
Le ministre libanais des Affaires étrangères Joe Raggi. Photo fournie par le bureau de presse du ministère
Le ministre libanais des Affaires étrangères Joe Raggi, s'exprimant dans le journal koweïtien al-Raï deux jours avant une visite officielle au Koweït avec le président de la République Joseph Aoun, a fait une introspection des crises diplomatiques des dernières années entre les pays du Golfe et le Liban, marquée par des boycotts commerciaux et tensions en raison de l'influence du Hezbollah sur la politique libanaise. Dans un entretien publié jeudi soir, M. Raggi estime que les pays du Golfe ont « eu raison de se vexer » des « politiques déviantes » du Liban au cours des dernières années.
Joe Raggi fait partie des ministres soutenus par les Forces libanaises, qui n'avaient plus participé aux gouvernements successifs depuis le grand mouvement de protestation anti-pouvoir d'octobre 2019, qui avait fait tomber le cabinet de Saad Hariri.
Nouvelle approche en matière de politique étrangère
Le chef de la diplomatie libanaise a déclaré à la presse koweïtienne que « le temps de notre isolement du monde arabe est révolu ». Selon lui, ce sont les « politiques déviantes » du pays au cours des dernières années qui ont provoqué la « déception des pays du Golfe », lesquels ont « eu raison de se vexer ». « Certaines circonstances ont éloigné le Koweït d'un Liban qui ne se ressemblait plus », a-t-il insisté. Toutefois, avec le mandat du président Joseph Aoun et le nouveau gouvernement de Nawaf Salam, la visite prévue à partir de dimanche permettra de montrer qu' « une nouvelle page est tournée et que les choses ont repris leur cours normal », a ajouté le chef du Palais Bustros.
« Avec le président Aoun, Nawaf Salam et le gouvernement, il est apparu à nos frères dans le Golfe et le monde arabe qu'il y a désormais une toute nouvelle approche en matière de politique étrangère », a-t-il ajouté. « Nous voulons restaurer la confiance des pays arabes et de la communauté internationale, après avoir été absents pendant des années de la scène internationale à cause de ce que certains d’entre nous ont fait contre nous-mêmes et contre le Liban », a-t-il indiqué.
Ces dernières années, les pays du Golfe ont à plusieurs reprises coupé leurs relations diplomatiques ou commerciales avec le Liban. Une de ces crises, en 2021, avait notamment été initiée par des déclarations de l'ancien ministre de l'Information, Georges Cordahi, concernant l'Arabie saoudite et les Émirats et leur soutien au gouvernement yéménite dans sa guerre contre les houthis. La diplomatie saoudienne avait ensuite dénoncé la mainmise du Hezbollah et de l'Iran sur le gouvernement, en pleines tensions irano-saoudiennes. Quelques mois plus tôt, l'Arabie saoudite avait suspendu tous les échanges commerciaux après qu'une cargaison de millions de pilules de captagon avait été retrouvée dans un port saoudien, dans des fruits (grenades) venues du Liban.
« Promesses sérieuses » du Golfe
Toutefois, depuis l'élection de Joseph Aoun le 9 janvier dernier et la formation du gouvernement de Nawaf Salam un mois plus tard, et alors que le Hezbollah a été fortement affaibli par la guerre l'ayant opposé à Israël depuis octobre 2023, le rétablissement des relations diplomatiques avec les pays du Golfe est placé en tête de priorité du gouvernement. Dans ce cadre, Joseph Aoun s'est déjà rendu à Riyad où il avait été reçu avec faste par le prince héritier Mohammad ben Salmane, avant d'être suivi par M. Salam qui s'y était rendu au moment de la fête de l'Adha. Le chef de l’État a également été reçu à Doha et Abou Dhabi.
Des visites qui semblent avoir porté leurs fruits puisque dimanche dernier, quelques jours après la réunion entre Joseph Aoun et Mohammad ben Zayed, Abou Dhabi levait l'interdiction faites à ses ressortissants de voyager au Liban, une décision formellement entrée en vigueur mercredi. À ce sujet M. Raggi a rappelé que la décision émiratie a une « dimension politique non-négligeable », qui témoigne d'une « volonté politique » d'ouverture envers Beyrouth et d'une « confiance en sa capacité à garantir la sécurité des visiteurs ». Il a dans ce cadre évoqué des « promesses sérieuses » d'autres pays du Golfe en vue de décisions similaires, sans mentionner lesquelles, alors que certains observateurs s'attendent à ce que l'Arabie saoudite autorise à nouveau dans un futur proche à ses ressortissants de se rendre au pays du Cèdre. Il a assuré que les autorités libanaises « font tout ce qui est nécessaire à tous les niveaux, pour que l'été soit prometteur et empêcher que la guerre ne revienne ».
« La position du Hezbollah complique les choses »
Le ministre Raggi a par ailleurs fait savoir que le gouvernement libanais « œuvre à restaurer l'autorité de l'État, mais avec prudence et sagesse », parce que cette question « ne peut pas être résolue du jour au lendemain ». Joseph Aoun et Nawaf Salam ont fait du monopole d’État sur les armes leur leitmotiv, sans cependant établir de calendrier pour un désarmement du Hezbollah. Ce dernier prône un « dialogue sur une stratégie de défense », mettant en garde contre toute décision unilatérale des autorités concernant son arsenal. À ce sujet, le ministre a estimé que « la position du Hezbollah complique les choses » pour obtenir un retrait israélien des positions encore occupées au Liban-Sud, alors que le parti chiite « pense renforcer la position du Liban ». Malgré tout, le pays « avance dans la bonne direction », a-t-il affirmé, saluant le « travail remarquable de l'armée » au sud du Litani, où elle « a démantelé près de 90 % des infrastructures militaires du Hezbollah et poursuit ses efforts, mais les choses demandent encore un peu de temps pour des raisons techniques. »
L'accord de cessez-le-feu entré en vigueur fin novembre 2024 après des mois de guerre entre le Hezbollah et Israël reste violé quasi quotidiennement par l'État hébreu qui, non seulement bombarde le Liban-Sud et la Békaa dans des attaques qui ont fait plus de 150 morts depuis le début de la trêve, mais continue d'occuper aussi cinq positions le long de la frontière, en territoire libanais.
Concernant les armes dans les camps palestiniens, Joe Raggi a affirmé que « la décision de désarmer les camps est prise sur le principe », et qu'il reste désormais à « définir un mécanisme d'application en accord avec l’Autorité palestinienne et les Palestiniens ». Le président palestinien Mahmoud Abbas est attendu au Liban le 21 mai dans ce contexte. De son côté, le Hamas a affirmé jeudi dans un communiqué « respecter pleinement le cessez-le-feu » avec Israël au Liban et coordonner son activité avec l'État libanais.
Ok ok… le ministre a raison sur toute la ligne. Mais vous mettez la CHARRUE DEVANT LES BOEUFS. Les milices mercenaires du Hezbollah sont armées et se baladent librement au dessus du Litani. Les organisations palestiniennes sont encore armées. Pour l’instant, ils ont reçu une raclée mais leur arrogance est tjrs là. Le calme n’est dû qu’aux négociations en cours entre USA et IRAN. A force de traîner dans le désarmement … Et c le but irano Hezbollah , ils essaient de se refaire une santé militaire…si les négociations US capotent ? Qui garantie qu’ils ne se lanceront pas dans une nouvelle guerre ?
17 h 48, le 12 mai 2025