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Actualités - REPORTAGE

Romeo et Juliette par le ballet de Kiev : Charnel et sublime (photos)

Moment d’émotion esthétique sans partage que cette création chorégraphique d’Anatoly Shekera, de passage au Forum de Beyrouth. Le drame shakespearien revisité s’offre ici dans une vision où les corps et les sens exultent.
Nul besoin d’être initié pour apprécier le «Roméo et Juliette» de la troupe de Kiev.
Dans un décor ni primitif ni high tech résonne avec une force impressionnante la partition de Prokofiev. Dans ce contexte, l’amour de Roméo et Juliette est un «scandale» charnel et sublime, il a la légèreté de la liberté. Le propos est clair et fort. Le langage chorégraphique est dépouillé, rigoureux mais inventif. Une gestuelle de pantomime s’ajoute à la danse. Les combats de rue et les duels se font avec des épées imaginaires. Une façon pour le chorégraphe de faire parvenir le message suivant: ce ne sont pas les armes qui tuent mais la haine.
Anatoly Shekera ménage à chaque tableau sa surprise, sa beauté et son charme. Laissant le public, souffle suspendu, admirer une troupe de danseurs d’une grande homogénéité qui semble inventer la danse à chaque geste.
Shekera a rejoint l’Opéra de Kiev en 1966. Il y assume, depuis 1994, le rôle de maître de ballet.
En ouverture, exécution magistrale du «Koullouna» par l’Orchestre symphonique de l’Opéra national ukrainien ( 63 musiciens) qui enchaîne avec quelques mesures avant le lever du rideau.
Sur la «piazza» de Verone, le jour se lève. La place s’anime. La foule grossit, se divise. D’une part les Montaigu (clan de Roméo), de l’autre les Capulet (clan de Juliette). Au milieu, un Tybalt (cousin de Juliette) impertinent dont l’impulsion à tirer l’épée est aussi rapide que ses provocations. Dimitri Klavin, en justaucorps pourpre, s’exprime pleinement, la force de ses gestes traduisant son caractère et l’importance du personnage: sa mort est la cause de la fatalité qui frappera Roméo et Juliette.
Sous un clair de lune bleuté, les scènes d’amour... Pas de démonstration de bravoure, ni de pas acrobatiques inutiles. Roméo porte Juliette, l’enroule autour de lui, l’enlace tendrement. avec une souplesse et une légèreté telles qu’on dirait qu’ils se frôlent à peine.
La papillonnante Juliette défie avec un bonheur sautillant les lois de la gravité. Belle, gracieuse, éthérée, Olena Filipieva rend tout aussi bien la Juliette innocente et angélique du début que l’amante passionnée de la fin.
Un duel (au sommet) entre Tybalt et Mercutio. Le noble ami de Roméo, Artium Datsichen, est tour à tour moqueur, fébrile, impatient et courageux. Il évolue sur scène avec force et élégance, décrochant les applaudissements et les cris du public féminin. Moment d’intensité à son apogée lorsqu’il «joue» son agonie. Un numéro d’acteur? Pourquoi pas.
Pour que ses danseurs s’expriment pleinement, Anatoly Shekera a écrit la chorégraphie comme on note une portée musicale: les mouvements, les enchaînements sont précieusement consignés. Cela donne une grande souplesse à l’interprète. Il s’appuie sur une structure objective du mouvement et le réincarne avec sa propre sensibilité.
Les thèmes de Roméo et Juliette: l’amour, l’impétuosité de la jeunesse et la guerre sont éternels, mais «ressourçables» au quotidien.
Un ballet qui, comme l’amour, a fait de l’émotion une compagne fidèle. S’y adonner un instant suffit pour recevoir l’offrande...

Maya GHANDOUR
Moment d’émotion esthétique sans partage que cette création chorégraphique d’Anatoly Shekera, de passage au Forum de Beyrouth. Le drame shakespearien revisité s’offre ici dans une vision où les corps et les sens exultent.Nul besoin d’être initié pour apprécier le «Roméo et Juliette» de la troupe de Kiev.Dans un décor ni primitif ni high tech résonne avec une force...