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Actualités - ANALYSE

Révélations sur Taëf : c'est Moawad, président virtuel, qui a voulu la conférence...

Une révélation de portée historique: à en croire un député qui était à l’époque aux premières loges, le choix s’était porté en 1989 sur René Moawad comme président de la République bien avant la conférence de Taëf, à l’issue de tractations aussi discrètes qu’intensifiées impliquant outre les décideurs étrangers nombre de pôles politiques, religieux ou économiques du pays.
Et d’après ce député c’est à René Moawad que le Liban est redevable sinon du pacte du moins de la conférence de Taëf: faisant valoir que son élection ne servirait à rien sans une cessation de l’état de guerre, il a exigé qu’on organisât d’abord une conférence de paix devant déboucher sur un document d’entente nationale, l’expression étant de lui...
Toujours selon le même témoin «René Moawad répétait à qui voulait l’entendre qu’il ne voulait pas retomber dans l’erreur involontaire des présidents Chehab et Sarkis qui avaient, en des époques également troublées, accepté la présidence sans que l’on n’eut d’abord réglé vraiment le problème politique de base ni réalisé l’entente nationale. D’où perpétuation des éléments de clivage et de rupture internes, la crise se faisant larvée sous Chehab jusqu’à éclater en 1968 avec le conflit Nahj-Helf et se trouvant rouverte après une pause de quelques mois sous Sarkis, faute de l’accord préliminaire requis».
De ces indications on peut déduire que le président-martyr René Moawad était particulièrement sensible aux causes purement libanaises de la guerre. Et d’ailleurs personne en 1989 ne lui aurait donné tort, les Palestiniens qui avaient causé l’explosion de 1975 étant pratiquement hors-jeu depuis sept ans déjà (si l’on excepte la bataille des camps qui les a opposés au mouvement «Amal» au milieu des années quatre-vingt), après avoir transmis le flambeau de la guerre aux fractions locales dressées les unes contre les autres, même à l’intérieur des régions mahométanes ou chrétiennes.
Quoi qu’il en soit, ce parlementaire, de premier plan, laisse derechef parler sa mémoire et rappelle que «lors de son avènement Fouad Chehab, après formation d’un Cabinet avorté, avait accepté l’idée de Raymond Eddé: confier les rênes à un gouvernement extrêmement réduit, de quatre membres seulement, une sorte de comité de salut public plaçant côte à côte Rachid Karamé et Pierre Gemayel, l’un en tant que délégué de la «révolution» et le deuxième en tant que représentant de la «contre-révolution». Cet attelage devait symboliser la réunification politique du pays et l’entente retrouvée».

Échec

«Mais en matière nationale, souligne cet homme politique, ce qui va sans dire va mieux en le disant et il est toujours nécessaire de coucher par écrit des accords déterminés sans quoi la césure n’est jamais loin. Dans cet ordre d’idées on avait élu Elias Sarkis en 1976 avant d’avoir réglé entre «Front libanais» et «Mouvement national» le conflit tournant autour de la présence armée palestinienne. Dès lors d’entrée de jeu le régime s’est retrouvé dans l’impasse: il voulait désarmer les milices libanaises, mais le «front libanais» a refusé d’obtempérer en soulignant que les Palestiniens pour leur part allaient garder leur armement sous prétexte de défendre leur cause face à Israël. L’élection de Sarkis, effectuée six mois avant le délai légal pour hâter la fin de la guerre, n’a donc pas atteint cet objectif et après une trêve d’un an les hostilités ont repris de plus belle».
«Pour éviter la réédition de ce malheureux précédent, poursuit cette personnalité, René Moawad a donc insisté pour qu’avant son élection un accord de base soit conclu et il y a eu Taëf, approuvé par la plupart des pôles libanais, notamment par Bkerké. Le président élu, défenseur déterminé de la coexistence et de l’entente, a voulu ensuite traiter le problème posé par le général Michel Aoun par le dialogue, ce qui allait de toute évidence demander du temps. En même temps le président Moawad a entrepris de convaincre les leaderships chrétiens encore réticents à l’égard de Taëf, en soulignant que c’était là tout ce qu’il était possible de faire dans les très difficiles circonstances que vivait le pays et qu’on pourrait toujours amender les termes de l’accord par la suite, l’essentiel étant de rétablir la paix civile. Moawad pensait jeter les bases d’une république des institutions, de la participation de tous en rétablissant la souveraineté nationale sur l’ensemble du territoire, dans un climat de concorde, d’égalité des chances, de justice et de progrès social comme il l’a proclamé dans son discours d’investiture... Malheureusement, conclut ce député, il a été assassiné avant d’entamer sa tâche et on peut croire que s’il avait vécu, Taëf aurait été bien mieux appliqué».

E.K.
Une révélation de portée historique: à en croire un député qui était à l’époque aux premières loges, le choix s’était porté en 1989 sur René Moawad comme président de la République bien avant la conférence de Taëf, à l’issue de tractations aussi discrètes qu’intensifiées impliquant outre les décideurs étrangers nombre de pôles politiques, religieux ou...