L'espion israélien Eli Cohen (à gauche) lors de son procès en Syrie. Photo d'archives AFP
Les nouvelles autorités syriennes ont approuvé la remise à Israël des effets personnels de l’espion Eli Cohen, pendu en 1965 à Damas, dans le but d’apaiser l’hostilité israélienne et de montrer sa bonne volonté envers le président américain Donald Trump, ont déclaré trois sources à l'agence Reuters.
Israël a annoncé dimanche la récupération d’une série de documents, de photographies et d’objets personnels appartenant à Eli Cohen, affirmant que son agence de renseignement, le Mossad, avait coopéré avec une agence de renseignement étrangère non identifiée pour obtenir les effets personnels de l'espion. Cependant, une source sécuritaire syrienne, un conseiller du président syrien Ahmad el-Chareh et une personne familière des discussions indirectes entre les deux pays ont affirmé que ces archives avaient en réalité été proposées à Israël comme un geste indirect de la part de M. Chareh, qui cherche à apaiser les tensions et à gagner la confiance du président Donald Trump.
Eli Cohen avait été condamné à mort après avoir infiltré l’élite politique syrienne. Il est toujours considéré comme un héros en Israël et comme le plus célèbre espion du Mossad pour avoir révélé des secrets militaires qui ont contribué à la victoire éclair d’Israël lors de la guerre de 1967. Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a décrit l'agent dimanche comme une légende et « le plus grand agent de renseignement de l’histoire de l’État ».
Bien qu’Israël cherche depuis longtemps à rapatrier son corps pour lui offrir une sépulture nationale, le retour de ses archives, conservées pendant 60 ans par les services de renseignement syriens, a été salué par le Mossad comme «une réussite d’une très haute portée morale». Israël n’a pas révélé publiquement comment ces archives étaient tombées en sa possession, affirmant seulement qu’il s’agissait d’une « opération secrète et complexe du Mossad, en coopération avec un service de renseignement allié ». Le bureau de M. Netanyahu, les responsables syriens et la Maison-Blanche n’ont pas immédiatement répondu aux demandes de commentaires concernant le rôle de la Syrie dans la récupération des archives.
« Dossier Cohen »
Après que les rebelles menés par Ahmad el-Chareh ont renversé le président Bachar el-Assad en décembre dernier, lors d'une offensive éclair de quelques jours qui a mis fin aux 54 ans de règne de la famille Assad, ils ont trouvé le «dossier Cohen» dans un bâtiment des services de sécurité de l’État, selon la source sécuritaire syrienne. Le président syrien et ses conseillers étrangers ont alors rapidement décidé qu'ils allaient utiliser ce matériel comme « levier », a ajouté cette source. Elle a précisé que M. Chareh avait compris la grande valeur symbolique de ce dossier pour les Israéliens et que leur restitution pouvait constituer un geste diplomatique significatif.
Le jihadiste devenu président cherche à mettre un terme aux attaques sur le territoire syrien, alors qu'Israël a bombardé à de nombreuses reprises le pays voisin et occupe désormais une large bande de son territoire frontalier d'Israël. Ahmad el-Chareh cherche également à améliorer les relations de la Syrie avec les États-Unis et d’autres pays occidentaux. Des liens cruciaux pour aider Chareh à remettre sur pied un pays dévasté par 14 ans de guerre civile.
Plus tôt en mai, Reuters avait rapporté que les Émirats arabes unis avaient mis en place un canal de communication indirect entre Israël et la Syrie, visant à instaurer la confiance entre les deux parties. D’autres canaux indirects de discussion existent également, selon deux sources proches du dossier.
Dans le cadre de ces discussions, la Syrie aurait accepté plusieurs mesures, notamment le retour des restes d'Eli Cohen et de ceux de trois soldats israéliens tués lors de combats contre les forces syriennes à Sultan Yaacoub, au Liban, dans les années 1980, a indiqué une source au fait des pourparlers. Dans ce cadre, le corps de l’un de ces soldats, Zvi Feldman, a déjà été restitué, a annoncé Israël la semaine dernière. Le retour des archives de Cohen s’inscrit dans le cadre de ces mesures de confiance, et a été approuvé directement par M. Chareh, selon cette source.