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Actualités - CHRONOLOGIE

Après l'adoption du projet enjoignant à Israël de payer des dédommagements Cana : le Liban déterminé à ne pas reculer à l'ONU Washington met en garde contre les répercussions de l'affaire sur le renouvellement du mandat de la FINUL

Le gouvernement se montrait hier à la fois ferme et prudent au lendemain de l’adoption du projet de résolution de l’Assemblée générale de l’ONU enjoignant à Israël de payer des dédommagements d’un montant de 1,7 million de dollars pour les dégâts matériels provoqués par le bombardement de Cana, le 18 avril 1996.
Ce projet, examiné en commission, a été adopté samedi par 107 pays. Deux ont voté contre, les Etats-Unis et Israël, et trois se sont abstenus, parmi lesquels la Russie.
Deux jours avant ce vote, l’ambassadeur des Etats-Unis à Beyrouth Richard Jones rencontrait le premier ministre Rafic Hariri à 7h30 du matin, heure peu diplomatique, pour lui demander de geler ce projet, qui doit encore être entériné par l’Assemblée générale vendredi prochain.
D’ici là, le Liban ne reculera pas, quelles que soient les pressions qu’il aura à subir, a assuré hier le ministre des Affaires étrangères Farès Boueiz. Voilà donc pour la fermeté. Mais le chef de la diplomatie, visiblement soucieux d’éviter l’épreuve de force avec Washington, s’est dans le même temps employé à présenter une version tempérée des faits, niant que les Etats-Unis aient jusqu’ici lancé de quelconques menaces à l’encontre du Liban s’il n’abandonnait pas le projet.
Samedi, un responsable libanais qui avait requis l’anonymat avait déclaré à l’AFP que, lors de la réunion matinale entre MM. Hariri et Jones, jeudi dernier, «les Etats-Unis ont demandé au Liban de geler le projet et lui ont fait savoir qu’une réponse négative aurait des répercussions sur le renouvellement du mandat de la Force intérimaire de l’ONU au Liban (FINUL)», qui intervient tous les six mois.
«Les pressions américaines ont mécontenté les responsables libanais, qui ont jugé le développement dramatique. Mais le chef de la diplomatie Farès Boueiz a donné des instructions à la délégation libanaise à l’ONU pour poursuivre ses contacts afin de faire adopter la résolution», a-t-il précisé.
De source proche du ministère des Affaires étrangères, on indiquait hier soir que M. Boueiz allait convoquer M. Jones cette semaine au palais Bustros pour connaître la position officielle et définitive de son gouvernement à cet égard.
On laissait entendre de même source que le vote négatif américain à l’ONU pourrait ainsi n’avoir été qu’une «manœuvre tactique» destinée à faire pression avant que le texte ne soit soumis à l’adoption définitive vendredi prochain.
D’autre part, on soulignait, toujours au palais Bustros, que Washington, en liant le projet de résolution à la question du renouvellement du mandat de la FINUL, n’a évoqué jusqu’ici que d’éventuelles «répercussions», qui ne sont pas nécessairement des «mesures de rétorsion», comme certains médias l’ont suggéré.

Le vote à l’ONU

Le projet de résolution, élaboré par le Liban, impute à Israël l’entière responsabilité du pilonnage du quartier général du contingent fidjien de la FINUL à Cana, qui avait fait 105 morts parmi les civils réfugiés dans le camp, et demande en conséquence à l’Etat hébreu d’assurer seul le paiement de dédommagements, totalisant 1.724.618 dollars.
Une enquête menée par l’ONU avait conclu que le bombardement de Cana était probablement délibéré.
La résolution, une initiative sans précédent, a été adoptée par le groupe des 77 pays en voie de développement et soumise par la Chine et la Tanzanie devant la 5e commission de l’Assemblée générale de l’ONU se prononçant sur le financement de la FINUL. La commission prend généralement ses décisions par consensus.
Le vote doit être entériné par une session plénière de l’Assemblée générale prévue vendredi. L’Assemblée, qui compte 132 membres, confirme normalement les décisions prises en commission.
Le chargé d’affaires israélien, David Peleg, avait déclaré avant le vote que son pays refusait d’être considéré responsable financièrement des dommages provoqués par le bombardement de Cana et avait estimé que la responsabilité de l’incident incombait au Hezbollah. Des délégations européennes s’étaient efforcées de trouver un compromis, mais les représentants du Liban avaient insisté sur un vote sur le projet de résolution initial.
Des pays arabes, soutenus par l’ensemble des pays en voie de développement, avaient argué que les dommages provoqués par le bombardement par Israël du camp de l’ONU devaient être supportés par Israël, et non collectivement par les Etats membres de l’ONU.

Les déclarations de Boueiz

Interrogé hier soir à la télévision, M. Boueiz a relevé que les Etats-Unis «tentent de créer un lien entre les deux affaires (les dédommagements et le renouvellement de la FINUL)».
«Nous estimons pour notre part que la tuerie de Cana et l’attitude claire des Nations Unies à cet égard imposent, au contraire, le renforcement de la FINUL à laquelle il est essentiel de donner les moyens de stopper l’agression contre le Liban», a souligné M. Boueiz.
Il a estimé qu’«une mise en échec» de la proposition libanaise, qui porte sur «des dédommagements après tout symboliques», signifierait que «le problème dépasse le Liban et pose la question de savoir s’ils (les Etats-Unis) veulent des Nations Unies libres et ayant un rôle efficace ou s’il s’agit de liquider l’ONU».
«La position du Liban est claire, franche et définitive, et nous en assumerons toute la responsabilité qui en découle», a poursuivi le chef de la diplomatie, écartant la possibilité d’un recul du Liban sur cette affaire.
«Nous ne pouvons absolument pas nous permettre d’accorder le bénéfice du doute à Israël en retirant cette proposition, quelles que soient les pressions que nous subissons», a-t-il dit.
Il a néanmoins nié avec insistance que les Américains aient transmis des «menaces» au gouvernement libanais. «Jusqu’ici, l’ambassadeur des Etats-Unis ne s’est pas exprimé de la sorte. Mais s’il s’avérait plus tard qu’il en est ainsi, notre réponse serait que nous sommes déterminés à maintenir notre proposition».
Sur le point de savoir si une crise diplomatique allait éclater entre Washington et Beyrouth, M. Boueiz a dit: «Je ne le crois pas», se contentant de noter que si la position officielle des Etats-Unis devait se confirmer, «cela signifierait qu’il y a de profondes divergences entre nous sur les méthodes de travail de l’ONU et son rôle et sur la conception de la justice et du droit dans le monde».

Le comité de surveillance

Sur un autre plan, le comité international de surveillance du cessez-le-feu au Liban-Sud, saisi par Beyrouth, s’est réuni hier au quartier général de la force de l’ONU à Naqoura.
Au cours de cette réunion, la onzième depuis le début de l’année, le comité, formé des Etats-Unis, de la France, du Liban, de la Syrie et d’Israël, devait examiner la plainte déposée par Beyrouth au sujet de l’explosion d’un engin piégé attribué à Israël, qui a tué un civil libanais et en a blessé un autre, la semaine dernière.
Issa Qassem Issa a été tué et Ali Mahmoud Moussa blessé, quand leur véhicule a sauté sur une charge explosive télécommandée, placée sur la route reliant Qilya à Zellaya. Ces deux villages sont à l’extérieur du secteur oriental de la zone occupée par Israël.
Beyrouth a considéré que l’explosion était une «violation» de l’accord d’avril 1996, aux termes duquel les belligérants au Liban-Sud se sont engagés à épargner les civils des deux côtés de la frontière libano-israélienne et à ne pas lancer des opérations depuis les zones habitées.

Primes de risque pour
les officiers israéliens

Par ailleurs, Israël a décidé d’octroyer des primes de risque pour tous les officiers d’active servant dans la zone occupée, rapporte l’AFP citant une source officielle à Jérusalem.
Un porte-parole de l’armée a précisé que cette prime mensuelle de 1.000 shekels (300 dollars) à ces officiers serait versée à partir de ce mois-ci.
Un officier de grade moyen gagne en moyenne quelque 4.000 shekels (1.200 dollars) par mois.
Le gouvernement se montrait hier à la fois ferme et prudent au lendemain de l’adoption du projet de résolution de l’Assemblée générale de l’ONU enjoignant à Israël de payer des dédommagements d’un montant de 1,7 million de dollars pour les dégâts matériels provoqués par le bombardement de Cana, le 18 avril 1996.Ce projet, examiné en commission, a été adopté...