
Le président de la République, Joseph Aoun, à Baabda, le 11 février 2025. Photo AFP/Anwar Amro
Le président de la République, Joseph Aoun, a affirmé dans un entretien accordé lundi à al-Jazeera que la décision concernant le monopole des armes par l’État « a été prise » et que « sa mise en œuvre se fera par le dialogue, loin de toute forme de recours à la force ».
S'exprimant à la veille de sa visite à Doha, le président libanais a indiqué que « des messages sont échangés avec le Hezbollah afin d’aborder la question du monopole des armes par l’État ». Il a affirmé que le parti chiite « est conscient de l’intérêt du Liban » et « que les circonstances internationales et régionales » contribuent à atteindre cet objectif. Le chef de l'Etat libanais a révélé que « le dialogue sur l’exclusivité des armes sera bilatéral entre la présidence de la République et le Hezbollah », et précisé que « la décision de limiter l'usage des armes à l’État a été prise et que sa mise en œuvre se fera par le dialogue, loin de toute forme de recours à la force ».« Nous avons besoin d’une stratégie de sécurité nationale qui protège le Liban et de laquelle découlera une stratégie de défense », a-t-il encore dit.
Le Hezbollah a perdu de son influence et de son pouvoir après la guerre l'ayant opposé à Israël ces derniers mois. Cette perte de vitesse a replacé en tête des débats la question de son arsenal. Le désarmement du parti chiite est l'une des mesures phares de la résolution onusienne 1701 mais n’a jusqu’à présent pas été mise en œuvre. Adoptée en 2006 à l’issue d’une précédente guerre entre Israël et le Hezbollah, ce texte confère explicitement à la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) et à l’armée libanaise le pouvoir d’opérer et de maintenir la paix le long de la Ligne bleue, qui délimite la frontière entre les deux pays. Elle stipule également que le Hezbollah doit être tenu à l’écart de la frontière, en échange du respect par Israël de la souveraineté libanaise. Cette résolution a servi de base à l’accord de cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah, entré en vigueur le 27 novembre dernier.
Au sud comme au nord du Litani...
M. Aoun a indiqué que l'armée libanaise « accomplit son devoir et est prête à assumer la responsabilité du contrôle des frontières ». « Il faut exercer des pressions sur Israël pour qu’il respecte ses engagements », a-t-il ajouté, soulignant que « les réalisations de l’armée sont importantes : des tunnels et des dépôts de munitions ont été découverts au sud comme au nord du Litani ». « L’armée continue de remplir sa mission au sud du Litani, démantèle des tunnels et saisit des armes sans que le Hezbollah ne s’y oppose », a-t-il assuré. À ce jour, près de 529 sites ont été identifiés et démantelés, selon les informations de L'Orient-Le Jour. Un chiffre qui comprend des caches d’armes aussi bien que des structures en place comme des lance-roquettes ou des rampes de missile, souvent visibles à l’œil nu.
Enfin, le président libanais a indiqué que « personne ne nous a proposé de normalisation avec Israël, et le Liban reste engagé par les résolutions du sommet de Beyrouth (adoption de l'« initiative de paix arabe » proposée par l'Arabie saoudite en 2002) et de la conférence de Riyad (en février 2025, portant sur un plan alternatif à celui proposé par Donald Trump pour l'avenir de Gaza)». Ces initiatives arabes conditionnent toute normalisation des relations avec Tel-Aviv à la résolution de la question palestinienne via la création d'un État palestinien dans les frontières de 1967. « Nous soutenons la formation d’un comité militaire, civil et technique pour la délimitation des frontières méridionales du Liban, et nous sommes également favorables à un retour à l’Accord d’armistice de 1949 », a-t-il ajouté.
Israël a affiché sa volonté de normaliser ses relations avec le Liban et propose la mise en place de « groupes de travail diplomatiques » entre les deux pays pour résoudre les dossiers en suspens, notamment le tracé de la frontière. Beyrouth refuse cette proposition, y voyant un pas vers la normalisation. Lors de sa visite au Liban la semaine dernière, l'émissaire américaine Morgan Ortagus a semblé comprendre ce point de vue, estimant que la normalisation entre Beyrouth et Tel-Aviv n'était pas une priorité pour le moment.
Un soldat tué et trois blessés
Par ailleurs, l'armée libanaise a annoncé lundi qu'un soldat a été tué, et trois autres blessés, dans l'explosion d'un engin, alors qu'ils opéraient dans la région de la vallée de Aaziyé. « Alors qu'une unité spécialisée de l’armée effectuait un relevé technique dans un site de la région de la vallée de Aaziyé, dans le caza de Tyr, un engin suspect a explosé, entraînant la mort d’un militaire et blessant trois autres, dont les blessures sont modérées » a expliqué l’armée libanaise, dans une publication sur son compte X. Selon les informations obtenues par notre correspondant au Liban-Sud, Mountasser Abdallah, l'incident a eu lieu lorsqu'un engin datant de la guerre avec Israël a explosé alors que les soldats tentaient de le neutraliser. Le soldat décédé est l'adjudant-chef Fadi el-Jassem. Les trois blessés au sein de la troupe sont quant à eux le lieutenant Rabih Hassan, le caporal Hussein el-Cheikh et l’adjudant-chef Hussein Ataya.
Le président Aoun a commenté cet incident, estimant qu'une « fois de plus, l'armée paie du sang de ses fils le prix de l'imposition de l'autorité de l'État sur le Sud et de l'instauration de la stabilité dans cette région, à travers l'application de la résolution 1701 ». Il a ajouté que ce « nouveau martyr confirme une fois de plus que l'institution militaire demeure le seul refuge pour tous les Libanais afin de préserver leur sécurité, leur sûreté et d'étendre la souveraineté sur le territoire libanais ». Le président a présenté ses condoléances au commandant en chef de l'armée, le général Rodolphe Haykal, pour la mort du soldat et a souhaité un prompt rétablissement aux blessés, a rapporté la présidence libanaise.
Un sénateur US reçu à Baabda
Lundi, le président Aoun a aussi reçu le sénateur américain Paul Grove, membre de la sous-commission des crédits étrangers du Sénat américain. Devant son invité, il a affirmé que le processus de mise en œuvre des réformes est « en cours » et qu'il est d'abord basé sur « l'intérêt du Liban » avant même de répondre à une « volonté de la communauté internationale ». Ces réformes, réclamées depuis des années pour garantir des aides financières, notamment du Fonds monétaire international, est « certainement dans l'intérêt du Liban bien avant que d'être basé sur le désir de la communauté internationale », a-t-il ajouté, selon des propos rapportés par la présidence sur son compte X. Parmi les réformes réclamées par le FMI, le projet de loi sur la restructuration du secteur bancaire a été approuvé samedi par le gouvernement et devrait être envoyé au Parlement en début de semaine, tandis que le projet de modification de la loi sur le secret bancaire a été approuvé le 27 mars et transmis aussi à la Chambre.
Pour sa part, le responsable américain, qui est issu des rangs républicains, a souligné que Washington « continue de fournir de l'aide pour soutenir le Liban ». Si les États-Unis sont un important bailleur de fonds du pays du Cèdre, notamment en soutenant financièrement et avec du matériel l'armée libanaise et une partie de la population via des programmes d'aides, la politique de la nouvelle administration américaine concernant les aides financières internationales pourrait remettre en question ce soutien. Le Liban fait partie d'une liste brève de bénéficiaires d'aides américaines, versées via le Programme alimentaire mondial de l'ONU, qui ont été jusque-là exemptés des coupes budgétaires américaines. Paul Grove avait été reçu dimanche par le commandant en chef de l'armée libanaise, le général Rodolphe Haykal, pour discuter du soutien américain à l'institution militaire.
La décision à été prise par qui ? Notre cher président oublie de dire"par Israël "
14 h 06, le 15 avril 2025