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Actualités - ANALYSE

La crise reste sous contrôle, affirment les loyalistes


Le conflit entre gens du pouvoir comme entre le gouvernement et la Chambre sur le dossier socio-économique peut-il déboucher sur des débordements de rue? «Jamais de la vie, rétorque un ministre haririen pour qui les remous restent circonscrits dans l’enceinte des institutions, les syndicats étant trop faibles, trop divisés pour bouger...» On voit donc aujourd’hui l’utilité du «raid» lancé en avril dernier par les officiels contre la CGTL qu’ils ont pratiquement fait voler en éclats, en exploitant ses élections internes.

Mais Toufayli? «Il est trop loin de Beyrouth où les choses vraiment sérieuses peuvent seulement se passer. Et de plus le cheikh rouge ne peut pas s’en prendre à nous, car ce n’est pas notre faute si le plan de soutien que nous avions élaboré pour les régions déshéritées est tombé à l’eau», répond le même ministre.
Assez bizarrement, c’est plutôt l’opposition — démocratique et parlementaire s’entend — qui s’inquiète le plus. Selon un de ses piliers «on ne sait vraiment pas ce qu’au bout du compte les déclarations incendiaires, délibérément provocatrices et confessionnelles de certains leaders qui en principe soutiennent le pouvoir peuvent provoquer. Quand on affirme, par exemple, que le climat ressemble à celui qui prévalait en 75, on fait la promotion de la discorde sinon de la haine et on pave la voie à une confrontation aveugle. Certes la sécurité est a priori bien tenue en main, mais de provocation en provocation, d’incident en incident on peut porter atteinte assez sérieusement à la stabilité interne. Même s’il est évident qu’il n’y a pas de risque de nouvelle guerre domestique, cette déstabilisation relative serait suffisante pour décupler les difficultés socio-économiques du pays, déjà sérieuses. Il faut que l’Etat taëfiste rappelle ses enfants à l’ordre. Et il faut également, il a trop tardé à le faire, qu’il neutralise les éléments qui animent des mouvements subversifs et appellent à l’insubordination civile. Sans quoi des foyers d’incendie peuvent éclater ici ou là».
«Si le pouvoir, poursuit ce député, est incapable d’appliquer la loi et de veiller au maintien de l’ordre il ne peut tout simplement pas traiter le dossier économique, budgétaire et financier. Car il est évident que même si on peut s’arranger pour mettre en place des solutions moins iniques que les surtaxations indirectes, il faut prendre des mesures qui au niveau national impliquent des sacrifices et qui ne seraient pas populaires. De toute façon, sans autorité rien n’est possible et il est temps que les dirigeants comprennent où est leur tout premier devoir: faire respecter par tous l’ordre républicain et réduire au silence les provocateurs».
«A notre avis, poursuit cette personnalité, le gouvernement actuel s’est sabordé lui-même pour de bon à travers ses contradictions et ses divisions qui ont tout l’air d’être irrémissibles. Il s’est privé de toute faculté de décision et politiquement il n’existe plus. Autant qu’il cède la place à une équipe homogène qui puisse gouverner vraiment, même si ses options devaient être encore plus haririennes si l’on peut dire, encore plus contraires aux intérêts des classes défavorisées. Il y aurait au moins un programme et nous saurions ce qu’ils nous faut combattre, quoi proposer à la place. De plus, s’il devait y avoir une crise ministérielle, il resterait une chance de mettre sur pied un nouveau gouvernement qui ne choisirait pas les mêmes options que l’équipe de M. Hariri et que nous pourrions soutenir, voire auquel nous pourrions participer dans un cadre d’union nationale et de Cabinet de salut public»

Test

Mais ce sont là, bien évidemment, des vœux utopiques. D’une part pour le fond, si l’on peut dire, parce que les décideurs ont fait savoir qu’un changement ou même un remaniement ministériel ne serait pas opportun au Liban, dans la délicate conjoncture que traverse le Liban. Et d’autre part parce que le gouvernement ne peut pas partir tant que son projet de Budget 98 n’a pas été débattu puis voté à la Chambre, ce qui ne devrait pas intervenir de sitôt.
Il reste que Toufayli, dont les loyalistes veulent minimiser l’action, s’apprête à la relancer le 26 du mois courant et il a commencé à s’organiser assez sérieusement en formant une «assemblée» de 500 éléments représentant différentes composantes de la société. Beaucoup de politiciens attendent donc de voir comment le gouvernement va passer le test du 26. En notant au passage qu’il n’y a toujours pas de poursuites judiciaires contre le rebelle.
Ce qui a sans doute encouragé Najah Wakim à faire à Tyr une déclaration tout à fait détonante dans laquelle il accuse les Américains de vouloir mettre de nouveau le Liban à feu et à sang. Il a ajouté que des armes sont distribuées dans plus d’une région, pour exploiter des discordes confessionnelles en misant sur des thèmes comme Jezzine et le bombardement de Saïda. Et de conclure en jugeant comme provocants les propos tenus par Albright lors de son passage à Beyrouth et en soutenant que l’Etat a proclamé l’état d’urgence dans des régions comme la banlieue-sud et Baalbeck-Hermel. Aucune réaction, judiciaire ou verbale, des autorités à ces déclarations du député de Beyrouth dont l’un des collègues s’exclame: «Si ce qu’il dit est vrai, qu’a fait le pouvoir pour couper court à la discorde qu’il dénonce; et si cela n’est pas vrai, qu’attend le pouvoir pour le poursuivre en justice...»
Un avis qu’un autre parlementaire ne partage pas tout à fait: «Après ce que M. Walid Joumblatt a lancé comme brûlots il serait futile de s’arrêter aux propos de M. Najah Wakim et de leur donner de l’importance. Le pouvoir plutôt que de polémiquer avec les uns ou avec les autres, devrait agir. Et s’il ne veut pas s’en prendre, pour des raisons territoriales connues, à Toufayli, il devait au moins se faire respecter à Beyrouth et dans sa banlieue, en nettoyant les portraits et les posters politiques qui, malgré son interdiction, se remettent à éclore ici ou là...»
Mais si l’on ne peut pas le plus pourquoi ferait-on le moins...
Ph.A.-A.

Le conflit entre gens du pouvoir comme entre le gouvernement et la Chambre sur le dossier socio-économique peut-il déboucher sur des débordements de rue? «Jamais de la vie, rétorque un ministre haririen pour qui les remous restent circonscrits dans l’enceinte des institutions, les syndicats étant trop faibles, trop divisés pour bouger...» On voit donc aujourd’hui...