Rechercher
Rechercher

Actualités - REPORTAGE

Le scrutin aura lieu aujourd'hui pour pourvoir aux 92 sièges du SRC Elections estudiantines à l'AUB sur fond de clivage politique traditionnel

Listes électorales, affiches, stands, programmes... La campagne électorale menée par les étudiants de l’AUB pour pourvoir aux sièges du SRC (Student Representative Commitee) n’a décidément rien à envier à de véritables élections démocratiques.
A la veille du scrutin qui aura lieu aujourd’hui, et qui déterminera les membres du comité représentatif des étudiants, le campus de l’université dégageait hier une impression d’enthousiasme, marquée par une agitation fébrile. En examinant de plus près cette campagne électorale, un observateur étranger peut aisément se rendre compte du considérable brassage d’idées qui a lieu dans l’enceinte de l’AUB, un brassage d’idées en grande partie calqué sur les principaux courants politiques présents à l’extérieur du campus. La question reste de savoir si cette représentation estudiantine obéit quand même à des critères propres à l’AUB, ou si elle ne fait que refléter les conflits et tensions politiques dans le pays...
L’ambiance du campus de l’AUB se caractérisait hier par un grand dynamisme, une fièvre électorale «à l’américaine»: des stands dotés de photos, des drapeaux libanais, des chaînes hi-fi diffusant de la musique assourdissante, un va-et-vient incessant... Les candidats, postés dans leurs QG, attendent leurs éventuels électeurs afin de leur distribuer tracts et programmes.
Ces candidats sont groupés en quatorze listes environ, qui mènent la bataille pour 92 postes. Chaque candidat doit se présenter au nom de sa classe (junior, sophomore ou senior) et de sa faculté: Lettres et Sciences (Arts & Sciences), Génie, Médecine, Agriculture ou Santé publique. La première de ces facultés est de loin celle qui monopolise le plus d’effectifs. Elle se démarque ainsi des autres facultés tant en ce qui concerne le nombre de candidats que la nature de la campagne. Les listes peuvent être classées en trois catégories:
l Apolitiques: Elles ne se réclament d’aucun courant politique et critiquent même les agissements de certains de leurs compagnons qui se perdent dans les conflits politiques au détriment des intérêts des étudiants.
l Politiques: les courants que ces listes représentent à l’intérieur du campus sont plus ou moins déclarés. Certains affichent franchement leurs convictions, d’autres se défendent de suivre un quelconque courant ou un quelconque leader. Contrairement aux affirmations des indépendants, ils déclarent faire la part des choses et ne pas mélanger convictions politiques et travail universitaire.
l Ecologique: cette dernière liste est unique en son genre. Elle constitue une expérience pilote, selon son unique candidat. Celui-ci a souhaité créer un courant à la fois neutre politiquement, mais porteur d’un message, d’une cause.
Le paysage «politique» de cette campagne est donc assez complexe: tout en étant calquée sur le système politique du pays (aucun parti «nouveau» n’est, par exemple, créé), la campagne semble être marquée par une dynamique propre à elle, particulièrement étrange pour un observateur neutre. A titre d’exemple, plusieurs sources estudiantines sur le campus ont fait état d’une coalition «secrète» entre le courant aouniste et les partisans du premier ministre, M.Rafic Hariri (!). Les deux parties concernées ont cependant farouchement démenti ces informations.
Une autre coalition, déclarée celle-là, s’est nouée entre le «Hezbollah», le candidat du PSP, et la «liste du peuple». Cette dernière est qualifiée par certains de liste «wakimiste», du fait qu’elle regrouperait des candidats proches du député Najah Wakim. Les autres listes ayant déclaré des appartenances politiques — tout en faisant cavalier seul — sont la «liste du changement» (islamiste), et la liste «sans frontières», un regroupement de courants gauchistes.
Ces listes affiliées à des courants politiques précis, reçoivent-elles des aides extérieures? Seul le candidat du PSP a affirmé dépendre du parti pour le financement de sa campagne. Les «jeunes de l’avenir» (partisans du premier ministre) ont déclaré financer leur campagne par le biais de la Caisse de leur association, qui existe indépendamment de l’université (ils ont, par ailleurs, tenu à préciser que leurs fonds ne venaient pas de M.Hariri lui-même «comme le prétendent certains»).
Reste la question majeure: quelle est la conséquence de ces tendances politiques, voire des ingérences politiques dans certains cas, sur l’ambiance du campus, et sur le travail du comité représentatif des étudiants? Les avis sont partagés sur ce point. Les candidats neutres condamnent le plus souvent les attitudes très politisées de certains de leurs camarades. «Il ne faudrait pas introduire la politique dans des élections estudiantines, car il faut garder la priorité aux intérêts des étudiants», déclare l’un d’eux. «Les courants politiques perdent du temps à se quereller entre eux, et la vie du campus finit par refléter les conflits de la vie politique du pays», ajoute un autre. Un troisième assure que «les étudiants en ont assez, et bon nombre d’entre eux vont voter pour les candidats indépendants parce qu’ils ne veulent plus de politique».
Pour les candidats plus politisés, cependant, cette question ne se pose tout simplement pas. «Il est normal que la vie politique du pays se reflète sur les activités du campus, mais les convictions n’empêchent pas le travail sérieux, et nos programmes se soucient du bien-être des étudiants», déclarent-ils à l’unisson.
Quelles sont les doléances des candidats? Nous avons pu remarquer que les listes proches de l’opposition réclament, de manière générale, plus de liberté d’expression, et critiquent la «censure» pratiquée par l’administration.
En tout état de cause, d’une tournée rapide sur le campus de l’AUB se dégage une atmosphère bon enfant à la veille du scrutin, à tel point qu’un membre de la «liste du peuple» avoue que «même les adversaires ne cessent pas d’être des amis». Il reste que nul ne peut ignorer que cette campagne électorale est une véritable prestation démocratique, du fait que les conflits d’opinion gardent une proportion normale. Un étudiant résume la situation par une formule heureuse: «Il faut œuvrer pour que la vie politique du pays soit influencée par ce qui se passe ici, et non pas le contraire».

Suzanne BAAKLINI
Listes électorales, affiches, stands, programmes... La campagne électorale menée par les étudiants de l’AUB pour pourvoir aux sièges du SRC (Student Representative Commitee) n’a décidément rien à envier à de véritables élections démocratiques.A la veille du scrutin qui aura lieu aujourd’hui, et qui déterminera les membres du comité représentatif des étudiants, le...