Deux siècles après son soulèvement, à la tête d’une troupe d’indiens, le nom de l’insurgé métis a fait les gros titres de la presse mondiale avec la spectaculaire prise d’otages de la résidence de l’ambassadeur du Japon à Lima, le 17 décembre, par un commando du Mouvement révolutionnaire Tupac Amaru, le MRTA.
Le drapeau du mouvement, qui se réclame aussi des idées de révolution panaméricaine d’Ernesto Che Guevara, comporte le portrait de profil de Tupac Amaru II, de son vrai nom José Gabriel Condorcanqui, un cacique, ou chef local, descendant d’un des derniers empereurs inca, Tupac Amaru 1er.
Dans l’imaginaire populaire péruvien, Tupac Amaru est devenu synonyme de rébellion et de résistance à l’invasion. Dans ce pays andin, la population blanche d’ascendance européenne est largement minoritaire face aux métis et indiens d’origine Inca ou Aymara.
Pourtant, Tupac Amaru a été longtemps éclipsé, tenant une place secondaire dans l’histoire du Pérou, devenu indépendant en 1821, après la défaite des dernières troupes fidèles au roi d’Espagne.
Riche et noble, originaire de Cuzco, l’ancienne capitale de l’empire inca, Jose Gabriel Condorcanqui a engagé en 1780 l’une des plus importantes insurrections de la période coloniale, révolté par les humiliations infligées aux Péruviens indigènes.
Après plusieurs affrontements sanglants, marqués par quelques victoires sur les troupes royales espagnoles, les bataillons de Tupac Amaru II sont écrasés en novembre 1780. Le 18 mai 1781, après un jugement sommaire, il est pendu. Détail macabre, sa pendaison avait été précédée par une tentative d’écartèlement, chaque main et pied attaché à un cheval.
Valoriser
le passé inca
Au début des années 1970, la figure de Tupac Amaru réapparaît, mise en avant par les militaires progressistes du régime socialisant du général Juan Velasco, au pouvoir de 1968 à 1975. A la demande expresse du général Velasco, un grand portrait du conquistador espagnol Francisco Pizarro fut décroché du mur d’un des grands salons du palais du gouvernement.
Pour des raisons politiques, le régime entendait valoriser le passé inca du Pérou. A la place du portrait du conquistador, on installe alors une grande peinture représentant Tupac Amaru. Le salon Pizarro est aussitôt débaptisé au profit du chef insurgé.
Avec son tempérament de guerrier rebelle et son faciès aux traits andins très marqués, Tupac Amaru a été dédaigné par la majorité des présidents de la République depuis le début du XXe siècle, descendants pour la plupart de familles aristocratiques et d’origine européenne.
L’exception la plus notable de cette lignée de chefs d’Etat péruviens, est celle du président actuel Alberto Fujimori, fils d’émigrés japonais débarqués en 1934 à Callao, le port de Lima, et surnommé amicalement «El Chino», le Chinois, depuis son élection en 1990.
Depuis les années 70, de nombreuses rues et avenues de quartiers populaires de Lima portent le nom de Tupac Amaru. Mais pour beaucoup de personnes de la bonne société de la capitale, il serait encore impensable qu’une avenue porte ce nom dans un quartier huppé, comme celui de San Isidro, où se trouve la résidence diplomatique assiégée. Depuis plus de 3 semaines, 74 otages y sont séquestrés par des guérilleros «tupacamaristes», comme disent les Péruviens.
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