Dans une église d'Alep, en Syrie, des fidèles chrétiens ont assisté à une messe quelques jours après le passage de leur ville sous contrôle des forces rebelles islamistes, qui tentent d'apaiser les inquiétudes au sein de la minorité chrétienne.
« En dépit des circonstances à Alep, nous avons tenu à célébrer comme chaque année la Sainte Barbe », fêtée le 4 décembre, dit Thérèse Kalaghasi, une femme de 60 ans. « Nous prions pour la paix dans notre pays », ajoute-t-elle au cours de la messe célébrée dans l'église Sainte Barbe des Arméniens catholiques dans le quartier à majorité chrétienne de Sleimaniyé.
L'entrée la semaine dernière des rebelles, conduits par les combattants de Hayat Tahrir al-Cham (HTC), d'anciens jihadistes, a provoqué l'inquiétude dans la deuxième ville de Syrie. La majorité des quelque deux millions d'habitants d'Alep sont des musulmans mais elle compte également une minorité chrétienne qui a décliné depuis le début de la guerre civile en 2011. Dans son homélie devant les quelques dizaines de fidèles, l'archevêque Boutros Marayati tente de les rassurer. « N'ayez pas peur, chers frères, nous avons reçu des assurances de toutes les parties. Continuez à vivre normalement et tout restera comme avant, et même mieux », dit-il.
Au début de la guerre civile, 200.000 chrétiens parmi lesquels 50.000 Arméniens vivaient à Alep, selon les estimations. Leur nombre est aujourd'hui tombé à 30.000, parmi lesquels seulement 10.000 Arméniens, en raison d'une émigration massive, notamment vers l'Occident, selon des sources au sein de la communauté.
« La vie commence à reprendre »
« A notre grand étonnement, le comportement des nouveaux occupants d'Alep est complètement différent de ce à quoi on s'attendait », dit un habitant chrétien, joint par téléphone et qui a requis l'anonymat. « Tous les discours qu'ils tiennent, c'est pour dire qu'ils ne sont pas là pour nous faire souffrir. Ils sont là pour nous aider. Ils disent +tout ce qu'on veut, c'est faire tomber le régime d'Assad+ », ajoute-t-il en référence au président Bachar el-Assad.
Le nouveau maître d'Alep, Abou Mohammad al-Jolani, chef de HTC qui est issu de la banche syrienne d'el-Qaëda, qui s'est rendu à Alep mercredi, a demandé dans un communiqué sur Télégram à ses combattants de « calmer les inquiétudes de notre peuple, de toutes les communautés ». « Alep a toujours été le point de rencontre des civilisations et des cultures et le restera, et a une longue histoire de diversité culturelle et religieuse », a-t-il dit.
L'habitant qui a requis l'anonymat indique que les rebelles « se sont réunis avec les évêques » pour leur demander de les avertir de « la moindre exaction » de la part des combattants. « Les gens qui avaient peur commencent à sortir et (...) la vie commence à reprendre », ajoute-t-il.
Selon une source de la communauté chrétienne, des représentants des rebelles se sont rendus après leur entrée dans la ville dans un couvent et un hôpital tenus par des religieux pour leur assurer qu'ils ne leur voulaient pas de mal.
L'appel de Jolani à ne pas fuir
Mercredi, Jolani a outre appelé les habitants de Mharda, une localité à majorité chrétienne du centre de la Syrie, à ne pas fuir devant la progression de ses combattants. « Nous veillerons à vous protéger et à préserver vos biens », a-t-il dit dans un communiqué.
La communauté chrétienne de Syrie a globalement soutenu le régime depuis le début de la guerre civile, le président Assad -- lui-même issu d'une minorité musulmane, les Alaouites -- s'étant érigé en protecteur des minorités. Elle a notamment souffert lorsque le groupe jihadiste Etat islamique avait étendu son emprise sur des pans du territoire syrien. Les chrétiens avaient alors été pris pour cibles par l'EI qui avait eu recours aux enlèvements de masse et à la destruction d'églises, avant d'être défait en 2019.
Dans une déclaration à un média italien, le cardinal Mario Zenari, nonce apostolique à Damas, a appelé à garder les chrétiens de Syrie à l'égard des conflits. Il a souligné que l'Eglise avait perdu dans ce pays les deux-tiers de ses fidèles au cours de la guerre, en raison de l'émigration massive des chrétiens.
Les chrétiens étaient en sécurité jusque là. Pour le moment les rebelles et jihadistes font patte blanche, on verra combien de temps durera la lune de miel. Il ont du souci à se faire. Et dire que les occidentaux s'en réjouissent ! Quelle naïveté !
09 h 56, le 08 décembre 2024