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Actualités - OPINION

Pan Pan Volée de bois vert


Des fois, comme ce midi, il y a une nappe de brume qui bat le flanc fatigué de la vieille montagne puis reflue vers le bord bleu sobre de la mer pour former là une ligne de gaze anesthésique. Des fois, dans la torpeur automnale de l’après-pluie, en sirotant un café on regarde le ciel marbré de nuages et on se rend compte que ce n’est plus si souvent que d’en bas, je veux dire de Beyrouth, on le voit aussi pur. Et un court moment on a la triste illusion que l’air s’en assainit, qu’on est soi-même un peu meilleur, moins prosaïque.
Ensuite le temps se couvre un peu et quand on n’est pas Don Quichotte ou Cyrano on ne garde pas trop longtemps le nez en l’air, par peur du torticolis, du lumbago ou du vertigo. Le regard rêveur, contes de la lune vague après la pluie, retombe sur le plancher des vaches, nos chères mascottes républicaines, qui rient de se voir si belles dans le miroir de nos mirettes éblouies.

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Et là, vite excédés par les parkings carrossés bétonnés, par les immeubles hideux hérissés de fourches ou d’antennes paraboliques si inutiles quand on est soi-même un satellite, les yeux se fixent sur la verdure.
Mais c’est qu’il en reste des arbres! En bosquets cernés par le macadam, en îlots dans les arrière-cours séparant de vieilles bâtisses, en rangs d’oignon le long des rues ou en solitaires à côté des bijouteries. Rien à redire: le Beyrouthin n’a pas plus oublié l’arbre que les «alkabs» rigolos maintenant honnis, autre héritage d’une ère ottomane qui n’eut pas que des meurtrissures.
Mais, bizarre négligence, ces dizaines, ces centaines d’espèces arboricoles personne n’en sait les noms, ni en arabe ni en turc et encore moins en gaulois langue de nos ancêtres. On peut dès lors sans problème créer pour les toxicos de la chlorophylle l’association des arbres anonymes, ça ferait branché et clandestin, immense hommage malrussien au tronc commun, ce résistant du destin.
Autre avanie, à part les clebs et les nuages à l’amitié arroseuse, à part le vent qui leur dépoussière un peu le feuillage, ces sédentaires très terre-à-terre ne reçoivent que peu de soins, sauf dans les jardins publics et dans quelques programmes urbano-cosmétiques comme celui lancé par «Help Lebanon». Et pourtant qu’est-ce que ça coûte un jet de lance à eau, un étêtage, un sarclage de temps à autre... Mais où c’est qu’ils sont les écolos, ces bons apôtres...

J.I.
Des fois, comme ce midi, il y a une nappe de brume qui bat le flanc fatigué de la vieille montagne puis reflue vers le bord bleu sobre de la mer pour former là une ligne de gaze anesthésique. Des fois, dans la torpeur automnale de l’après-pluie, en sirotant un café on regarde le ciel marbré de nuages et on se rend compte que ce n’est plus si souvent que d’en bas, je veux...