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Actualités - CHRONOLOGIE

Avant de voter le budget, l'opposition y a introduit des amendements majeurs Crise politique evitée de justesse hier au parlement A la suite d'un compromis sur les bons du trésor, Hariri renonce à poser la question de confiance (photo)

C’est hier, peu avant minuit, que la Chambre a finalement voté par 93 voix contre une et dix abstentions, le projet de budget 1997 (6.433 milliards de livres libanaises), au terme de cinq longs jours d’un débat épuisant qui s’est souvent prolongé jusqu’à une heure tardive de la nuit, et qui a failli dans la journée aboutir à une crise politique, qui a été en définitive évitée de justesse en soirée.L’ensemble du débat, et notamment l’examen des articles du budget, a été marqué par une offensive de l’opposition, à qui le chef du Parlement, M. Nabih Berry, a donné toute latitude d’attaquer le gouvernement, n’hésitant pas, à plusieurs reprises, à s’en prendre lui-même au président du Conseil, M. Rafic Hariri.
De nombreux observateurs ont vu dans cette nouvelle donne une volonté manifeste de «ronger les ailes» du chef du gouvernement, qui a dû avoir la nostalgie des longues années de complicité avec le président de la Chambre.

Profitant du climat de conflit au sein de la troïka (qui a eu pour effet positif de concrétiser le principe de la séparation des pouvoirs), les ténors de l’opposition, notamment le Rassemblement national parlementaire (RNP, regroupant MM. Hussein Husseini, Sélim Hoss, Boutros Harb, Mohammed Youssef Beydoun et Nassib Lahoud, ainsi que le président Omar Karamé qui s’est absenté) et MM. Zaher el-Khatib et Najah Wakim s’en sont donné à cœur joie, tant dans leurs interventions respectives que dans le décorticage du projet de budget.

Ils ont ainsi obtenu, avec quelques uns de leurs collègues, l’annulation ou l’amendement de plusieurs articles de la loi des finances, dont certains sont assez importants, tels l’article autorisant le ministère des Finances à détruire ses documents, qui a été aboli... sur proposition du ministre Siniora lui-même.
C’est bien la première fois depuis des années que des modifications majeures sont introduites au projet de budget, que le Parlement avait pris l’habitude de voter en un tournemain, à la faveur d’une «coopération» à toute épreuve entre les pouvoirs, ou plutôt entre leurs chefs.
La «nouvelle relation» entre la deuxième et la troisième présidence a failli aboutir à une nouvelle crise politique, le président Hariri ayant menacé de poser la question de confiance si l’article 6 du projet de budget, relatif à l’émission de bons du Trésor, venait à être amendé. Relevant le défi, M. Berry s’est dit disposé à donner suite à cette requête (VOIR PAGE 4).
Lecture est donnée, dès l’ouverture de la séance du soir, de l’article 6, qui «autorise le gouvernement à émettre, à concurrence d’un montant équivalent aux besoins du Trésor, des bons du Trésor en livres libanaises, à long, moyen et court termes, sur décision du ministre des Finances».
M. Berry donne ensuite la parole au chef du gouvernement, qui est visiblement pris de court. Tout en réaffirmant l’importance de l’article 6 «pour la préservation de la stabilité», M. Hariri adopte un ton très conciliant, et s’excuse indirectement de son attitude du matin, en soulignant qu’il «ne voudrait pas que l’on croit que le gouvernement défie le Parlement».
Zaher el-Khatib et Najah Wakim s’opposent à l’approbation de cet article, notant qu’il est «anticonstitutionnel», et qu’un plafond, à savoir le montant du déficit budgétaire, devait être fixé à l’émission des bons du Trésor.
D’autres députés, notamment Khatchig Babikian, proposent le vote tel quel de l’article, tandis que Chaker Abou Sleiman demande à savoir si cet article était mentionné dans les projets de budget des années précédentes. M. Berry lui répond que cet article, tel que figurant dans le projet de budget, a été appliqué de 1980 à 1996, et n’a été amendé qu’en 1991.

Le compromis

Pour mettre fin au débat qui a repris de plus belle, le vice-président du Parlement, M. Elie Ferzli, propose que cet article soit mis de côté, et que l’examen du budget se poursuive. Les articles 7, 8, 9 et 10 sont rapidement votés, tandis que M. Ferzli vient se joindre aux membres du RNP, et entraîne plusieurs d’entre eux à l’extérieur de la salle.
Au retour de M. Ferzli, M. Berry demande que l’on revienne à l’article 6. Tandis que le vice-président de la Chambre se dirige vers le président Berry, et lui fait comprendre, d’un signe de tête, que le problème a été résolu, le président Sélim Hoss propose un amendement de ce texte, qui consiste à ajouter la phrase suivante: «Le gouvernement doit informer le Parlement, par des rapports mensuels, de toute somme dépassant le montant du déficit après y avoir ajouté les crédits affectés pour l’exercice de 1997».
M. Berry soumet ce texte au vote, et seules quelques mains se lèvent. Le président du Parlement juge toutefois que le nombre est suffisant, et à la surprise générale, il crie «souddik». Ce compromis aura eu le mérite de désamorcer la crise.
Par la suite, les articles du texte sont rapidement votés, et seuls les membres du RNP interviennent pour demander des clarifications ou de légers amendements.

Les documents du
ministère des Finances

Cependant, l’article 26, lui, ne passe pas facilement. Dénoncé au premier jour de la séance par Zaher el-Khatib, cet article «autorise le ministère des Finances à détruire tous les documents, y compris ceux qui ont été magnétisés ou informatisés, relatifs à tous les ministères, conformément à un système défini par des décrets adoptés en Conseil des ministres sur proposition du ministre des Finances et après approbation de la Cour des comptes».
M. Siniora crée la surprise en annonçant qu’il vaut mieux, pour mettre un terme à la polémique provoquée par cet article, l’abolir, quitte à louer des conteneurs pour y stocker les documents. Soumise au vote, la proposition de M. Siniora est approuvée, et l’article est annulé. Après le vote de plusieurs articles, M. Berry annonce qu’une proposition de loi prévoyant le remplacement de larticle 33 par un nouvel article lui a été remise. Il s’agit du texte élaboré à l’initiative de Chaker Abou Sleiman, et exemptant de toute amende-retard les citoyens qui payent leurs taxes dans un délai de quatre mois.
M. Siniora proteste contre cet article, soulignant qu’il est injuste de mettre sur un pied d’égalité les citoyens qui paient leurs taxes à temps et ceux qui négligent de le faire. Il propose que l’exemption couvre seulement 80% de l’amende. Après un long débat, l’on opte pour une exemption de 90 pour cent, et le délai est fixé au 30 juin 1997.
Après l’article 43, le dernier sur la liste, un nouvel article est introduit, prévoyant que les compétitions sportives seront exemptées de toute taxe.
Les annexes du budget, relatives à la loterie, au ministère des Postes et Télécommunications et à la Direction de la betterave sucrière, sont votées en un tournemain.

La Haute-Cour

Commence ensuite l’élection des 10 députés membres de la Haute -Cour chargée de juger les présidents et les ministres. Les noms des candidats aux sept postes de membres titulaires et aux trois postes de membres suppléants sont annoncés. MM. Adnan Arakji et Nazih Mansour ajoutent leurs noms à ceux de leurs collègues, au sujet desquels une «entente» était intervenue il y a plusieurs jours déjà.
Avant l’élection, le projet du budget dans son intégralité est soumis au vote, et les mains s’élèvent nombreuses en faveur de ce texte longuement critiqué durant les quatre précédentes journées.
Finalement, 93 députés votent en faveur du texte, tandis qu’un seul, Zaher el-Khatib, vote contre, et dix autres s’abstiennent. Il s’agit des cinq membres du RNP, à savoir MM. Husseini, Hoss, Beydoun, Lahoud et Harb, des trois députés du Hezbollah présents, MM. Nazih Mansour, Ibrahim Amine el-Sayyed et Hussein Hajj Hassan et de MM. Pierre Daccache et Abdel-Rahman Abdel-Rahman. Il convient de noter que M. Wakim ne se trouvait pas dans la salle au moment du vote.
Tandis que ministres et députés quittent la salle qu’ils ont occupée, presque continuellement durant cinq jours entiers, les journalistes attendent à l’extérieur la proclamation des résultats de l’élection des membres de la Haute-Cour, qui n’apportent aucune surprise (VOIR PAR AILLEURS).
Lorsque les derniers journalistes sortent du Parlement, l’horloge de la Place de l’Etoile, dont le cadran illumine le ciel gris, affiche 23 heures 30.

R. B.
C’est hier, peu avant minuit, que la Chambre a finalement voté par 93 voix contre une et dix abstentions, le projet de budget 1997 (6.433 milliards de livres libanaises), au terme de cinq longs jours d’un débat épuisant qui s’est souvent prolongé jusqu’à une heure tardive de la nuit, et qui a failli dans la journée aboutir à une crise politique, qui a été en...