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Actualités - ANALYSE

L'état encourage la population à tenir bon

A la demande du ministre des Affaires étrangères Farès Boueiz, la délégation libanaise au comité de surveillance du cessez-le-feu a soulevé la question des mines antipersonnel plantées au Sud en soulignant que le comité doit se décider une fois pour toutes, soit «régulariser» en quelque sorte une telle pratique, soit l’interdire à tous, en cessant de condamner les uns et de fermer les yeux sur ce que font les autres... Une façon de laisser entendre que non seulement les Israéliens ne sont pas en reste pour poser des bombes mais qu’en outre ils bénéficient à l’occasion de l’indulgence du comité.
Pour ce qui est de Jezzine, M. Boueiz met l’accent sur la nécessité pour les habitants de tenir bon, de s’accrocher à leurs foyers et à leur terre. Il répète qu’à son avis il existe deux solutions pour le Sud, l’une sécuritaire qui consiste à faire appliquer la 425; et l’autre politique, par le redémarrage du processus de paix dans la région...
Toujours est-il que la situation explosive qui règne à Jezzine après la vague d’attentats aux mines antipersonnel perpétrée par la résistance sous prétexte de tuer des «collabos» préoccupe au plus haut point les autorités de Beyrouth. Durant tout le week-end des contacts fébriles ont été déployés tous azimuts pour calmer le jeu.
De son côté le patriarche Sfeir s’est inquiété de cette dégradation, se demandant quels intérêts au juste on sert en s’en prenant à Jezzine et soulignant qu’un exode massif des habitants de cette région signifierait que tout le Liban se retrouve en danger. Le prélat a répété que la population doit pouvoir rester et que les déplacés des autres régions doivent pouvoir retourner dans leurs foyers, si l’on veut que cesse le calvaire du pays.
Pour sa part un diplomate, qui a sans doute un goût trop prononcé pour la logique, relève que «l’escalade actuelle paraît tout à fait absurde. Comme le processus est bloqué, il n’y a aucune raison de se livrer à des surenchères négociatoires sur le terrain». C’est oublier toutefois qu’il y a des règlements de comptes qui n’ont rien à voir avec la haute politique. C’est oublier également que dans un climat diplomatique général aussi tendu, aussi conflictuel, divers «messages» sont délivrés par les uns ou par les autres pour constituer un langage aussi sanglant que codé de menaces ou de pressions déterminées. De plus, s’il est vrai que le système Baker est au point mort, il est encore plus vrai que le gouvernement de Netanyahu lui substitue un autre plan, qui se passe naturellement de l’assentiment des autres parties concernées. Autrement dit le processus de Madrid est en panne mais les actions hors de ce cadre ne sont pas stoppées, loin de là. Sans compter que selon des diplomates occidentaux, les incidences au Sud ne sont pas sans rapport avec la situation intérieure en Israël et avec les difficultés du Likoud face à ses contradictions propres et à son impopularité croissante, les sondages donnant Barak vainqueur facile de Netanyahu en cas d’élections anticipées. Selon ces diplomates, le Likoud cherche à ouvrir un front de diversion, et le meilleur qui soit pour lui c’est encore celui de la sécurité d’Israël, thème qui lui a permis de l’emporter en 96 sur les travaillistes.
Cet argument peut cependant se discuter car à tout prendre Jezzine, où agresseurs et victimes sont libanais, n’est pas un problème israélien. Il est même tellement local qu’à part les attentats, les habitants se plaignent de l’exclusion qui les frappe. Ils affirment que les institutions et les services de l’Etat ne leur prêtent aucun concours, qu’ils n’ont pas droit par exemple aux aides que reçoivent les cultivateurs des autres régions et qu’en outre on leur fait subir de multiples vexations aux barrages — qui ne devraient pas exister selon eux — ainsi qu’à l’intérieur quand ils s’y rendent.
Certes les officiels ont bien raison de rejeter l’offre piégée «Jezzine d’abord» avancée par les Israéliens. Mais ils devraient sans doute accepter le «Jezzine enfin» que réclame une population injustement punie de rester libanaise...
Ph. A.-A.
A la demande du ministre des Affaires étrangères Farès Boueiz, la délégation libanaise au comité de surveillance du cessez-le-feu a soulevé la question des mines antipersonnel plantées au Sud en soulignant que le comité doit se décider une fois pour toutes, soit «régulariser» en quelque sorte une telle pratique, soit l’interdire à tous, en cessant de condamner les uns...