De fil en aiguille, le rôle même de cette instance, qui n’aurait plus qu’à se croiser les bras, ne ferait plus l’objet d’attaques de la part de fractions politiques dérangées par ses verdicts et qui ont entamé une campagne pour réduire ses prérogatives à la portion congrue. En exigeant, par exemple, que le Conseil se contente d’indiquer si une élection a été régulière ou non, sans s’autoriser ensuite à recommander qu’elle soit recommencée... Donc si un scrutin irréprochable, inattaquable a lieu, le Liban accèderait enfin au rang des pays démocratiques évolués où la régularité des opérations électorales ne pose jamais problème. Ainsi en France quand des résultats sont invalidés — ce qui arrive assez fréquemment — c’est toujours pour des dépassements dans les dépenses de campagne électorale et jamais pour triche, surtout pas du côté des services publics. Et du même coup il n’y aurait plus à se faire du souci pour les saisons de villégiature du moment qu’il n’y aurait plus de partielles à organiser ni en hiver ni en été...
Toujours est-il que le ministre de l’Intérieur, tenant compte des bévues commises l’été dernier et dénoncées une par une dans les attendus de sentences d’invalidation rendues par le Conseil constitutionnel, a pris une série d’arrêtés pour en empêcher la répétition. Il tient cette fois à ce que tout soit consigné «step by step» par écrit et tout contresigné ensuite par les différents responsables. Parallèlement, les arrêtés ministériels créent une commission centrale des plaintes et plusieurs bureaux régionaux de réclamations pour les citoyens qui se heurteraient à des problèmes ou voudraient signaler des anomalies ici ou là. Les contrôleurs concernés ont pour instruction de vérifier immédiatement et de traiter au mieux toute plainte reçue, sans jamais l’éluder ou fermer les yeux comme cela a pu se produire l’été dernier... Il s’agit de veiller avant tout, on le sait, à prévenir le traficotage éhonté des listes d’électeurs bourrées de morts-vivants ou des extraits d’état-civil falsifiés comme des autres pratiques douteuses telle que «l’importation» d’électeurs-bidon non-libanais munis de faux papiers. Ce coup-ci, donc l’Intérieur resserre les boulons et annonce que les fonctionnaires, mohafez en tête, seront tenus responsables de toute bavure et devront en répondre disciplinairement. Les officiels promettent dès lors qu’on ne verra pas aux partielles de relevés fantaisistes de décomptes d’urnes qui n’étaient signés par personne. Ils affirment de même que les listes d’électeurs sont mises à jour, qu’il n’y a plus comme l’été dernier de pleines pages qui leur manquent ou des Mathusalem votants et qu’il n’y aura pas non plus de pleins paquets de bulletins perdus en chemin entre les premiers décomptes et la vérification chiffrée finale par les commissions de juges...
Le ministère s’avise également qu’il lui faut améliorer les capacités techniques de son personnel de terrain et il organise à cet effet un stage destiné aux chefs de bureaux de vote et à leurs assistants, pour leur expliquer en détail comment les opérations doivent se dérouler, quelles sont les erreurs à ne pas commettre. Il est apparu en effet l’été dernier que nombre de ces fonctionnaires, qui n’avaient même pas pris la peine de lire les brochures indicatives qu’on leur avait remises avant les élections, n’avaient qu’une très vague idée de ce qu’il leur fallait faire, des précautions qu’ils devaient prendre pour empêcher la triche... L’expérience promet donc d’être meilleure, surtout que pour ces partielles on va en principe utiliser, pour la première fois au Liban, la carte électorale individuelle, aux côtés il est vrai de l’extrait d’état-civil.
E.K.
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