Municipales : débats houleux en perspective au parlement

Avec le retour du président du Conseil, M. Rafic Hariri, du Turkménistan (VOIR PAR AILLEURS), l’actualité politique sera dominée à partir de demain, par les séances parlementaires consacrées au vote d’un certain nombre de projets et de propositions de lois. La loi sur les élections municipales et de moukhtars sera incontestablement la vedette de ces séances, prévues pour demain et jeudi, et pourrait être laissée pour la séance de jeudi, afin d’être débattue sans la pression d’un ordre du jour chargé
Tel qu’approuvé par la commission de l’Administration et de la Justice, présidée par M. Chaker Abousleiman, le projet de loi revêtu du caractère d’urgence relatif à la loi électorale, à la loi sur les municipalités et à la loi sur les moukhtars prévoit cinq amendements à la loi de 1977 en vigueur en ce moment:
— Nomination de moukhtars et de présidents de municipalités dans la bande frontalière occupée.
— Approbation de la carte électorale.
— Extension de 4 à 6 ans du mandat du moukhtar, à l’instar du président de municipalité, afin que les élections à ces deux fonctions se fasse en même temps.
— Rapprochement (de mai à avril) du délai de clôture de la correction des listes électorales, afin de ne pas renvoyer à l’été la date des élections (seul point du projet de loi se rapportant à la loi électorale).
— Autorisation pour les villages de 500 habitants (et non pas d’électeurs), d’avoir leur propre municipalité.
Trois points majeurs relatifs à la loi font litige et seront probablement soulevés par les députés:
Le premier porte sur le cumul des fonctions de député et de président de municipalité, le second sur le niveau d’instruction requis des présidents de municipalités et moukhtars, le troisième sur les modalités d’élection du président de municipalité. Sur ces trois points, le chef de l’Etat, le président du Conseil et le président de l’Assemblée
nationale ne sont pas d’accord, et les tiraillements se poursuivent en vue d’un compromis, qui semble improbable.
Alors que MM. Hraoui et Berry sont hostiles au cumul des fonctions de député et de président de municipalité, M. Hariri, lui, y est favorable. Le président du Conseil a affirmé samedi qu’il n’est candidat à aucune présidence de municipalité, mais qu’il considère que la loi ne devrait pas interdire ce cumul, car ce serait réduire la liberté de décision de l’électorat. La loi de 1977 ne dit rien sur le cumul et ne l’interdit donc pas. C’est donc les partisans d’un amendement qui devront réunir une majorité de suffrages, pour obtenir gain de cause.
En ce qui concerne le niveau d’instruction des candidats aux postes de président de municipalité et de moukhtar, les avis sont également partagés. Le président de municipalité devrait être bachelier et le moukhtar avoir son brevet, estime la «nouvelle génération» parlementaire, tandis que d’autres tiennent plus compte de l’existence de nombreux moukhtars et présidents de municipalités n’ayant pas les diplômes demandés, mais n’en sont pas incultes pour autant.
La loi actuelle, encore une fois, ne dit rien à ce sujet, et ses défenseurs soutiennent qu’on ne saurait demander à un président de municipalité plus qu’on ne demande à un député... Les députés partisans d’un niveau académique soulignent, pour leur part, que le président de municipalité et le moukhtar sont responsables administrativement, et doivent posséder des connaissances juridiques générales.
Le troisième point litigieux porte sur l’élection du président de municipalité. Là aussi, les tendances sont partagées entre ceux qui souhaitent l’élection du président au suffrage universel, et ceux qui considèrent que c’est au conseil municipal élu d’élire son président, comme le prévoit la loi de 1977.
M. Chaker Abousleiman souhaite, pour sa part, soulever le cas des populations déplacées qui n’ont pas encore regagné leurs foyers (principalement au Chouf) faute d’une réconciliation dans les villages qu’ils avaient abandonnés durant la guerre. Pour eux, le président de la commission de l’Administration et de la Justice souhaite qu’un moukhtar soit désigné, ce dernier étant beaucoup plus proche des personnes que le président de municipalité, et certains documents qu’il délivre pouvant tenir lieu d’actes de propriété.
Une proposition de loi relative aux complexes touristiques, dont certains estiment qu’ils devraient pouvoir élire leur propre municipalité, est également à prévoir. Par contre, tout ce qui pourrait lier un amendement de la loi sur les municipalités à la décentralisation administrative (et notamment les liens entre le président de municipalité et le mohafez), aura peu de chances de passer, si l’on cherche vraiment à faire vite.
M. Berry préside aujourd’hui deux réunions, l’une de son bloc parlementaire, l’autre du bureau de la Chambre, afin de préparer les séances de vote. Une réunion de concertation entre MM. Berry et Hariri est également prévue, ainsi qu’entre le président du Conseil et le chef de l’État.
Notons que sept députés sont candidats à la présidence de municipalités. Ce sont MM. Habib Hakim, Hussein Husseini, Mohammed Youssef Beydoun, Assem Kanso, Georges Dib Nehmé, Elias Hanna et Mansour Ghanem el-Bone.
Signalons pour finir que le ministre de l’Intérieur, M. Michel Murr, annoncera aujourd’hui la prorogation de 15 jours du délai de présentation de demandes de cartes électorales municipales. Le nombre d’électeurs ayant retiré leurs cartes est encore trop réduit, avait estimé samedi dernier, M. Hariri. Or ceci pourrait influer par défaut sur le résultat du vote, assure-t-on dans son entourage.
Les retraits les plus massifs de cartes électorales se produisent dans les rangs des partis et courants les plus mobilisés, comme le Hezbollah ou le courant aouniste, constate-t-on dans les milieux politiques.