
Une liste de noms de candidats aux municipales, sur le sol d'un bureau de vote de Tripoli, devant un militaire, le 11 mai 2025. Photo Mohammad Yassine / L'OLJ
La journée électorale s'est avérée tendue dans plusieurs bureaux de vote du Liban-Nord et du Akkar dimanche, où se déroulaient les élections municipales, poussant le ministre de l'Intérieur, Ahmad Hajjar, en tournée à Tripoli, à affirmer que les forces de sécurité « n'hésiteront pas » à agir et procéder à des arrestations.
L'armée et la police ont, en effet, eu à séparer plusieurs bagarres et intervenir à de nombreuses reprises tout au long de la journée, notamment à Fneideq, dans le Akkar, où une dispute et un mouvement de foule ont eu lieu dans un bureau de vote pour femmes. Un soldat qui tentait de séparer les personnes impliquées a été « agressé », tandis qu'une autre personne a été blessée d'un coup de couteau. Pour apaiser les tensions, une patrouille des commandos de l'armée a été dépêchée sur place et plusieurs suspects ont été arrêtés. Le vote a continué sans interruption malgré ces tensions. Des incidents sont également survenus entre des délégués de listes concurrentes à Berqaël, dans le Akkar, rapporte notre correspondant Michel Hallak, et à Sfiré, dans le caza de Minié-Denniyé, où l'élection a été temporairement interrompue par une dispute dans le bureau de vote réservé aux femmes, qui a dégénéré en bagarre au cours de laquelle des chaises ont été brisées.
Garantir l'ordre public
À Bakhaoun, dans la région de Denniyé, où un premier incident avait été rapporté dans la matinée, la situation est restée tendue dans le courant de la journée, selon notre journaliste sur place, Lyana Alameddine. Des bousculades se sont produites devant les bureaux de vote, où les Forces de sécurité intérieure (FSI) tentaient de réguler l'afflux d'électeurs et des problèmes liés à la présence, au sein des bureaux, de délégués des différentes listes en lice, soutenues par deux députés de la famille Samad. Une femme de 29 ans, Rim Zaarouf, qui attendait depuis plus d'une heure et demie pour voter, a déploré ces disputes fréquentes qui ont perturbé le processus électoral. « De tels incidents ne devraient pas se produire », souligne-t-elle. Et devant un autre bureau de vote, réservé aux hommes, un délégué dénonce des irrégularités, notamment que « trois personnes décédées » ont voté pour la liste concurrente.
Par ailleurs, selon des informations de l'Agence nationale d'Information (ANI, officielle), une bagarre s'est produite dans le bureau de vote de l'école de Bhanine, entre des partisans de deux listes concurrentes. L'armée et la police sont intervenues pour séparer les personnes impliquées et rétablir le calme. À Mar Touma, une autre dispute a obligé les forces de sécurité à suspendre temporairement le processus électoral pour apaiser les tensions.
500 plaintes
En milieu de journée, depuis Tripoli, le ministre de l'Intérieur, Ahmad Hajjar, a commenté ces tensions, soulignant que les forces de l'ordre et l'armée « œuvrent à limiter » ces incidents. Il a appelé les électeurs à « faire cesser » ces tensions, affirmant que « les forces de sécurité n’hésiteront pas à intervenir et à arrêter toute personne coupable de violation ou de trouble à l’ordre public ». « Le ministère suit minute par minute les développements de la journée électorale dans toutes les régions, et toute infraction ou violation est immédiatement traitée », a ajouté M. Hajjar, qui a indiqué que son ministère traite toutes les plaintes reçues via la ligne d'urgence, notamment en ce qui concerne les accréditations des délégués des listes électorales. Lors de son intervention devant la presse, M. Hajjar a sèchement fait taire le mohafez du Liban-Nord Ramzi Nohra, qui commentait ses déclarations, en lui rétorquant qu'il était « en train de parler ». Cet échange a été largement médiatisé.
Le ministre Hajjar a également évoqué l'absence de personnel dans certains bureaux de vote, qui ont été remplacés par des fonctionnaires appelés en renfort. Des vidéos et témoignages faisant état de soupçons de fraude électorale et d’achats de voix ont en outre circulé dans plusieurs localités du Akkar, accompagnés d’un échange d’accusations entre différentes parties, rapporte notre correspondant. Ces éléments, dont l’authenticité n’a pas encore pu être vérifiée, ont été transmis aux services de sécurité compétents pour enquête. À Bakhaoun, une liste a accusé l'autre d'avoir manipulé les votes pour glisser dans l'urne des bulletins aux noms de personnes décédées.
Dans l'après-midi, Ahmad Hajjar a assuré dans une conférence de presse au ministère que le nombre de plaintes présentées pendant le scrutin aujourd’hui « ne dépasse pas les 500 dont la plupart sont d’ordre administratif ». Quant aux incidents qui ont eu lieu dans certaines localités, « leur nombre était élevé à cause de la dureté de la bataille et de l’enthousiasme excessif », a-t-il ajouté.
Plus tôt dans la journée, le ministère avaient indiqué que les plaintes avaient principalement été rapportées dans le Akkar et à Tripoli. 18 d'entre elles concernaient des problèmes liés à la « sécurité », tandis que plus de 250 étaient d'ordre administratif, comme à Btermaz, où le début du vote a dû être retardé faute d'isoloirs.
De son côté, l'Association libanaise pour des élections démocratiques (LADE) a dénoncé, dans une série de publications sur les réseaux sociaux basées sur des observations de ses représentants dans la région, de nombreuses infractions, notamment sur le silence électoral et le respect du secret du vote. L'association a, entre autres, relevé que les médias ont accompagné le député Tony Frangié derrière l'isoloir à Zghorta, que certains bureaux de vote permettaient aux électeurs de voter avec une copie de leur document d'identité et non leur version originale, et que des «pressions et intimidations» ont été exercées sur des électeurs.
Bureau de vote pour hommes et un autre pour femmes? Êtes-vous sûrs que cela se passe sur notre territoire libanais? Comment l’état peut approuver une telle aberration dans un pays qui lutte pour l’égalité hommes femmes. Sans parler des partis qui s’affublent de noms de jamaa islamya et de Parti socialiste national SYRIEN. on trouve ca normal?
11 h 01, le 12 mai 2025