Rechercher
Rechercher

Actualités - REPORTAGE

Musique Une soirée avec Schubert présentée par Pierre Azoury (photos)

Clôturant le cycle de causeries musicales que les Amis du Festival al-Bustan organisent en collaboration avec le «Civilization Sequence Program» de l’AUB, une soirée Schubert — à l’occasion du bicentenaire de sa naissance — a été animée par Pierre Azoury. Au «Issam Fares Hall», AUB.
«Voulais-je chanter l’amour, cela m’entraînait à la douleur; voulais-je chanter la douleur, cela me menait à l’amour», écrivait Franz Schubert en 1822, année durant laquelle le compositeur autrichien fut atteint de la syphilis dont il succombera six ans plus tard à l’âge de 31 ans.
Pierre Azoury, professeur d’ingénierie mécanique à l’AUB, auteur par ailleurs de nombreuses compositions et d’ouvrages musicaux, a voulu que sa conférence prenne l’aspect d’une soirée musicale. Après une introduction détaillée, accompagnée de diapositives, des films vidéo ont été projetés. «Pur produit d’un univers clos, fils et prisonnier d’une ville (Vienne) où il naquit (en 1797) et mourut (en 1828) sans presque jamais la quitter, Schubert n’en est pas moins, tant par sa vie que par son œuvre, le parfait symbole du «voyageur romantique», a souligné Azoury. Et d’ajouter: «Constamment mis en échec dans toutes ses tentatives d’insertion sociale, il est, dégagé de toute fonction servile, le premier des musiciens à n’avoir pour statut que celui de compositeur. Ignoré de son époque, il est l’ami des meilleurs parmi les Autrichiens de sa génération (Grillparzer et Bauernfeld pour la littérature, Schwind et Kupelwieser pour la peinture). Fils d’instituteur, il devient, par le pouvoir de sa musique, l’égal des maîtres qu’il vénère (Goethe, Schiller, Heine)».
Méconnu en tant que compositeur par ses contemporains, pratiquement jamais joué, très peu édité, il n’en laisse pas moins à sa mort un catalogue considérable d’œuvres (998 opus). Il est mort à trente et un ans, laissant une œuvre considérable, en partie inédite: plus de six cents lieder, neuf symphonies, une vingtaine de quatuors, autant de sonates et nombre de pièces pour piano, vingt-deux opéras, des oratorios, des messes.
«Cependant, nul comme lui n’a été le musicien de l’«inachevé», élevant cette catégorie jusqu’au mythe esthétique. Libre de toute contrainte, il bouscule les formes musicales, impose des œuvres brèves nées de l’instant-improvisation (Impromptus, Moments musicaux) au moment même où il élargit le temps musical pour devenir le musicien de ces «célestes longueurs» (Grande symphonie en ut) qui laisseront Schumann admiratif et médusé. Même Beethoven que Schubert idolâtrait aurait dit de sa musique, «touchée par une étincelle divine». Inspirateur d’un groupe amical et culturel qui se nourrit de lui au point de prendre son nom pour enseigne de ses réunions régulières (les «schubertiades»), il en reste un des membres les plus modestes».
On a eu tendance, par le passé, à déprécier Schubert, à ne voir en lui qu’un artiste au caractère agréable qui composait des musiques légères de salons. Certains biographes disent qu’il souffrait de troubles maniaco-dépressifs, était accro à l’alcool et au tabac, fréquentait les maisons closes.
Le joyeux compagnon vivait donc, en réalité, dans la confrontation quotidienne avec la mort, l’ami naïf était un «clairvoyant» (ainsi que le nomment ses intimes) aux intuitions musicales fulgurantes et prophétiques. On apprend également qu’à part deux séjours en Hongrie et quelques petites randonnées en Autriche, Schubert ne quitta jamais Vienne, où, cependant, il ne réussit jamais à imposer son génie. Son amour de la liberté l’écarta des situations officielles, et seules les maigres sommes que lui allouaient les éditeurs de musique le faisaient vivre. Une seule fois, un concert de ses œuvres fut organisé de son vivant.
«Reflétant l’esprit de Vienne, sa musique garde le charme de l’improvisation, atteignant au chef-d’œuvre avec une suprême aisance dans les pièces courtes, tels les lieder», affirme le conférencier.«Schubert est romantique par ses trouvailles harmoniques, ses modulations subtiles et incessantes, qui vivifient des formes traditionnelles». Dans un curieux récit littéraire, écrit à l’âge adulte, Schubert - sous la symbolique d’un rêve - dresse lui-même le catalogue des thèmes clés qui définissent à nos yeux le tragique de sa vie comme de son œuvre musicale. S’y trouvent successivement: la séparation, le voyage, la solitude, la nostalgie du paradis perdu, la mort, l’amour refusé, la béatitude dans la communion. Les lieder abondent, qui correspondent à chacun de ces thèmes.
L’assistance, nombreuse en ce soir-là, a pu ensuite assister à des enregistrements des œuvres les plus fameuses de Schubert: «Die Forelle» (La Truite), piano quintet en A major, Op 114; «Der Tod und das Mädchen» (La mort et la jeune fille), quartet à cordes en D mineur; l’Impromptu Op 90; et quelques titres du recueil «Schwanengesang» (Le chant du cygne) publié après sa mort.
Finale en beauté avec la plus célèbre symphonie de Schubert, l’Inachevée...

M.G.
Clôturant le cycle de causeries musicales que les Amis du Festival al-Bustan organisent en collaboration avec le «Civilization Sequence Program» de l’AUB, une soirée Schubert — à l’occasion du bicentenaire de sa naissance — a été animée par Pierre Azoury. Au «Issam Fares Hall», AUB.«Voulais-je chanter l’amour, cela m’entraînait à la douleur; voulais-je chanter...