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Actualités - CHRONOLOGIE

Talih publie son acte d'accusation dans l'affaire des tracts hostiles à l'Etat Pierre Atallah risque une peine de 3 à 15 ans de prison

Il a fallu près de 5 mois au premier juge d’instruction militaire, M. Riad Talih, pour préparer l’acte d’accusation dans l’affaire de la distribution de tracts incitant aux dissensions confessionnelles. Et finalement, il l’a publié hier, requérant contre notre confrère du «An-Nahar», Pierre Atallah, des peines allant de 3 à 15 ans de prison. L’acte d’accusation accuse aussi Ghassan Bardawil et Tony Abinader de participation à la distribution des tracts.
Ainsi, la «période de grâce» provoquée par la visite papale à Beyrouth a été de bien courte durée. Et après avoir, la veille, requis une peine allant de 5 ans de prison aux travaux forcés à perpétuité contre le cameraman de la MTV, Tony Chamié, pour collaboration avec les services de renseignements ennemis, le premier juge d’instruction militaire a continué hier sur sa lancée, couronnant un processus commencé en décembre dernier et menaçant notre confrère Pierre Atallah d’une lourde peine de prison. Certes, il ne s’agit que d’un acte d’accusation — qui traditionnellement charge au maximum les inculpés — et il faudra attendre l’ouverture du procès devant le tribunal militaire — à la veille de laquelle Pierre Atallah devra être de nouveau emprisonné — pour connaître l’épilogue de l’histoire.
On se souvient qu’elle avait commencé à la mi-décembre, à la suite de tirs contre un mini-bus syrien à Tabarja. Et si plus personne n’évoque cette affaire ni ses auteurs, elle a tout de même provoqué une vague d’arrestations dans les milieux dits de l’opposition chrétienne, notamment de plusieurs responsables du PNL. Après quelques jours de flottement, la plupart des personnes arrêtées ont été relâchées et un seul mandat d’arrêt avait été émis contre Pierre Atallah. Ce dernier n’avait été libéré qu’au bout de 15 jours de détention et après le paiement d’une caution de 6 millions de L.L.. Tout le monde croyait à ce moment-là que l’affaire n’aurait pas de suite, mais finalement, après avoir poursuivi son enquête, M. Talih en a décidé autrement. que reproche-t-il exactement à notre confrère? Voici les faits tels qu’ils sont racontés dans l’acte d’accusation.
En novembre 1996, certaines personnes ont distribué des tracts signés par «la résistance chrétienne libanaise», incitant aux dissensions confessionnelles, à la rébellion contre l’Etat et visant à troubler les relations entre le Liban et certains pays. Les tracts portent aussi atteinte à la réputation de l’armée et cherchent à l’affaiblir et à la discréditer. Pierre Atallah, selon l’acte d’accusation, aurait essayé de publier ces tracts dans le quotidien «An-Nahar», après s’en être sciemment procuré une copie. C’est-à-dire que le tract ne lui est pas parvenu en tant que journaliste. Mais une employée de banque le lui aurait montré et il se serait empressé de le prendre pour le publier dans le journal. toutefois le rédacteur en chef a refusé de publier le tract, le considérant comme un projet de discorde inter-libanaise et libano-syrienne.
Auparavant, le 14/10/96, Pierre Atallah avait publié un article — toujours dans «An-Nahar» — dans lequel il accuse des éléments de l’armée d’être entrés dans l’église de Hrajel pour y arrêter des partisans du général Aoun alors qu’ils assistaient à une messe de commémoration du 13 octobre 1990. Selon l’acte d’accusation, cette information est dénuée de tout fondement et elle vise à discréditer l’armée. Pour affirmer cela, le juge se base sur le témoignage des curés de cette église et sur les déclarations des personnes arrêtées ainsi que sur le fait que le colonel Nadim Lteif et le BCCN (proches du général Aoun) avaient retiré un communiqué condamnant l’entrée des soldats dans l’église pendant la messe, après s’être assurés que l’information était erronée. Ceci n’avait pas empêché Atallah de maintenir sa publication dans «An-Nahar».
L’acte d’accusation affirme ensuite que notre confrère a travaillé à la Middle East Télévision (appartenant à l’ALS) en 1990, nouant d’étroites relations avec Etienne Sakr (Abou Arz). Puis en 1993, lorsqu’il a été engagé au Nahar, il s’est rendu dans la bande frontalière. En principe, il devait y faire un reportage sur la commémoration de la résolution 425, mais il en a profité pour faire une longue interview d’Abou Arz, lui permettant ainsi de diffuser ses opinions hostiles à l’Etat et à la Syrie et faisant la propagande de l’ennemi israélien. Atallah s’est rendu une nouvelle fois à Sabbah (près de Jezzine) où est installé Abou Arz, en principe pour préparer un dossier sur les «Gardiens des Cèdres» à la veille des élections législatives. Mais une nouvelle fois, le journaliste a occulté son sujet d’origine, se contentant de noter les idées et les convictions d’Abou Arz. Mais cette fois, le rédacteur en chef du quotidien a refusé de les publier. Enfin, Atallah est entré en contact une nouvelle fois avec Abou Arz, à la suite de la publication du verdict du tribunal le condamnant aux travaux forcés à perpétuité pour collaboration avec l’ennemi israélien.
Selon l’acte d’accusation, Atallah aurait donc travaillé à la télévision de Lahd de 1990 à 1993, avant de se faire engager au Nahar. Par ailleurs, des tracts poussant au boycott des élections législatives et attaquant l’Etat et les autorités syriennes auraient été distribués au cours de l’été 1996 et aussi bien Ghassan Bardawil que Tony Abinader ont reconnu avoir participé à cette opération.
A partir de tous ces éléments, M. Talih estime que Pierre Atallah a agi sciemment et si toutes ses démarches n’ont pas été couronnées de succès, ce n’est pas à cause de lui, mais pour des raisons échappant à sa volonté. Les délits prévus par l’article 157 du code militaire ainsi que ceux prévus dans les articles 278 et 288 du Code pénal civil s’appliquent à son égard et ils prévoient des peines allant de 3 à 15 ans de prison. Il en est de même pour les deux autres. Le premier juge d’instruction militaire conclut son acte d’accusation en exigeant que les trois inculpés soient arrêtés à la veille de l’ouverture du procès, dont il leur fait assumer tous les frais.
Il faudra donc attendre l’ouverture de ce procès pour connaître le fin mot de l’histoire, mais il est certain que cet acte d’accusation suscitera de nombreuses réactions dans les milieux de la presse et auprès des associations des droits de l’homme.
Il a fallu près de 5 mois au premier juge d’instruction militaire, M. Riad Talih, pour préparer l’acte d’accusation dans l’affaire de la distribution de tracts incitant aux dissensions confessionnelles. Et finalement, il l’a publié hier, requérant contre notre confrère du «An-Nahar», Pierre Atallah, des peines allant de 3 à 15 ans de prison. L’acte d’accusation...