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Actualités - ANALYSE

Quand le politique conditionne l'économie

Une saison estivale, relativement bonne, suivie de la récente flambée du Sud, a pris le dessus, l’espace de quelques semaines, sur le grand débat économique et social qui s’était ouvert (mieux vaut tard que jamais) et s’était imposé comme une priorité du gouvernement, au vu des chiffres inquiétants et d’un début de crise économique et sociale qui menaçaient la stabilité politique du pays.
A l’évidence, la poule aux œufs d’or commençait à produire du plomb et la situation a, d’elle-même, imposé la nécessité d’envisager des réformes de fond économiques, pour redresser la barre, y compris une lutte sérieuse contre la corruption et le gâchis. C’était une des principales raisons de la demande de remaniement ministériel, afin que les nouveaux membres du gouvernement soient investis d’une mission prioritaire; contrôler les budgets, améliorer la productivité et la perception des impôts, et attaquer la réforme administrative.
L’Etat est à la croisée des chemins et les sources de financement deviennent trop précieuses pour être gaspillées, au vu des indicateurs économiques et des taux d’endettement. Le recyclage des dettes en devises et la baisse des taux pourront certes ralentir la boule de neige de la dette. Mais la baguette magique monétaire deviendra bientôt inopérante si elle n’est pas accompagnée de réformes de fond qui touchent à la volonté politique.
En quelques années, l’Etat libanais, dont l’influence sur l’actualité économique était traditionnellement faible, comparée au secteur privé, s’est établi comme le principal acteur économique, en regard des chiffres des bons du Trésor et des grands projets gouvernementaux, qui nécessitent des financements importants. De l’issue du débat monétaire, économique et social, dépendra la réussite politique du gouvernement. A l’instar des autres nations, après une période où les impératifs politiques, institutionnels et sécuritaires étaient prioritaires à l’issue d’une déchirante guerre, la croissance naturelle, grâce à la restauration de la sécurité et de la confiance, a ramené le volume de l’économie du pays aux niveaux d’avant-guerre.
Les temps ont changé et toute politique économique devra prendre en compte les nouvelles données régionales et mondiales, afin que les mesures prises, y compris d’éventuelles nouvelles taxes ou mesures protectionnistes, s’inscrivent dans le fil d’une politique de long terme.
La prise de conscience a eu lieu, les statistiques et analyses commencent à devenir visibles, les données prennent forme, le chemin apparaît difficile et nécessite une volonté nationale pour assurer la couverture politique des mesures de fond.
Le peuple libanais, dont la maturité politique existe, même si elle est ignorée, n’acceptera de nouvelles taxes que s’il reprend confiance dans son pouvoir politique, sinon il considérera qu’il finance la corruption et se cabrera, menaçant la stabilité du pays et votera plutôt pour une taxe sur la corruption ou sur les déchets, avant d’accepter toute autre mesure qui risque d’être prise comme une répression et une atteinte à ses droits fondamentaux jugés, à tort ou raison, comme bafoués et kidnappés.
Le défi est là. L’Etat et le secteur privé, principalement les institutions financières, qui ont réalisé des profits financiers non négligeables durant les dernières années, doivent s’entendre sur une nouvelle politique économique, complétée d’un véritable contrat social sur une période visible. Ceci permettra au pays d’aborder du bon pied les années nous séparant de l’an 2000 et lui évitera d’être secoué par une vague de mécontentement. Sinon, le pouvoir politique, dont une partie se méfie des chiffres, risque d’être effrayé et d’être tenté de se renvoyer la balle de la crise, courant le risque de s’enliser dans des conflits communautaires et régionaux, plutôt que de prendre le problème à bras-le-corps et de participer à la réussite d’une nouvelle politique économique et sociale fondée sur la décentralisation administrative. Les effets de cette politique seront ressentis à tous les niveaux de la population, communautés et régions confondues. Ceci conditionnerait notre capacité d’affronter les défis régionaux, dont les enjeux seront autant économiques que politiques.
Tout accord national pour un nouveau contrat économique et social incluant le développement des régions pourrait mener à un sursaut national et désamorcer des bombes politiques qui restent amorcées au Liban, dont la plus dangereuse reste le dossier des déplacés, les autres problèmes étant en suspens en attendant la résolution du conflit régional.
Les Libanais, pouvoir et citoyens ensemble, découvrent sur le tas, après 20 ans de guerre, combien est grande l’interconnexion entre l’économie et la politique dans l’économie moderne, et combien devient fragile, à l’aube du troisième millénaire et avec la nouvelle donnée mondiale, la réussite de l’initiative privée, si elle n’est pas accompagnée d’une politique économique, nationale, cohérente, d’une diplomatie active et d’une politique sociale associant la population à la croissance.
Si leur sens politique a souvent fait défaut, nul ne peut mettre en doute la réussite commerciale individuelle des Libanais qui dépendra, à l’avenir, de leur capacité d’union pour prendre leur place dans la région.
Une issue positive au grand débat économique et social est à la portée des Libanais, plus que de tout autre peuple de la région. De cette réussite dépendra notre situation de demain, individuelle ou collective, tant au plan intérieur qu’extérieur.
Une saison estivale, relativement bonne, suivie de la récente flambée du Sud, a pris le dessus, l’espace de quelques semaines, sur le grand débat économique et social qui s’était ouvert (mieux vaut tard que jamais) et s’était imposé comme une priorité du gouvernement, au vu des chiffres inquiétants et d’un début de crise économique et sociale qui menaçaient la...