les conditions de la femme. Organisé en collaboration avec la fondation Friedrich Ebert, ce séminaire s’est étalé sur deux jours.
Ont notamment pris part aux travaux de ce colloque, la Première Dame, Mme Mona Hraoui, Mme Nayla Moawad, député de Zghorta, M. Bechara Merhej, ministre d’Etat chargé de la Réforme administrative, Mme Nouhad Soueid, député de Jbeil, M. Boutros Harb, député de Batroun, ainsi que des représentants des principales associations féminines de différentes régions.
Les intervenants ont tous mis l’accent sur l’existence d’une discrimination à l’égard de la femme, à tous les niveaux, tant familial, social que juridique. Le débat s’est orienté vers trois axes majeurs: la place de la femme dans notre société; le rôle de la femme dans les pouvoirs municipaux; et la question des élections municipales. Mme Mona Hraoui s’est exprimée sur la question de l’égalité entre l’homme et la femme, et a préféré parler de complémentarité entre eux. Elle a dit qu’il ne fallait pas qu’il y ait lutte entre l’homme et la femme, et qu’ils doivent être unis dans un même combat pour construire, chacun à sa façon et selon ses compétences une société saine.

Les éléctions
municipales

Evoquant, de son côté, le dossier de la participation aux élections municipales qui devraient avoir lieu au printemps prochain, M. Boutros Harb s’est déclaré, une nouvelle fois, opposé au projet de nomination au sein de certains conseils municipaux, soulignant sur ce plan que la femme devrait montrer son intérêt et ses capacités dans ce domaine. «La femme devrait pouvoir avoir la satisfaction de mériter sa place plutôt que de la devoir à quelqu’un», a précisé M. Harb. Quant à M. Béchara Merhej, il a souligné l’importance des élections municipales pour le bon fonctionnement du système démocratique, et a accepté les nominations dans un cas exceptionnel, comme celui des territoires occupés au Sud.
Lors des dernières élections législatives, les femmes ont voté à plus de 50%, or seulement trois femmes ont été élues. Peut-être est-ce dû au fait, comme l’a relevé Mme Linda Matar, que beaucoup de gens ne font pas encore confiance aux femmes. Mmes Nayla Moawad et Nouhad Soueid, qui se sont lancées dans l’arène politique après le décès de leur mari, ont parlé de leurs expériences respectives et de la façon, parfois négative, dont cela avait été accueilli au début. Dans un langage clair et pragmatique, Mme Moawad a présenté objectivement des données sur la situation de la femme au niveau gouvernemental: le Liban a été le premier pays arabe à reconnaître les droits politiques de la femme. Or aujourd’hui, elles ne sont que trois députés au Parlement. Elle a insisté sur l’importance des élections municipales qui sont «une occasion en or pour que la femme s’implique dans la vie publique et politique de son pays, car le combat contre la discrimination des femmes ne se fait pas seulement entre quatre murs et par les paroles, mais il faut passer à l’action». «Heureusement que les femmes sont de plus en plus nombreuses à être diplômées et à suivre un enseignement supérieur», a ajouté Mme Moawad. A ce sujet, Mme Sana Osseirane a parlé du rôle primordial de l’éducation civique et du niveau culturel des citoyens qui permet l’acceptation de la différence et du dialogue. Mme Alia Berty Zein, de son côté, a présenté des chiffres alarmants sur le niveau d’études des membres de nos assemblées municipales actuelles: 6% seulement ont fait des études secondaires et 4% des études universitaires, c’est-à-dire que le reste, près de 90%, ont à peine terminé le cycle complémentaire. Pour une société moderne et plus humaine, la femme doit s’impliquer davantage dans les décisions politiques. Et pour ce faire, tout un travail de réhabilitation au niveau des valeurs sociales, des mentalités et des lois est à entreprendre au plus vite.

Une éternelle mineure

De nombreux intervenants ont, d’autre part souligné au cours des débats que malgré quelques lois promulguées durant ces dernières années, la femme reste en quelque sorte «une éternelle mineure qui passe de la tutelle de son père à celle de son mari». Nous vivons dans une société patriarcale où la femme doit lutter doublement pour montrer qu’elle est capable de faire aussi bien que l’homme. C’est seulement en 1967 qu’on lui a accordé l’égalité du salaire avec l’homme. Et ce n’est qu’en 1993 qu’on lui a donné le droit de témoigner dans le registre foncier. Concernant la participation de la femme à la vie active, les chiffres parlent d’eux-mêmes: 7% des ingénieurs sont des femmes, elles représentent 17% des médecins, 52% des pharmaciens, et 30% des avocats. Dans l’Administration publique, on en trouve un grand nombre mais elles sont une minorité à occuper les postes importants (une seule est directeur général).
Des représentants de divers secteurs professionnels (éducation, bancaire, commercial, juridique, associatif, industriel) ont exposé la situation de la femme, chacun selon son domaine, et on dit qu’il y aurait à faire pour améliorer cette situation. Pour Mme Aïda el-Khatib, représentante des enseignants, tout commence à l’école, donc il faut instaurer la mixité dans les collèges. M. Fouad Tabet, du secteur industriel, souhaite un jour dire: «Madame le ministre».
Mme Mehyi el-Dinn el-Katab, elle, a assuré qu’au sein de la fondation Hariri, «il n’y a aucune discrimination entre les femmes et les hommes».
Elham Kallab Bsat a parlé d’une certaine évolution tangible: aujourd’hui, la femme a un programme bien défini, elle est une partenaire à part entière et s’assure mieux qu’avant en tant qu’agent de développement. D’objet, elle est devenue sujet. Tout un travail de fond est à réaliser pour changer les mentalités et les préjugés.
Mme Fahima Charafeddine, membre du Comité non-gouvernemental du suivi des affaires de la femme, a insisté sur le rôle des comités non-gouvernementaux présents dans tout le Liban. L’idée de créer un comité central qui coordonne l’action de ces différents groupes, et rend le travail plus efficace, a été bien accueillie. Plusieurs responsables de ces comités ont exposé chacune leur plan d’action au niveau de leur région, en rappelant les obstacles qu’elles rencontraient, comme l’occupation israélienne au Liban-Sud, les mentalités, ou le manque de moyens, et même parfois de personnes. Il est intéressant de constater que d’une région à l’autre, le rôle et la conception de la femme peut différer, mais les problèmes de discrimination restent présents partout, même si c’est à des degrés inégaux.

Analphabétisme
juridique

Les propositions majeures qui ont suivi ce séminaire portent sur une réforme des lois, surtout municipales, qui, par exemple, obligent la femme à voter ou à présenter sa candidature dans la région de son mari, et non dans sa région natale, puisque qu’elle est rayée du registre de ses parents dès qu’elle se marie. L’accent a aussi été mis sur la nécessité d’une campagne d’information dans les médias. Il faut favoriser la mixité dans les comités non-gouvernementaux, établir plus de contacts, chacun dans sa localité, pour trouver l’argent nécessaire aux projets. Bien entendu, le travail doit continuer même après les élections municipales, car il reste beaucoup à faire pour que la femme puisse s’imposer et s’intégrer vraiment dans la vie économique et politique de son pays.

Le mérite de ces séminaires est de contribuer à créer un éveil chez les femmes libanaises qui pour la plupart souffrent «d’analphabétisme juridique». Selon M. Mohammad Kassem, elles ne connaissent absolument pas les textes de loi qui les concernent. Et à ce niveau là, il y a du travail à faire. Le premier pas est de favoriser une prise de conscience collective et, ensuite, il faut informer la femme sur ses droits et entreprendre des réformes dans les textes de loi. Ainsi, la femme pourra passer du rôle du spectateur passif à celui d’acteur impliqué dans la société et dans l’évolution de son pays, en participant aux prises de décision, directement ou indirectement. Ce point précis a été l’une des recommandations du séminaire.

Les débats et les réunions sur la place et le rôle des femmes dans une société censée être démocratique, se suivent ces derniers temps et montrent l’intérêt croissant pour cette question dans notre société. On ne peut s’empêcher dans ce cadre d’avoir une pensée respectueuse pour le travail accompli par la regrettée Laure Mghayzel qui a lutté sans répit pour sauvegarder les droits de la femme.
Qui a dit que lorsque les femmes se rencontrent elles ne parlent que de mode et de potins? Un séminaire sur l’importance de l’implication de la femme dans la vie publique, notamment dans les institutions gouvernementales et les pouvoirs municipaux, s’est tenu en fin de semaine à l’hôtel Commodore, à Hamra, à l’initiative du comité de suivi (non-gouvernemental) issu du...