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Actualités - ANALYSE

Même et surtout en affaires, les arabes restent divisés...

Comme un croc-en-jambe ou un pied de nez au prochain sommet économique de Doha, qui se tiendra avec la participation d’Israël, on vient d’organiser à Beyrouth la 7e conférence des hommes d’affaires et investisseurs arabes. Avec un invité d’honneur tout à fait emblématique, M. Mahmoud Zohbi, premier ministre syrien. Dans son mot d’ouverture, le chef de l’Etat M. Elias Hraoui a tenu à rappeler qu’à l’instar de la Syrie, le Liban refuse de participer à la conférence de Doha. Il a invité les Arabes à se montrer solidaires, à faire front ensemble face aux développements régionaux et à créer un marché commun.
Mais diverses autres interventions (la conférence a réuni plus de 600 participants arabes et plus de 400 Libanais) ont permis de constater combien les positions peuvent être éloignées et combien peu les pays arabes se soucient, dans le domaine économique comme dans le reste, de solidarité et de stratégie unifiée.
Ce qui fait qu’à Beyrouth même, les bonnes âmes n’ont pas manqué de se demander s’il «est vraiment habile d’organiser un forum qui serve de révélateur aux divisions du camp arabe. Ne valait-il pas mieux reporter le rendez-vous pour bien paver la voie, par d’actifs contacts diplomatiques préparatoires, afin que ces divergences ne soient pas trop mises en relief, ainsi que pour tenter de colmater les brèches et de rapprocher des positions si opposées?».
Ces opposants déplorent par ailleurs «la pusillanimité, la faiblesse d’une direction locale qui se laisse ballotter au gré des vents et n’a pas compris qu’il valait mieux tenir la scène libanaise, si vulnérable, à l’écart des dissensions extérieures et de la politique des axes arabes. Au lieu de leur ouvrir une lice pour leurs empoignades, il aurait mieux valu leur rappeler leurs engagements à aider ce pays sur le plan économique et financier qui jusque-là sont restés lettre morte. C’est de l’inconscience ou du cynisme que d’inviter le capital arabe à tenir congrès chez nous pour se contenter de nous abreuver de discours mielleux et de grands serments sentimentaux, au moment même où la crise budgétaire et socio-économique atteint chez nous son paroxysme. Où sont les deux milliards de dollars promis au sommet arabe de Fès en 1978, où sont les deux autres milliards du Fonds spécial créé par le sommet de Rabat en marge du pacte de Taëf?».
«Et puis pourquoi, poursuivent ces sources de l’Est, veut-on à tout prix placer le Liban en toute première ligne de la bataille autour de Doha, alors qu’on sait parfaitement qu’il ne fait ni la pluie ni le beau temps dans aucun domaine et que son état de convalescence prolongée lui imposerait de faire profil bas, d’éviter toute agitation. N’est-ce pas d’ailleurs en suivant cette saine logique que, par ailleurs, on conseille au Libanais d’éviter les secousses politiques internes et de ne pas plonger dans une quelconque crise ministérielle? Pourquoi ce même conseil n’est-il plus suivi quand il s’agit de faire front contre un projet qui est notoirement d’inspiration américaine comme la conférence de Doha? Veut-on que les foudres de l’Oncle Sam se tournent principalement contre nous, veut-on nous faire payer encore une fois les pots par d’autres cassés? Il est clair qu’ayant refusé depuis le début, depuis 1991, de participer aux multilatérales tant que les bilatérales n’ont pas avancé, le Liban ne peut se rendre à aucune conférence où Israël serait présent, mais c’est bien la première fois qu’on le crie ainsi sur les toits. Et on ne doit pas oublier la règle d’or de notre diplomatie, une constante que nos gouvernements les plus extrémistes ont respectée jusque-là: le Liban est avec les Arabes lorsqu’ils s’entendent et il est neutre lorsqu’ils se disputent. C’est peut-être difficile à croire aujourd’hui, mais c’est l’un des postulats sur lesquels la Ligue arabe elle-même s’était fondée en 1948, la délégation libanaise exigeant et obtenant qu’à ce titre toute résolution devrait être obligatoirement prise à l’unanimité ou abandonnée. Plus que quiconque, le Liban a milité pour une unité arabe bien comprise et le concept de pacte de défense commune, personne ne l’a aussi bien défendu et plaidé que lui, tout au long de l’histoire de ces cinquante dernières années. Or voici que nous plongeons dans le marécage des divisions interarabes, comme l’affaire des athlètes irakiens, refoulés à Masnaa alors qu’ils venaient participer aux Jeux panarabes, avait commencé à le prouver, le parti pris se faisant alors au profit de Djeddah et de Koweit qui n’avaient pourtant rien demandé! Actuellement, ce que l’on voit, ce sont des incidents diplomatiques comme celui qui a eu lieu lorsque l’ambassadeur de Qatar a tenté de répondre au premier ministre syrien».
Cependant une source loyaliste affirme pour sa part que «la conférence de Beyrouth n’a évidemment rien à voir avec Doha, ni de près ni de loin. C’est une concertation nécessaire entre articulations économiques et elle était prévue de longue date. On peut estimer que c’est au contraire les Américains qui cherchent à faire croire qu’il existe un lien, pour faire pression sur la Syrie comme sur nous, tant pour faire mousser la conférence de Doha que pour réactiver le processus de paix dans des conditions contraires aux principes de Madrid et par là inacceptables. C’est dans ce but que Dennis Ross se repointe dans la région et plus que jamais nous devons pour notre part lutter contre tout projet de paix inéquitable et contre toute normalisation prématurée avec Israël, quoi qu’en pensent certains Arabes…».
Comme on voit, les divisions sont finalement une spécialité aussi libanaise qu’arabe…
Ph.A.-A.
Comme un croc-en-jambe ou un pied de nez au prochain sommet économique de Doha, qui se tiendra avec la participation d’Israël, on vient d’organiser à Beyrouth la 7e conférence des hommes d’affaires et investisseurs arabes. Avec un invité d’honneur tout à fait emblématique, M. Mahmoud Zohbi, premier ministre syrien. Dans son mot d’ouverture, le chef de l’Etat M. Elias...