Nécessite fait loi
«Autrement dit, poursuit cette personnalité, nécessité fait loi et quand cela s’impose le législateur peut bien évidemment prendre des libertés avec le découpage des circonscriptions. Mais cela ne s’applique pas à la situation socio-politique actuelle de ce pays. Donc, de l’avis de beaucoup, c’est sans raison valable que le gouvernement a défavorisé dans le dernier scrutin, disons-le tout crûment, la composante politique chrétienne en la privant du contrôle de l’unique mohafazat qui lui restait, Le Mont-Liban, après la fusion du district de Zahlé dans l’ensemble Békaa, de Zghorta-Bécharré-Batroun dans la masse du Nord, d’Achrafié dans un Beyrouth-Ouest bien plus peuplé et de Jezzine dans la constellation du Sud».
Quoi qu’il en soit, de sources concordantes on confirme que le point de vue «annulatif» n’a pas recueilli la majorité nécessaire en Conseil constitutionnel, ce qui expliquerait sans doute que M. Mallat n’eût pas poursuivi jusqu’au bout la bataille sur ce thème qu’il n’a pas du tout évoqué, on le sait, en expliquant les raisons qui l’ont poussé à démissionner.
Il n’en reste pas moins que nombre de politiciens s’inquiètent: le Conseil constitutionnel se garde en effet la possibilité théorique d’exiger l’annulation de toutes les élections, si ce n’est maintenant du moins à l’avenir. Comment cela? «En jugeant le cas Hobeiche au Nord sur base des plaintes et des témoignages portant non pas sur une triche matérielle en chiffres mais sur des «pressions abusives dénaturant la volonté de l’électorat», autrement dit sur un élément intangible dit «climat». Le Conseil, ajoutent ces politiciens, s’attribue ainsi un pouvoir arbitraire relevant de «l’intime conviction» qu’on peut justifier en droit pénal ou civil mais pas en droit civique ou administratif. A partir de là il peut aussi bien parler de «climat général insatisfaisant» pour décréter l’annulation de toute une opération électorale, qu’elle soit législative ou municipale...» Les appréhensions de ces députés peuvent paraître étonnantes tant il est évident que la mission du Conseil étant de réguler les élections, il peut les annuler en tout ou en partie, s’il juge que les électeurs n’ont pas pu exprimer librement leur volonté. De plus nul ne peut parler d’«arbitraire» ou d’«intime conviction» quand une sentence se fonde sur des faits perpétrés, confirmés par des plaintes ou des témoignages que rien n’est venu réfuter et qui ont dès lors valeur de preuve tangible... Cependant là où les politiciens marquent un point tout à fait logique c’est quand ils relèvent que «le Conseil constitutionnel a invalidé le mandat de M. Hobeiche, et pas celui de deux autres élus faisant l’objet exactement des mêmes plaintes, des mêmes témoignages dans ce Akkar où a régné un même climat de pressions et de transgressions». En réalité, les députés cités ne soit pas le seuls à s’inquiéter: dans l’affaire Hobeiche, le procès s’est basé sur un recours qui met en cause nommément de hauts personnages libanais et même non libanais. Il ne serait donc pas surprenant que les tenants du pouvoir cherchent à rogner à l’avenir les pouvoirs du Conseil constitutionnel... qui n’en a déjà pas beaucoup puisqu’il ne peut pas s’autosaisir et qu’il ne dispose pas de contrôleurs sur le terrain...
E.K.
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