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Actualités - DISCOURS

F. Boutros : le départ d'un interlocuteur privilégié

Dans une allocution aux termes savamment dosés, M. Fouad Boutros a rendu hommage au nonce apostolique, soulignant que l’Exhortation apostolique et la visite du pape au Liban sont «un peu le fruit» de sa mission. Voici le texte intégral de l’intervention de l’ancien chef de la diplomatie libanaise:
«Excellence,
«Au-delà, des multiples liens qui, comme vous l’avez élégamment signalé, se sont tissés — grâce à vous d’ailleurs — entre chacun des distingués bénéficiaires de décorations pontificales de différents ordres et grades et le Vatican, permettez-moi en leur nom et au mien, de voir dans l’attention paternelle de S.S. Jean-Paul II qui nous honore, d’abord et surtout un gage de sa profonde sollicitude envers notre pays, ainsi qu’une expression concrète de l’esprit œcuménique.
«Intervenant dans le sillage de sa visite historique au Liban et à la veille de votre départ définitif de ce pays, la cérémonie de ce soir, est doublement chargée de sens et d’émotion.
«En réponse aux propos élogieux que vous avez tenus à notre adresse, il me suffira de dire que, chacun de nous, dans sa sphère, et dans la limite de ses moyens n’a d’autre mérite que d’avoir contribué à renforcer les relations libano-vaticanes et à assister le Vatican dans son activité bénéfique sur le terrain.
«Nous vous prions d’être notre interprète auprès de Sa Sainteté pour lui exprimer notre respectueuse gratitude, en même temps que nous vous adressons nos remerciements sincères pour la part que vous avez prise à une initiative qui traduit une fois de plus la dynamique de votre amitié pour le Liban.
«Monseigneur,
«Les relations entre le Liban et le Saint-Siège ne datent pas d’hier. Si les rapports avec les Eglises d’Orient qui se rattachent à Rome remontent à plusieurs siècles, l’accession du Liban à l’indépendance et l’établissement de relations diplomatiques entre les deux Etats qui en est résulté ont donné à ces relations un caractère permanent et un cadre officiel.
«La politique d’union entre les Eglises chrétiennes et le dialogue avec l’islam, décidés par le Concile de Vatican II, ont eu pour effet de doter la nonciature au Liban d’une aura dont l’éclat a été rehaussé surtout aux yeux des chrétiens, par la rencontre historique entre Leurs Saintetés Paul VI et Athénagoras.
«Le nonce est ainsi devenu, — surtout lorsque pèse une menace sur l’équilibre politico-confessionnel — un interlocuteur privilégié, non seulement des autorités politiques, mais aussi des diverses personnalités et autorités religieuses.
«A votre arrivée en 1989, vous avez eu affaire à un pays déboussolé, déchiré par treize années de guerre et tiraillé entre les courants et les tendances les plus contradictoires.
«D’emblée, vous avez été perçu comme un recours pour les uns, comme un point de mire pour les autres.
«Il en est résulté inévitablement quelques heurts et critiques, voire une certaine méfiance à votre égard qui n’osait pas dire son nom, tellement la situation était confuse et incohérente.
«Il en fallait davantage pour vous désorienter et vous avez su faire face à vos obligations avec lucidité et courage, dispensant l’indulgence et le pardon au besoin, mais vous refusant à toute complaisance.
«Excellence,
«Vous avez bien voulu dans votre discours, faire allusion à l’assistance que j’ai pu, à travers des conseils, concertations, ou analyses, vous apporter dans l’accomplissement de votre mission.
«Il se trouve que, face à la crise, nous avons partagé nombre de soucis, de préoccupations et d’objectifs, ainsi qu’une certaine méthode de raisonnement.
«Nos parcours respectifs n’ayant rien de commun, il était naturel que notre approche des problèmes tactiques et notre vision de l’action immédiate ne fussent pas toujours identiques; de même que notre opinion quant aux acteurs de la tragédie. Cela n’a pourtant affecté en rien l’harmonie de nos relations et leur qualité, car nous nous sommes retrouvés naturellement sur la même longueur d’onde, dès lors qu’il s’agissait de perspectives stratégiques et de vision à long terme.
«Une longue pratique des responsabilités gouvernementales m’avait appris à situer nos difficultés intérieures dans leur contexte régional et international, autant sinon davantage que dans leur contexte local.
«C’est ainsi que je me suis trouvé de plain-pied avec la tradition politique du Vatican qui, du fait des responsabilités universelles de l’Eglise romaine, pratique une méthode d’analyse similaire.
«Aussi, m’est-il un devoir en cette occasion, de porter témoignage de l’esprit qui a inspiré votre action tout au long de votre mission et de votre attachement viscéral à notre pays et à son peuple.
«Consulté, sollicité, assailli de tous côtés, vous avez réussi à garder la tête froide et à ne pas vous laisser impliquer, tout en prodiguant conseils et assistance dans le cadre d’une saine perception de votre rôle et des éléments de la crise.
«En dépit des pressions des hommes et des événements, vous avez essayé de décourager les projets utopiques ainsi que les visions issues d’un volontarisme aveugle, imperméable à la réalité et à la logique.
«Dédaigneux de la popularité facile, vous n’avez pas hésité à agir, si nécessaire, à contre-courant, par conviction autant que par réalisme.
«Opérant dans un contexte aussi anarchique que tragique, dans le cadre des directives du Vatican, vous n’avez cessé de militer sans relâche pour la convivalité islamo-chrétienne, seul gage à vos yeux, de l’avenir des chrétiens et du Liban dans son intégralité.
«En dehors de toute idéologie, vous n’avez eu de cesse de rappeler la nécessité de respecter les principes moraux, surtout lorsque la liberté est en cause.
«D’instinct, vous avez toujours su distinguer parmi vos interlocuteurs, ceux qui étaient sincèrement à la recherche d’une règle de conduite et ceux qui ne tentaient, à travers leur démarche, qu’à se ménager un alibi, dans le but d’en tirer un avantage personnel.
«En bref, s’il vous a été impossible de rectifier toutes les déviances, innombrables d’ailleurs et à plus d’un niveau, vous avez fortement contribué tout en accréditant des idées saines, à alimenter la flamme de l’espoir et la foi en la providence.
«Au moment où vous nous quittez, si tout ne va pas comme nous l’aurions tous souhaité, un pas sérieux a néanmoins été franchi: la pacification est acquise et la reconstruction est en cours.
«Quant aux difficultés nombreuses à caractère politique et économique qui nous assaillent aujourd’hui, il n’est pas de bon aloi que je les aborde ici.
«Je me contenterai de remarquer qu’elles n’ont pas échappé à l’attention du Saint-Père qui en a longuement traité dans l’Exhortation apostolique post-synodale, laquelle constitue un document, voire une charte de première importance.
«Face aux arrières-pensées qui sous-tendent maints commentaires auxquels l’Exhortation a donné lieu, il sied de rappeler aux gouvernants et gouvernés qu’elle constitue un texte exhaustif, c’est-à-dire un ensemble équilibré et harmonieux dont les dispositions ne sauraient être revendiquées sur un point à l’exclusion de l’autre, sous peine d’en trahir et le texte et l’esprit.
«Je ne doute pas que, de Londres où vous serez, vous suivrez avec intérêt l’évolution de la situation au Liban et notamment les suites qui seront données à l’Exhortation dont on peut dire, sans vous flatter, qu’elle est, au même titre que la visite du Saint-Père, un peu le fruit de votre mission au Liban et son couronnement».
Dans une allocution aux termes savamment dosés, M. Fouad Boutros a rendu hommage au nonce apostolique, soulignant que l’Exhortation apostolique et la visite du pape au Liban sont «un peu le fruit» de sa mission. Voici le texte intégral de l’intervention de l’ancien chef de la diplomatie libanaise:«Excellence,«Au-delà, des multiples liens qui, comme vous l’avez...