
Le président libanais Joseph Aoun lors d'une conférence sur le "Smart Government" organisée à l'hôtel Phoenicia. Photo relayée par les organisateurs de la conférence
Le président libanais Joseph Aoun a estimé que l'instauration d'un « Smart Government » (ou « gouvernement intelligent » en français) au Liban était repoussée par ceux qui souhaitent entretenir la corruption dans le pays. Il s'exprimait lors d'une conférence sur le sujet organisée à l'hôtel Phoenicia, sous l'intitulé « Smart Government Diaspora Experts for Lebanon », organisée par le Lebanese Executives Council (LEC), une organisation regroupant des acteurs du secteur privé libanais au Liban et à l'étranger, qui se sont donné pour mission de promouvoir le développement et les réformes dans le pays. Selon la définition de l’Organisation de coopération et de développement économiques, le gouvernement intelligent se définit par plusieurs piliers incluant la numérisation des services de l'État, le renforcement de la transparence ou encore la proactivité.
« Le gouvernement intelligent est toujours repoussé, pour que les démarches administratives des citoyens restent soumises à l’arbitraire de certains corrompus. La transition numérique est entravée et sabotée, pour que certaines administrations demeurent paralysées, n’ouvrant leurs portes au citoyen que dans deux cas : la corruption ou l’intervention d’un zaïm (leader communautaire, ndlr). Ces deux pratiques nourrissent un système de clientélisme qui a contribué à la destruction du Liban pendant de longues décennies », a détaillé le chef de l'État. Ses propos ont été relayés sur le compte X de la présidence.
« Que voulons-nous du gouvernement intelligent ? Très simplement, nous voulons un service public pour chaque citoyen, quelle que soit son identité, son appartenance ou son réseau. Nous voulons un service plus efficace, plus rapide, plus transparent et plus inclusif. Nous voulons que le Liban s’ouvre aux partenariats régionaux et internationaux, qu’il soit apte à accueillir des investissements étrangers. C’est un objectif essentiel et incontournable », a poursuivi Joseph Aoun. « Des centaines de Libanais ont déjà accompli cela dans leurs pays d’adoption. Le moment est venu de le réaliser pour leur pays d’origine. »
A la fin de son discours, le président Joseph Aoun a précisé que le Liban « a demandé d'intégrer » l’Organisation de coopération numérique (DCO pour Digital Cooperation Organization). Il s'agit d'une organisation internationale fondée en 2020, qui se spécialise dans l’économie numérique et qui compte aujourd’hui 16 pays membres.
En rejoignant la DCO, le Liban pourrait profiter à travers « la mise en place de partenariats entre les secteurs publics et privés dans tous les pays ; l’attraction de nouveaux investissements ; le renforcement des capacités numériques ; et la mise en place de partenariats entre les pays membres eux-mêmes », précise à L’Orient-Le Jour, Hajar El-Haddaoui, directrice générale de l’organisation, en marge de l’événement. Elle ajoute que « la transformation numérique que veut adopter un pays repose en partie sur son infrastructure (en matière de télécommunications). Le Liban doit œuvrer à améliorer la sienne pour permettre l’accélération de cette transformation ».
De son côté, le ministre d’État à la Réforme administrative (Omsar), Fadi Makki, a précisé que « le Liban est en retard dans le domaine numérique, notamment en ce qui concerne son secteur public ». Et d’ajouter que cette « transformation numérique permettrait au Liban d’enregistrer une amélioration significative dans ce domaine ». « C’est pour cela que nous travaillons à obtenir un prêt de la Banque mondiale, à hauteur de 150 millions de dollars, qui permettrait d’assurer les bases, dont l’infrastructure. La mise en place du projet est prévue sur cinq ans », ajoute-t-il.
« La transformation numérique, une nécessité »
Le Premier ministre Nawaf Salam a affirmé à la clôture du forum que ce rendez-vous constitue « une étape essentielle sur le chemin de la construction d’une administration moderne et efficace ».
« Nous nous sommes réunis autour d’un objectif clair : lancer le processus de transformation numérique de l’État libanais, afin de renforcer la confiance, améliorer l’efficacité des services, et répondre aux attentes des citoyens », a-t-il déclaré en remerciant les Libanais de la diaspora pour « leur expertise, leurs idées et leur engagement sincère ».
« Pour le Liban, la transformation numérique n’est pas un luxe, mais une nécessité », a-t-il ajouté. « C’est une réforme qui profite directement aux gens : elle fait gagner du temps, réduit la corruption et améliore la qualité des services. C’est aussi une condition essentielle à la croissance économique : sans une administration numérique, il ne peut y avoir d’investissements à la hauteur de nos ambitions ; sans transparence, pas de confiance ; sans modernisation, pas d’opportunités à la hauteur de ce que mérite notre jeunesse pour construire son avenir ici, dans son pays ».
Selon le Premier ministre, « pour réussir, il faut une coordination complète entre les ministères et les administrations ». « Le Liban ne peut rester en marge du monde numérique », a-t-il poursuivi. « Nous sommes déterminés à faire partie intégrante de l’économie numérique régionale et mondiale ».
Il a dans ce cadre fait savoir qu'en plus du faite que le Liban prévoit d’adhérer à l’Organisation de coopération numérique, il vise « à lancer des projets numériques viables sur le plan financier et durables à long terme ». Il a également remercié « les experts et membres de la diaspora qui accompagneront la mise en œuvre des recommandations de la conférence à travers une coalition créée spécialement à cet effet ». « Cette coalition développera une application nationale reliant les ministères libanais aux compétences de la diaspora, afin de renforcer la coopération entre eux », a-t-il conclu.
Parrainé par Joseph Aoun, l'événement a été organisé en coopération avec la Lebanese American University (LAU), la Chambre de commerce de Beyrouth et du Mont-Liban, le Lebanese Business Council au Koweït, le Lebanese Business Council à Abou Dhabi, l'Australian New Zealand Lebanese Chamber of Commerce and Industry, ainsi que l'Association des hommes d'affaires libanais en France.
Depuis son élection en janvier, le président libanais a affiché sa volonté de débloquer les importants chantiers de réformes que le pays doit lancer pour redresser son économie et son système financier, mis à terre par une grave crise qui a éclaté en 2019 avant d'être aggravée par plusieurs événements ces dernières années, dont la guerre entre Israël et le Hezbollah qui a causé plus de 12 milliards de dollars de dégâts et de pertes économiques, selon la dernière évaluation faite cet hiver par la Banque mondiale.
La lutte contre la corruption fait partie des chantiers qui devront être mis en oeuvre, pour être pris au sérieux par les partenaires du pays et le Fonds monétaire international, à qui les dirigeants libanais ont réitéré leur volonté de souscrire à un programme d’assistance financière. Une délégation du FMI est arrivée la semaine dernière à Beyrouth pour suivre le processus.
Selon la dernière édition de l’Indice de perception de la corruption (IPC) dans le monde publiée en début d'année par l’ONG Transparency International, le Liban a obtenu une note de 22 sur 100, en recul de deux points par rapport à l’année précédente, ce qui le place à la 154e position sur 180 pays du monde.
On ne vous le fait pas dire M. le Président. Nombreux sont qui œuvrent à saboter toute solution imminente et qui s’avère possible pour un temps, ce qui n’arrange pas leurs projets de corruption qu’ils souhaitent perpétuer en mettant tout leur poids et en utilisant tous les subterfuges pour y arriver. Ils misent sur le temps. Vous voilà prévenu.
11 h 14, le 04 juin 2025