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Actualités - REPORTAGE

Après 16 jours de garde à vue, Marwan Bardawil a été libéré hier Journée cruciale aujourd'hui dans l'enquête sur la MEA

Deux développements majeurs ont marqué hier l’enquête sur la location par la MEA de trois avions «Airbus» à la Singapore Airlines: la remise en liberté de Marwan Bardawil et l’apparition de documents montrant que les négociations pour la conclusion du contrat de bail ont commencé en novembre 1996 et non en février 97.
Le premier événement était déjà dans l’air depuis mardi, surtout après la note présentée par les avocats de Bardawil au procureur général, M. Addoum, et la visite, dite de courtoisie, que lui ont faite deux personnes dont un fonctionnaire de l’ambassade américaine. Rappelons que la société américaine «Boullioun», dont les Bardawil sont les représentants au Liban, avait annoncé dans une note adressée au parquet qu’elle prendra certaines mesures si ses représentants continuent à faire l’objet de poursuites au Liban, dans une affaire dans laquelle ils ne sont pas impliqués.
Mardi soir donc, et avant de clôturer sa longue journée d’investigations, le général Béchara Salem avait laissé entendre qu’il interrogerait une nouvelle fois Marwan Bardawil le lendemain. De fait, hier, et alors que l’étage réservé au parquet était quasiment désert (les journalistes croyant qu’il s’agissait d’une journée calme, pour le dossier MEA), il a convoqué Marwan Bardawil et l’a entendu pendant une heure, sans prendre une décision. A 12h30, les avocats de M. Bardawil, MM. Badawi Abou Dib, Joe Khoury-Hélou, Antoine Abou Dib et Assaad Najm sont arrivés chez le procureur Addoum et c’est là qu’ils ont appris la grande nouvelle. Au bout de 16 jours de détention préventive, justifiée officiellement par «les besoins de l’enquête», Marwan Bardawil a enfin retrouvé la liberté. Le jeune homme avait été placé en garde à vue car le parquet avait reçu des documents montrant que la «Bardawil aviation», société libanaise offshore, avait reçu des montants réguliers de la «Boullioun» qui possède le tiers des actions de la «SALE» (la compagnie qui a racheté les avions loués par la MEA). Le parquet aurait voulu aussi pouvoir entendre le père de Marwan, Fouad Bardawil (fondateur de la société, installé à Dubaï). Mais celui-ci n’est pas rentré au Liban et seul son fils a donc été entendu. Marwan Bardawil a bien sûr nié toute implication dans la transaction entre la MEA, la Singapore Airlines et la SALE, et ses avocats ont apporté des documents montrant que les sommes reçues par la «Bardawil aviation» de la «Boullioun» sont de simples honoraires. Mais le parquet a mis hélas 16 jours avant d’en être convaincu. D’ailleurs, selon lui, Bardawil pourrait être convoqué une nouvelle fois, puisqu’il doit rester à la disposition de la justice et il ne peut quitter le pays, tant que l’enquête n’est pas finie.

Une correspondance
remontant à 1996

Mais, avec les éléments apparus hier, le parquet pourrait trouver de nouvelles pistes et oublier Bardawil. Selon des sources dignes de foi, il existerait une correspondance entre le PDG de la MEA, M. Khaled Salam, et le directeur de la Singapore Airlines, M. Mattew Samuel, datée de novembre 1996. Or, jusqu’à présent, M. Khaled Salam avait affirmé au général Salem, et d’ailleurs aux membres du conseil d’administration de la compagnie, que les négociations avec la Singapore Airlines n’avaient commencé qu’en février 1997. Pourquoi a-t-il modifié les dates? C’est l’une des questions à laquelle le chef de la brigade criminelle essaiera probablement de trouver une réponse. Il entendra ainsi aujourd’hui le PDG de la MEA mais aussi son fils, Sélim, qui se trouvait à Singapour en novembre 96, en principe, mandaté par la banque américaine «American express» qui l’aurait chargé d’étudier les possibilités de financer l’achat d’avions par une compagnie américaine, la SILK Airways. M. Sélim Salam avait remis, mardi, au général Salem, une lettre de la banque «American express» confirmant qu’elle l’avait envoyé en mission, à Singapour, en novembre 96. Mais le général avait jugé ce document insuffisant. Il voulait l’ordre de mission délivré par la banque en novembre 96 et non une lettre rédigée récemment à la demande du jeune Salam. Celui-ci devra donc prouver que sa présence à Singapour, au moment où commençaient les négociations entre la Singapore Airlines et la MEA, n’avait rien à voir avec cette transaction. Certes, cela pourrait être une simple coïncidence, mais dans ce dossier très complexe, tout élément peut être utile et mérite d’être vérifié.
Le général Salem entendra aussi, dans le courant de la journée, le directeur général de la compagnie, M. Youssef Lahoud, qui lui avait remis mardi une copie de ses pouvoirs tels que les avait définis M. Khaled Salam au cours de la première réunion du conseil d’administration sous sa présidence, en septembre 1995. Ceux-ci se limitaient à la gestion des affaires courantes.
Le général Salem a aussi convoqué deux ingénieurs techniciens, MM. Antoine Thoumy et Antoine Massoud (qu’il n’a pu entendre mardi, faute de temps) afin de comparer leurs propos avec les dépositions des deux ingénieurs techniciens qui avaient été chargés par M. Salam de superviser la transaction, sur le plan technique, MM. Iskandar Nahas et Nazareth Karakachian. Le général entendra aussi M. Georges Yacoub, membre du conseil d’administration qui avait enregistré son opposition à la transaction, parce que le contrat ne contient pas «une clause anticorruption», au cours de la réunion du conseil d’administration, tenue le 19 novembre 1997. Selon des sources judiciaires, il pourrait décider d’entendre d’autres membres du conseil d’administration, ainsi que l’ingénieur Walid Bouhaïri, qui s’était rendu à Singapour pour inspecter les avions alors qu’ils se trouvaient au sol. La journée d’aujourd’hui s’annonce donc chargée et, en principe, déterminante pour le cours de l’enquête.

Scarlett HADDAD
Deux développements majeurs ont marqué hier l’enquête sur la location par la MEA de trois avions «Airbus» à la Singapore Airlines: la remise en liberté de Marwan Bardawil et l’apparition de documents montrant que les négociations pour la conclusion du contrat de bail ont commencé en novembre 1996 et non en février 97.Le premier événement était déjà dans l’air...