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Actualités - CHRONOLOGIE

Le conflit s'envenime entre Erbakan et l'armée turque

Bien qu’elle reste encore feutrée, l’épreuve de force entre l’armée laïque et le premier ministre islamiste, Necmettin Erbakan, a pris un tour un peu plus aigu, hier en Turquie, d’autant plus que de son côté, l’opposition de droite s’impatiente et réclame un nouveau Cabinet d’union duquel seraient exclus les islamistes.
Celui-ci, qui se dit prêt «à tout moment» à prendre les électeurs à témoins, a reçu hier à la présidence du Conseil le général Ismaïl Hakki Karadayi, chef d’une armée qui lui intime vainement depuis deux mois de mettre un terme à l’islamisation rampante du pays.
«Il vient me voir et je vais lui donner l’accolade. La presse va s’arracher les cheveux!», a confié ironiquement avant la rencontre le chef du gouvernement de coalition aux parlementaires de son Parti de la prospérité.
Mais un officier influent, le général Kenan Deniz, a déclaré au même moment qu’«éradiquer l’islamisme est une question de vie ou de mort» pour un pays certes entièrement musulman mais qui s’enorgueillit de sa laïcité depuis 73 ans.
L’état-major, qui a sommé Erbakan dès février de mettre au pas ses activistes, soupçonne ouvertement le chef du gouvernement, abandonné ce week-end par deux de ses ministres laïcs, de se livrer à des manœuvres dilatoires.
De fait, le leader islamiste balaye d’un revers de main les avertissements que l’armée lui lance par tous les canaux possibles: «L’armée est entièrement loyale envers la démocratie. Ne laissons personne la détourner à des fins intéressées».
Erbakan est presque totalement isolé au sein de la classe politique traditionnelle mais son partenaire laïc, l’ancien premier ministre Tansu Ciller, a affirmé que la coalition se maintiendrait au pouvoir en dépit de désaccords avec l’armée.
Le premier ministre a mis au défi ses opposants politiques, dont bon nombre poussent l’armée à mettre fin à l’expérience gouvernementale en cours, d’affronter leurs électeurs: «Aujourd’hui, nous sommes prêts à des élections, à tout moment, si quiconque les souhaite».
Mais, tout comme Ciller, ministre des Affaires étrangères et leader du Parti de la juste voie, il estime que l’hybride alliance politique au pouvoir depuis 10 mois demeure encore la meilleure solution pour la Turquie et «sa seule chance».

Les généraux turcs, qui en sont à leur troisième coup d’Etat depuis 1960, craignent au contraire une «iranisation» du pays qui l’isolerait encore davantage d’un Occident qui le regarde d’ores et déjà avec inquiétude et suspicion.
Par ailleurs, les principaux chefs de l’opposition turque ont appelé hier à la formation d’un gouvernement d’union excluant les islamistes de l’actuel premier ministre Necmettin Erbakan.

Bulent Ecevit, chef du parti de la Gauche démocratique (DSP), a rencontré tour à tour les leaders de trois autres partis d’opposition, Mesut Yilmaz, Deniz Baykal et Husamettin Cindoruk, et leur a proposé de former un gouvernement entre leurs quatre formations et le Parti de la Juste Voie (DYP, droite) du ministre des Affaires étrangères Tansu Ciller, partenaire des islamistes dans l’actuel gouvernement.
Il a suggéré que le premier ministre d’un tel gouvernement ne soit pas l’un des cinq leaders eux-mêmes.
Dans une conférence de presse, M. Yilmaz a indiqué partager les vues de M. Ecevit. «La formule d’un nouveau gouvernement pour remplacer celui-ci doit exclure le Refah» (Parti de la Prospérité de M. Erbakan), a dit M. Yilmaz.
«L’actuel gouvernement a fait un tort incroyable à la Turquie», a dit M. Yilmaz. «En fait, le Refah devrait être exclu de tout gouvernement jusqu’à ce qu’il adopte les principes indispensables de la République», a-t-il ajouté.
M. Yilmaz s’est dit prêt à accepter que le premier ministre d’un gouvernement laïc soit un membre du DYP, parti rival du sien, mais pas Mme Ciller. Une solide inimitié oppose cette dernière à M. Yilmaz et une coalition entre eux l’année dernière n’avait tenu que trois mois.
Bien qu’elle reste encore feutrée, l’épreuve de force entre l’armée laïque et le premier ministre islamiste, Necmettin Erbakan, a pris un tour un peu plus aigu, hier en Turquie, d’autant plus que de son côté, l’opposition de droite s’impatiente et réclame un nouveau Cabinet d’union duquel seraient exclus les islamistes.Celui-ci, qui se dit prêt «à tout moment»...