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Actualités - CHRONOLOGIE

SOS enfants sans frontières : parrainage et .. vélo du coeur (photo)


Le premier tome, publié l’année passée, faisait l’inventaire des «Edifices et Equipements Publics» sur le territoire libanais. Le deuxième tome d’«Images du Patrimoine», qui vient de paraître par les soins de Richard Chahine, passe en revue, quant à lui, «l’Habitat Fortifié et l’Architecture Religieuse» du Akkar à Baalbeck, en traversant les 22 autres cazas. Le troisième tome, prévu pour l’année prochaine, recensera «Vieilles Demeures et Résidences Privées».
Richard Chahine ne prétend assurément pas faire œuvre exhaustive. Qui le pourrait d’ailleurs, vu le nombre énorme de sites intéressants, dont beaucoup restent encore à découvrir: 151 exactement, d’après la liste dressée dans ce deuxième tome, dont, est-ce croyable? 22 à Saïda, 19 à Tyr, 16 à Tripoli. Partout, des lieux peu connus, peu ou pas étudiés (dans ce domaine, tout reste à faire ou presque) attendant d’être explorés, sauf à Beyrouth et à Baabda.
Cette liste révèle, par exemple, qu’il existe 72 lieux de culte dans le caza de Jbeil, 40 à Batroun, 32 au Koura, 24 au Chauf, 23 à Baalbeck, 23 au Akkar.
C’est à Aley, où il n’y a que deux fortifications, que le nombre de monuments publics est le plus élevé: 16, alors que Batroun et Koura n’en comptent que deux chacun tout en se targuant de 12 et 13 fortifications respectivement. Jbeil possède 18 fortifications mais trois monuments publics seulement et un seul site à découvrir. Et ainsi de suite.
Les lieux évoqués sont repérés par les coordonnées de la carte routière éditée par le ministère de Tourisme en 1996. Autrement dit, il suffit de se munir de cette carte et des deux tomes de Chahine pour aller, si l’on veut, à la découverte de Bourj Rowane à Amchit, de Akroum au Akkar, d’Ihale à Zghorta, de Hosn Shri à Tripoli, de Kal’at al-Hosn à Hardine, Batroun, l’une des 16 «Kal’a» (forteresse) mentionnées. Ou pour effectuer la tournée des tombes réelles ou supposées des 20 prophètes ayant laissé leur nom sur la carte, entre autres Nabi-Ayoub (Job), Nabi-Chit (Seth), Nabi-Nouh (Noé), Nabi-Younes (Jonas), Nabi-Micha (Michée), Nabi-Issa, Nabi-Sbat... dans un périmètre allant de Baalbeck à Jezzine. Ou encore pour visiter les 57 villages, couvents ou sites dont le nom commence par «Deir» (qui signifie enceinte fortifiée ou monastère en arabe), les 18 «Ayn», de Ayn Aar à Ayn Yanta, les 12 «Kfar» (nid d’aigle),h de Kfar Akka à «de Kfar Akka à Kfar Zabad, les 17 «Saydeh», de Saydet el-Bzaz à Saydet Ilije, les 72 «Mar» et «Mart» (Saint et Sainte), de Mar Abda à Mar Zakhia et de Mart Berbara à Mart Refka, les 22«Bourj»ou «Bourjein» (tour de garde). Une manière inédite d’envisager les randonnées dominicales et qui peut réserver beaucoup de surprises et de découvertes inattendues.

L’Atelier Chahine

En tout cas, on a le choix entre 228 fortifications, 499 lieux de culte, 138 monuments publics, sans compter les 151 sites à découvrir. Parfois, un bâtiment peut combiner les caractères de fortification, de temple et de monument public.
De quoi occuper les circuits de fins de semaine pendant des années. C’est d’ailleurs le but de Chahine: faire découvrir le Liban aux Libanais d’abord, qui ne le connaissent guère. Je me souviens encore de l’exclamation exaltée d’une jeune chiite de Nabatiyeh à Harissa: «Ah! je ne savais pas que le Liban était si beau!». La plupart des Libanais ne le savent pas non plus, sauf peut-être en théorie et paroles.
Bien entendu, en nous faisant prendre conscience de la fabuleuse richesse architecturale que le Liban recèle, Chahine ne prétend pas à la moindre exactitude scientifique. Ce n’est pas son objectif, qui est de révéler simplement une partie de ce qui existe sur le terrain et de ce qui repose dans les livres (textes, plans, illustrations, etc.) afin d’inciter d’autres que lui à aller plus loin et plus profond. Et d’abord à s’occuper de protéger et préserver ce patrimoine inestimable (d’une rare densité quand on pense à l’exiguïté du territoire) au lieu de contribuer à le massacrer sans discrimination et sans scrupule: ainsi, une très belle stèle, près de Baalbeck, sert-elle de cible aux tireurs de la région.
La méthode de ce qu’il faut bien appeler «l’Atelier Chahine» (par référence aux «ateliers» photographiques des Jésuites, dont R. Chahine est d’ailleurs un ancien élève, révélés par Michel Fani) est d’inviter les photographes amateurs ou professionnels à fournir leurs clichés des sites qu’ils découvrent. 29 photographes ont ainsi contribué à l’élaboration de cet ouvrage trilingue.
La disparité qui en résulte dans le style et la qualité importe peu, en définitive: l’important, en l’occurrence, est moins la beauté du cliché ou même du livre que sa teneur, sa capacité d’information et d’incitation.
A part le livre, Chahine organise des expositions de photos, au CCF, dans sa galerie, dans les écoles (à leur demande) pour la bonne cause.
On ne peut s’empêcher d’admirer la persistance de cet homme qui a réussi, contre vents et marées, et en pleine guerre, à accumuler une gigantesque documentation informatisée sur le Liban, des centaines et des centaines de pages imprimées et d’illustrations, gravures, lithos, dessins, peintures, photos. Et qui s’emploie à la diffuser par tous les moyens.
Chahine effectue ainsi une tâche qui devrait être celle du ministère de la Culture, du ministère du Tourisme, d’un Institut d’archéologie et d’histoire du Liban, qui reste à créer, des facultés de géographie, etc...
Ce deuxième tome bénéficie de deux courtes introductions, l’une de Jean-Claude Voisin: «Essai sur le phénomène des fortifications dans le paysage libanais», l’autre d’Alexis Moukarzel: «Prise de contact avec les lieux de culte au Liban».
Directeur du CCF, passionné de sites anciens, Voisin signale que «c’est sur la côte phénicienne que les premiers éléments d’une architecture militaire virent le jour... Le principe d’entourer par un rempart des habitations regroupées apparaît à Byblos vers 3000 ou 2800 av. J.C.». Il souligne «le rôle et la place essentiels de la pierre» dans l’architecture militaire ancienne au Liban... «La maîtrise de la pierre, tant au plan de la technique de la taille qu’au plan de l’architecture est de toute évidence très en avance sur l’Occident non méditerranéen qui, jusqu’au Xe siècle, va construire en bois»... De même, il confirme la «réutilisation de la majorité des sites par les occupants successifs, ce qui rend leur interprétation extrêmement fragile». Il note que «l’histoire des fortifications au Liban laisse des pans entiers en totale ignorance... Le secret reste entier sur les origines de sites tels que Qlaèaat , Musseilaha, Samar — Jbeil au Liban — Nord par exemple».
Ce qui veut dire qu’il y a du pain sur la planche pour les archéologues et les historiens.
L’architecte Alexis Moukarzel note le même phénomène de réutilisation à propos des lieux de culte: «On peut les transformer mais difficilement les déplacer. C’est comme si la sacralisation de l’espace précédait la signification que l’on donnait à cette sacralité. Que le célébré ou l’adoré soit Adonis, qu’il soit Mercure ou qu’il soit le Christ, l’émotion des fidèles était mue par le cérémonial du culte, certes, mais elle l’était aussi par le mystère du lieu. Mais, à chaque révélation, les lieux saints devenaient des lieux maudits, et seule la notion de transformation permettait de les exorciser». «L’alternance du pouvoir est une leçon de l’Histoire», ajoute-t-il.
Peut-on mieux conclure?

Joseph TARRAB


Le premier tome, publié l’année passée, faisait l’inventaire des «Edifices et Equipements Publics» sur le territoire libanais. Le deuxième tome d’«Images du Patrimoine», qui vient de paraître par les soins de Richard Chahine, passe en revue, quant à lui, «l’Habitat Fortifié et l’Architecture Religieuse» du Akkar à Baalbeck, en traversant les 22 autres cazas. Le...