Chaque jour donc une énigme s’ajoute à ce puzzle géant, dont on retiendra surtout le sourire narquois qui plus que jamais accueille le Libanais dans ses voyages à l’étranger: pensez-vous, un ressortissant qui débarque d’un pays aussi fantaisiste, cela mérite quand même une salutation à part…
Vu du dehors, l’édifice que constitue l’énigme nipponne paraît d’une effroyable complexité; et il doit être, selon toute vraisemblance, d’une simplicité enfantine vu de l’intérieur… si jamais on parvient à y pénétrer. Toujours est-il que prises dans leurs contradictions, qu’elles essaient tant bien que mal d’expliquer, les autorités libanaises gigotent sur des charbons ardents. Tout le monde leur réclame des précisions et elles répondent qu’il faut attendre que l’enquête donne des résultats...
Mais ce petit jeu de fuite en avant ne peut pas durer indéfiniment. D’autant que le président de la République a dû intervenir en personne pour demander aux services qualifiés d’éclairer rapidement la lanterne de l’opinion publique sur le cas des prévenus soupçonnés d’appartenir à l’Armée Rouge. M. Hraoui a parallèlement prié fermement la Justice d’accélérer cette fameuse enquête avec tous les services de sécurité pour savoir ce qu’il en est vraiment...
Le président du Conseil a pour sa part choisi le silence, comme première réaction, après son retour de Rome. Il a cependant invité les médias à suivre son prudent exemple et à ne pas trop s’étendre sur l’affaire, pour croustillante qu’elle paraisse, car il y va des bonnes relations du Liban avec différentes parties extérieures... Comme à chaque gros morceau (cf, le précédent Wakim, entre autres) on finit par se défausser sur le judiciaire et l’on demande aux protagonistes de mettre la pédale douce, en attendant que la justice dise son mot. De toute façon, à moins de broder des scénarios de romans policiers, on ne voit pas trop ce que les journaux peuvent raconter puisqu’on ne leur donne plus en pâture que le vide laissé par les ectoplasmes japonais. Comme il y a un déni de justice, il y a un déni d’information, un délit couramment commis à l’égard d’une opinion qui a le droit de savoir.
Toujours est-il que M. Hariri, dont le service de Sûreté de l’Etat dépend directement, en a reçu le chef, le général Nabih Farhat, qui en principe lui a dit tout ce qu’il savait.
Pour sa part le public reste sur sa faim: y a-t-il eu des arrestations, y a-t-il des Japonais parmi les personnes appréhendées ou des Asiatiques d’autres nationalités; en base de quelles indications, de quelles accusations, de quelle délation, de quels soupçons le service de Sûreté de l’Etat a-t-il agi à Tarik Jédidé et dans la Békaa; y a-t-il eu coordination avec les décideurs, à quel niveau et à quel moment... Les responsables ne condescendent à donner qu’une seule réponse nette: effectivement il y a eu rafle le 15 février, à preuve qu’Oummaya Abboud est ouvertement (si on peut dire) incarcérée, en principe pour une affaire de faux passeports asiatiques.
C’est tout. «C’est trop maigre, s’insurge une personnalité pourtant loyaliste, nous ne pouvons plus vendre la non-arrestation dehors, maintenant que l’Armée Rouge a elle-même vendu la mèche. Il faut faire du rattrapage rapidement, en essayant de limiter les dégâts».
Est-il encore temps, est-ce encore possible? «Non c’est trop tard, répond un officiel. Il y a eu malentendu au départ avec les décideurs et ils ont coupé tout le film, les personnages interceptés étant plus importants que la partie locale ne l’avait cru d’abord. Maintenant, conclut-il, nous n’avons plus le choix. Il nous faut suivre le conseil de la chanson «n’avoue jamais». C’est d’ailleurs relativement facile puisqu’il n’y a pas d’Okamoto détenu ici».
Ph. A-A.
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