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Actualités - CHRONOLOGIE

Les bas-fonds de Washington sous les lambris du congrès

WASHINGTON, 10 Mai (AFP). — Ils ont connu la prison, les quartiers à l’abandon, les lois implacables des gangs et ils sont venus cette semaine témoigner sous les lambris solennels du Congrès de leur passé de misère et de leur résurrection.
Demetrius Pendarvis, 17 ans, et Derrick Thomas Ross, 23 ans, sagement assis côte à côte sur un banc de la commission des Affaires judiciaires de la Chambre des représentants, ont derrière eux des années de violence dans des bandes rivales, souvent sur fond de drogue, dans un des quartiers les plus misérables et redoutables de Washington.
Benning Terrace est perdu aux confins du sud-est de la ville, là où plus aucun Blanc ne s’aventure depuis longtemps et où les forces de l’ordre s’avouaient jusqu’à récemment impuissantes pour stopper le carnage entre voyous qui a fait plusieurs dizaines de morts ces quatre dernières années.
Le fond de l’horreur a été atteint avec le meurtre d’un jeune garçon de 12 ans, Darryl Hall, tué d’une balle dans la tête le 15 janvier. On ignore encore les raisons de sa mort et l’assassin est introuvable.
Mais ce nouveau drame allait provoquer un sursaut au sein de la communauté. Une organisation de terrain, l’«Alliance des hommes engagés», constituée de nombreux anciens délinquants, décidait de tenter de reconquérir le quartier, peu à peu.
Les membres de la commission des Affaires judiciaires de la Chambre des représentants a entendu cette semaine le témoignage des organisations luttant contre la dérive des quartiers, dans le cadre de leur examen d’un projet de loi, d’inspiration républicaine, se proposant de réprimer la violence chez les jeunes.
Ce projet de loi, adopté par la Chambre des représentants et qui doit passer au Sénat, propose de pouvoir juger et condamner les jeunes délinquants auteurs de violences, âgés de 14 ans et plus, par les tribunaux réservés jusqu’ici aux adultes et de pouvoir les incarcérer avec eux.
Certains démocrates, comme Zoé Lofgren, représentante de Californie, y sont vivement opposés.

Course contre la montre

Ils veulent plus de prévention et estiment que les sommes allouées à ce projet de loi, 1,5 md de dollars, devraient être plutôt consacrées aux associations de terrain telles que l’«Alliance des hommes engagés» ou des «Grands frères» et «Grandes sœurs». Ces derniers placent un enfant fragile sous la surveillance et les conseils d’un jeune adulte responsable, qui lui tiendra lieu du père ou du grand frère qu’il n’a souvent jamais connu.
Le président de l’«Alliance des hommes engagés», Peter Jackson, 45 ans, a affronté lui-même un passé de délinquance et la prison pour un vol à main armée. Les violences, les gangs, les vies perdues dès l’adolescence, il connaît.
Il se souvient du jour où l’on a retrouvé le corps de Darryl Hall dans un ravin, près de Benning Terrace.
«Nous savions tous que les représailles couvaient et nous sentions qu’il fallait faire quelque chose avant que le cycle de la violence ne coûte une vie supplémentaire».
Une véritable course contre la montre allait s’engager. Peter Jackson et ses compagnons se mirent à parcourir le quartier nuit et jour pour établir le dialogue, coûte que coûte, entre bandes rivales.
Ils furent accueillis avec «méfiance et soupçons», puis découvrirent que «ces gosses étaient fatigués et terrorisés. Ils ne voulaient pas mourir. Ils ne se souvenaient même pas comment les conflits entre bandes de quartiers avaient débuté. Ils voulaient y mettre un terme et ne savaient pas comment».
L’Alliance parvint, non sans mal, à organiser une rencontre entre les deux gangs ennemis, où tout le monde dut se soumettre au détecteur de métaux. Certains avaient douze ans, raconte-t-il. D’autres portaient un gilet pare-balles et disposaient d’un beeper pour appeler des renforts si la réunion tournait mal.
Le dialogue fut néanmoins établi. D’autres assemblées suivirent et le 30 janvier, un «pacte de paix» était conclu. Il n’y a plus eu, depuis, un seul meurtre à Benning Terrace.
Peter Jackson est optimiste et croit en la rédemption: «Mon message le plus important? Personne n’a jamais atteint le point de non retour».
WASHINGTON, 10 Mai (AFP). — Ils ont connu la prison, les quartiers à l’abandon, les lois implacables des gangs et ils sont venus cette semaine témoigner sous les lambris solennels du Congrès de leur passé de misère et de leur résurrection.Demetrius Pendarvis, 17 ans, et Derrick Thomas Ross, 23 ans, sagement assis côte à côte sur un banc de la commission des Affaires...