
Nabatiyé, au Liban-Sud, sous le feu d\'Israël, le 8 mai 2025. Rabih Daher/AFP
La Force intérimaire de l'ONU au Liban (Finul) a annoncé lundi avoir découvert plus de 225 caches d'armes dans le sud du pays depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu fin novembre entre le Hezbollah et Israël. Selon les termes de cet accord, l'armée israélienne était censée avoir achevé le 26 janvier son retrait du sud du Liban, où seuls l'armée libanaise et les Casques bleus de l'ONU devaient être déployés. Le Hezbollah devait, lui, démanteler ses infrastructures dans le Sud (à terme, sur l'intégralité du territoire) et se retirer au nord du fleuve Litani, à environ 30 kilomètres de la frontière israélienne.Depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, « les forces de maintien de la paix ont découvert plus de 225 caches d'armes et les ont remises » à l'armée libanaise, a indiqué la Finul dans un communiqué.
La force de l'ONU, ainsi que les États-Unis et la France, font partie d'un comité à cinq avec le Liban et Israël chargé de superviser le cessez-le-feu. L'armée libanaise a également commencé ces derniers mois à se déployer dans le sud du pays, à mesure du retrait des troupes israéliennes. « Avec le soutien de la Finul, l'armée libanaise s'est redéployée sur plus de 120 positions permanentes au sud du Litani », mais « le déploiement complet (de l'armée) est entravé par la présence des forces israéliennes sur le territoire libanais », a indiqué la force onusienne.Dans ce contexte, un énième incident a opposé lundi des habitants de Chebaa (caza de Hasbaya) aux Casques bleus, dont les véhicules ont été empêchés d’entrer dans certaines zones. Ceux-ci ont dû faire demi-tour, d'après une vidéo de la scène obtenue par notre correspondant dans le Sud, Mountasser Abdallah.
Des scènes de même genre se sont déroulées ces trois dernières semaines à Tayr Debba (caza de Tyr), Jmaïjmé (caza de Bint Jbeil), Abbassiyé (caza de Tyr) et enfin Yater (caza de Bint Jbeil), dimanche.Une nouvelle fois, la raison mise en avant par les habitants pour justifier leur hostilité envers la Finul est que la force onusienne circule sans l’armée libanaise. « La Finul coordonne étroitement ses activités avec les Forces armées libanaises (FAL) et mène certaines opérations conjointement avec elles », rappelle toutefois la force onusienne dans son communiqué.
Pression sur le Liban
Ces développements interviennent à l'heure où le Liban a reçu de nombreux messages internationaux lui enjoignant de poursuivre ses efforts – voire de les accélérer – pour cantonner les armes aux mains de l’État, y compris au nord du fleuve Litani. C'est dans ce cadre que s'inscrit la salve de frappes israéliennes la semaine dernière sur la région de Nabatiyé. L'armée israélienne a utilisé des bombes « bunker-buster » conçues pour percer les fortifications, visant un site composé de tunnels souterrains. Une frappe qui constitue un message fort et clair : si l’État libanais ne procède pas au démantèlement de l’infrastructure militaire du Hezbollah au nord du Litani, Israël poursuivra ses opérations militaires et pourrait même les intensifier.
Autre message à Beyrouth : il est futile d'attendre l’issue des négociations irano-américaines, car l’Iran sera au final contraint de faire toutes les concessions exigées par les États-Unis, y compris l’abandon de ses bras dans la région. Selon nos informations, le comité de surveillance avait informé avant la frappe l’armée libanaise de la nécessité de perquisitionner le site en question, mais le Hezbollah s’y est opposé catégoriquement, arguant que le site est situé au nord du Litani. Un tel scénario pourrait se reproduire ailleurs. Cela survient alors que des efforts sont en cours pour élargir les prérogatives de la Finul, comme le souhaite la mission israélienne à New York. Tel-Aviv voudrait notamment que la Finul ait la liberté de mouvement sans coordination avec l’armée libanaise, et puisse répondre par la force aux agressions subies par ses patrouilles. Israël tente d’obtenir l’appui américain et occidental pour faire adopter une nouvelle mouture du mandat lors de son renouvellement. Toutefois, la Russie et la Chine pourraient s'opposer à toute modification.
Trump puis Ortagus dans la région
Dans ce contexte, le Liban attend une visite de l’émissaire américaine Morgan Ortagus à la fin du mois, dans le cadre d’une tournée régionale. Selon les informations disponibles, l’objet de sa visite est de suivre les mesures prises par l’État libanais pour étendre pleinement sa souveraineté sur l’ensemble de son territoire, sans distinction entre le sud et le nord du Litani. La diplomate devrait réaffirmer le refus de toute partition de ce type et insister sur la nécessité d’un travail accru au nord du fleuve, notamment par l’installation de check-points fixes et mobiles de l’armée libanaise pour empêcher tout transfert d’armes ou de troupes du Hezbollah.Cette visite de l’émissaire américaine sera d’autant plus significative qu’elle interviendra après celle, entamée mardi, du président américain Donald Trump dans la région. Un déplacement très attendu qui devrait permettre de tracer les grandes lignes de la prochaine phase.Dans ce contexte tendu, les canaux de communication entre la présidence libanaise et le Hezbollah restent ouverts, notamment sur la question du désarmement du parti et l’élaboration d’une stratégie de défense nationale. Le président Joseph Aoun assure que le processus est en cours, qu’il est confiant dans sa capacité à résoudre ce dossier dans le calme, sans affrontement, et en misant sur le dialogue interne avec le Hezbollah.
Rencontre Salam-Khalil
Parallèlement, un entretien a eu lieu récemment entre le Premier ministre Nawaf Salam et le conseiller politique du secrétaire général du Hezbollah, Hussein Khalil, à l’initiative de ce dernier. Selon nos informations, M. Khalil souhaitait s’enquérir du projet de reconstruction et de la vision du gouvernement à ce sujet. Le Premier ministre lui a répondu qu’un montant de 250 millions de dollars a été alloué par la Banque mondiale pour la reconstruction des infrastructures, et que le gouvernement œuvre à porter cette enveloppe à un milliard de dollars. Le responsable chiite aurait alors demandé quelles régions seraient concernées par ces aides, et si la Banque mondiale exige que les fonds soient exclusivement destinés aux villages encore habités. Le Hezbollah redoute en effet que cela ne consacre de facto une « zone tampon » voulue par Israël, en empêchant le retour à la vie dans les villages frontaliers. Le chef du gouvernement a assuré que des démarches diplomatiques étaient en cours pour faire pression sur Israël afin d’obtenir un retrait total et permettre le retour de la vie dans tous les villages libanais.
Ils se réveillent aujourd'hui ..!
15 h 57, le 13 mai 2025