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Actualités - ANALYSE

Le pouvoir exécutif encore et toujours sur la sellette...

«Mais où est Taëf? Le Conseil des ministres, organe suprême du pouvoir exécutif aux termes de la Constitution, ne se réunit-il que pour entériner les décisions prises hors de son enceinte — comme pour l’audiovisuel — ou pour plancher sur un ordre de jour routinier? N’a-t-il pas, en tant que maître d’œuvre de toute politique nationale, l’impérative obligation de siéger pour étudier la dangereuse situation qui prévaut au Sud comme dans la région, ainsi que le lourd dossier interne de la crise socio-politico-économique?

Cette sollicitude inquiète émane bien évidemment de l’opposition taëfiste, ministres et députés confondus. Ils soulignent en chœur que «le danger se fait de toute évidence très pressant au Sud. Que cela soit par ricochet, à cause des attentats de Jérusalem ou directement, par suite de l’escalade des opérations de résistance comme du problème de Jezzine et de Kfarfalous. Il est donc nécessaire que le pouvoir envisage des mesures préventives, pour parer à toute éventualité en cas d’agression israélienne étendue. Il faut tenter de désamorcer la bombe, autant que faire se peut, mais également s’efforcer d’éviter en cas d’attaque un raz-de-marée comme en juillet 93 ou un exode massif comme en avril 96. Il faut que la population soit soutenue, dans la mesure du possible, pour résister, pour s’accrocher sans fuir. Ce n’est certes pas en un jour ou deux qu’on pourrait lui construire des abris; mais si on prévoit des circuits de ravitaillement, des antennes socio-médicales mobiles, si on s’organise avec les instances internationales ou les associations locales «pour le cas où» on servirait doublement le pays. D’une part en épargnant beaucoup de souffrances supplémentaires aux sudistes; et d’autre part en évitant les lourdes retombées économiques et financières d’un éventuel déplacement de populations. Etant donné la crise économique actuelle, le pays pourrait beaucoup moins bien amortir le coup qu’en 93...».
«Par ailleurs, poursuivent ces sources, et indépendamment du dispositif à préparer, il est ahurissant de constater que le cours du processus a totalement changé dans la région avec l’arrivée au pouvoir de Netanyahu le boute-feu, sans qu’aucune fois le Conseil des ministres ne se penche sur le dossier, pourtant vital, et ne prenne la peine de lui consacrer un séminaire ou à tout le moins une séance entière. On laisse les Syriens guider la barque; c’est très bien, mais il y a quand même beaucoup d’aspects concernant notre propre carré qu’ils ne traitent pas, comme Jezzine par exemple. Serait-ce démériter aux yeux de Damas que de se réunir, après le dernier sommet Assad-Moubarak, pour faire le point sur le danger d’une guerre généralisée contre laquelle le chef de l’Etat égyptien, ordinairement optimiste, met lui-même en garde tandis que son homologue syrien souligne la persistance du blocage au niveau du processus régional? Peut-on rester indifférent à ce qui est en train de se passer tous les jours au Sud, le Conseil des ministres estime-t-il être dégagé de toute responsabilité à l’égard de cette région par les sempiternelles déclarations de nos dirigeants sur la nécessité d’appliquer la 425? Peut-on ignorer les menaces israéliennes répétées, le refus de l’occupant de permettre la réouverture de la voie de jonction de Kfarfalous?

Récupération
tardive

«Et pour ce qui est de l’intérieur, enchaînent ces loyalistes-opposants, le pouvoir exécutif s’estime-t-il quitte de tout, après le «dégonflage» de la «révolte des affamés»? Pense-t-il que l’élimination d’Abou Rizk, le fiasco de Toufayli au Akkar ou les propos pas très clairs entendus à Mayrouba signifient qu’on en a fini avec la misère des gens, avec le chômage, avec la crise socio-économique sous tous ses aspects? Le gouvernement croit-il avoir tout réglé par la petite réunion de Mohafez à l’issue de laquelle le ministre de l’Intérieur a proclamé qu’on ne permettrait plus de meetings ou de manifs, ajoutant que «l’Etat est plus fort que tous?». Une preuve en son temps, le 4 juillet à Baalbeck, aurait été la bienvenue...».
Et de noter ensuite qu’«au lieu de travailler vraiment, les dirigeants cherchent, chacun de son côté, à s’attribuer le mérite de la récente levée des restrictions U.S.. Mais même à ce sujet, et bien qu’il eût été scandaleux qu’il se réunît à cette seule occasion et pas pour traiter les graves problèmes de l’heure, c’était au Conseil des ministres qu’il revenait de publier un communiqué de commentaire. D’autant qu’on a applaudi d’une façon un peu trop déplacée: après tout, dans ses déclarations, Madeleine Albright a été rien moins qu’aimable à l’égard du Liban. Elle a en effet mis en garde sévèrement les ressortissants U.S. contre le voyage dans un pays «qui reste hautement dangereux». Puis elle a émis le ferme vœu «de voir renaître un jour un Liban vraiment indépendant». Le Conseil des ministres aurait dû réagir: c’est lui seul le pouvoir, il l’oublie lui-même trop souvent, occupé par ses querelles intestines...».
«Ainsi, poursuivent ces sources, quand le ministre du Pétrole Chahé Barsoumian s’est trouvé en butte à une campagne médiatique, il s’est adressé tout naturellement à l’autorité de couverture, le Conseil des ministres. Mais quelle ne fut sa surprise d’entendre le président du Conseil le renvoyer à ses moutons, si l’on peut dire, en lui lançant crûment: «Vous devez de vos propres doigts vous ôter l’épine du pied»... C’est là un bel exemple de cohésion politique et de solidarité ministérielle. Surtout de la part d’un dirigeant comme M. Hariri qui ne cesse de se plaindre du manque d’esprit d’équipe de ses ministres... De la manière dont il se comporte avec eux, il n’est pas étonnant qu’ils passent à l’opposition l’un après l’autre».
«D’autant qu’en plus, ajoutent ces politiciens, il ne cesse de marcher sur leurs brisées, d’empiéter sur leurs prérogatives. Pour l’affaire des athlètes irakiens, il avait donné à notre ambassade à Amman l’ordre de leur refuser un visa, en passant par-dessus la tête de M. Farès Boueiz. Tout récemment, il a récidivé: les Américains ayant prié les Libanais de leur envoyer un émissaire pour finaliser la levée de l’embargo, il a dépêché à Washington son conseiller juridique M. Ghassan Taher qui suit le dossier de l’AIB, sans consulter ou aviser le Palais Bustros...».
Mais c’est sans doute plus commode: on raccourcit ainsi toutes les distances, on se passe des ministres. Et même du Conseil des ministres...
Ph.A.-A.
«Mais où est Taëf? Le Conseil des ministres, organe suprême du pouvoir exécutif aux termes de la Constitution, ne se réunit-il que pour entériner les décisions prises hors de son enceinte — comme pour l’audiovisuel — ou pour plancher sur un ordre de jour routinier? N’a-t-il pas, en tant que maître d’œuvre de toute politique nationale, l’impérative obligation de...