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Actualités - ANALYSE

Les systèmes sont bien sûr différents, mais on ne peut s’empêcher de noter la coïncidence: juste après la dernière entrevue Chirac-Hariri, le premier dissout l’Assemblée nationale de son pays pour y organiser des législatives anticipées de onze mois et le deuxième annonce qu’il accorde à la sienne une rallonge de huit mois... En Turquie, le président Suleyman Demirel propose lui aussi un recours accéléré au suffrage des urnes pour régler la crise que provoque la présence au gouvernement des islamistes, bête noire de l’armée. En Israël, il est très possible que la fragilisation de Netanyahu se solde également par des consultations populaires prématurées...`
En bref, sous divers régimes dits démocratiques, et qui le sont plus ou moins, le réflexe naturel en cas de difficulté est de revenir au peuple, non de le faire languir. Source des pouvoirs, il est le juge suprême en cas de problème ou de question cruciale car tout le monde n’a pas, comme ici, l’avantage de pouvoir compter sur l’arbitrage des décideurs.
Ailleurs, on estime indispensable de demander d’abord son avis à l’électorat avant de s’engager sur une voie nouvelle, même quand on est presque sûr qu’on aura ainsi une majorité parlementaire plus réduite, comme cela se voit actuellement en France. Ici, cet avis on le foule gaiement aux pieds en oubliant, entre autres exemples, qu’après tout, c’est pour quatre ans, non pour plus, que les électeurs ont élu les députés et qu’on ne peut jouer avec la durée initiale sans l’accord des mandants.
Mais par rapport à la France par exemple, l’inversion de tendances peut s’expliquer par le fait que là-bas la question de la régularité des élections ne se pose même pas, alors qu’ici... On peut donc estimer que tout comme M. Chirac juge que les élections servent l’intérêt national de son pays, un dirigeant avisé peut penser que chez nous, leur report va exactement dans le même sens.
Toujours est-il que le pouvoir français n’hésite pas à organiser des élections qui éroderaient sa majorité par respect de la démocratie comme pour avoir les coudées franches afin d’engager la France dans l’aventure de l’euro... Tandis qu’au Liban, quand le pouvoir se rend compte qu’il risque de perdre une compétition, il l’annule tout simplement, comme il vient de le faire pour les municipales. Le comble, c’est que les dirigeants réussissent à se chamailler même à ce sujet, à travers les explications qu’ils fournissent chacun de son côté pour justifier ou pour regretter le renvoi sine die de cette échéance qu’ils avaient un peut trop vite fixée à début juin. Les uns soutiennent en effet que les municipales provoqueraient des frictions portant atteinte à l’entente telle qu’ils la conçoivent, c’est-à-dire réduisant leur potentiel propre d’emprise politique... D’autres affirment qu’au contraire cette entente, sous-entendue dans le même sens, en serait sortie renforcée... Tout naturellement ces derniers ont adopté une telle position seulement après s’être rapprochés des courants opposants de l’Est, s’attribuant même largement le mérite d’avoir obtenu des «désenchantés» une participation massive qu’ils présentent comme un retour dans le giron de la république... Ce raz-de-marée potentiel a donc paru effrayer les autres parties loyalistes qui ont dès lors abordé l’entreprise. Et c’est probablement pour la même raison, bien plus que par crainte pour la saison touristique de l’été 98, qu’on a voulu gagner du temps sur le plan des législatives. Ce qui est rassurant en un sens car cela prouve que ces parties doutent désormais de leur capacité de remporter la victoire haut la main, au besoin en trafiquant l’opération.
Toujours est-il que les prorogations de toute nature ne sont pas un signe de bonne santé démocratique, à preuve qu’elles ne sont admises ailleurs que dans des cas vérifiés de force majeure.
Comme la guerre...

E.K.
Les systèmes sont bien sûr différents, mais on ne peut s’empêcher de noter la coïncidence: juste après la dernière entrevue Chirac-Hariri, le premier dissout l’Assemblée nationale de son pays pour y organiser des législatives anticipées de onze mois et le deuxième annonce qu’il accorde à la sienne une rallonge de huit mois... En Turquie, le président Suleyman Demirel...