Avant que les contours d’un possible cadre pour un accord de trêve entre le Hezbollah et Israël n’aient commencé à être dévoilés dans les médias, cette journée du mercredi 25 septembre a de nouveau été marquée par d’importantes actions militaires lancées par les deux protagonistes de ce conflit, qui ont une fois de plus dépassé les limites existantes depuis le 8 octobre 2023.
Le Hezbollah a tiré, tôt mercredi matin, un missile vers Tel-Aviv contre le quartier général du Mossad, accusé d'être «responsable de l'assassinat des dirigeants» du parti « et des explosions des bipeurs et des talkies-walkies ».
Parallèlement, l'armée israélienne poursuivait son pilonnage meurtrier du Liban-Sud et de la Békaa, poussant des dizaines de milliers de personnes à fuir ces régions. Des frappes ont également eu lieu dans le Chouf, mais aussi plus au nord, dans les cazas du Kesrouan et de Jbeil, à chaque fois contre des villages chiites.
Vers 15h, les frappes de la matinée avaient déjà fait plus de 50 morts et plus de 200 blessés, selon un bilan encore provisoire diffusé mercredi vers 17h.
Mercredi après-midi, le chef du commandement de l'armée israélienne du Nord a déclaré que la confrontation avec le Hezbollah était entrée dans une « phase différente » et que l'armée israélienne devait se préparer à une « manœuvre terrestre ». L'armée a également annoncé le rappel de deux brigades de réserve « pour des activités opérationnelles » qui vont être déployées dans le nord du pays. Et tandis que les échos d’une possible voie diplomatique se multipliaient, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a soufflé un vent contraire en promettant qu’Israël utiliserait la force jusqu'au retour des déplacés du nord d'Israël, tandis que le chef d’état-major, Herzi Halevi, évoquait une possible entrée au Liban en s’exprimant devant des soldats d'une unité de blindés.
Sur le terrain
du côté du Hezbollah
Tôt mercredi matin, le Hezbollah a annoncé avoir tiré un missile balistique sur Israël, affirmant avoir visé le quartier général du Mossad, près de Tel-Aviv, à une centaine de kilomètres au sud de la frontière avec le Liban. Le Hezbollah a précisé qu'il s'agissait d'un missile Qader, visant le QG des services de renseignements extérieurs israéliens, accusés d'être « responsables de l'assassinat des dirigeants » du Hezbollah et des explosions des bipeurs et des talkies-walkies.
Ce tir de missile sol-sol constitue une « escalade » de la part du Hezbollah, a déclaré un porte-parole de l'armée israélienne, le lieutenant-colonel Nadav Shoshani, lors d'un point presse.
Dans l'après-midi, le Hezbollah a revendiqué de nouvelles frappes. Il s'agit de deux frappes contre Kiryat Motzkin, au nord de Haïfa, avec « des salves de missiles Fadi-1 », et une autre frappe contre une usine d'explosifs de Zikhron Yaakov, au sud de Haïfa, à une soixantaine de kilomètres de la frontière, avec « une salve de roquettes Fadi-3 ». Ce site avait déjà été visé par le parti chiite dans la nuit de lundi à mardi.
En début de soirée, le parti chiite a revendiqué deux nouvelles attaques. La première a visé le site de Ramia (face à Ramiyé, Bint Jbeil) avec des « armes adéquates », tandis que la seconde a ciblé la caserne de Branit (face à Rmeich, Bint Jbeil) avec des « obus d’artillerie lourde ».
Du côté israélien
Vers 17h, l'armée israélienne a affirmé avoir frappé 280 cibles du Hezbollah ce mercredi, dont des sites de lancement qui servaient à atteindre des localités israéliennes. Vers 16h, elle avait affirmé avoir frappé 60 cibles des services de renseignements du Hezbollah au Liban. Dans l'après-midi, le chef du commandement de l'armée israélienne du Nord, le général de division Uri Gordin a déclaré que la confrontation avec le Hezbollah était entrée dans une « phase différente » et que l'armée israélienne devait se préparer à une « manœuvre terrestre ». L'armée israélienne a également annoncé le rappel de deux brigades de réserve « pour des activités opérationnelles » qui vont être déployées dans le nord du pays. Les bombardements se poursuivaient en début de soirée avec près d’une dizaine de sites touchés par heure, selon les rapports de notre correspondant Mountasser Abdallah : Ghandouriyé, Kantara, Kherbet Selem et Zebkine, ainsi que Houmine el-Faouqa, Bissariyé, Mahrouna, Bourj el-Chemali, Masaken, Deir Aames, Adayssé, Kfar Kila, Majdel Zoun, Kafra, Yater et Zawtar el-Charqiyé, faisant partie des localités dont les territoires ont été ciblés.
Au Liban-Sud et dans la Békaa
Quelques heures après avoir annoncé l'interception du missile, l'armée israélienne a indiqué qu'elle menait des frappes de « grande envergure » dans le sud du Liban. De fait, l'aviation israélienne a bombardé tout au long de ce mercredi, pour la troisième journée consécutive, des villages du sud du Liban et la région de Baalbeck. L'Agence nationale d'information (ANI, officielle) a fait état d'un nombre indéterminé de victimes. Le dernier bilan provisoire officiel, publié mardi soir, des frappes israéliennes menées depuis lundi fait état de 569 morts, dont 50 enfants, et des milliers de blessés. En soirée, Israël a aussi frappé Douress, la périphérie de Baalbeck et celle de Hermel.
Dans d'autres zones
Peu après 11h30, une frappe a visé pour la première fois le village de Maaysra, dans le Kesrouan. Elle a fait au moins trois morts. Maaysra est un village chiite dans cette région majoritairement chrétienne, au nord de Beyrouth. L'habitation touchée à Maaysra est la propriété d’un membre du Hezbollah, Ali Amro, qui avait été tué dans une frappe israélienne sur Houla le 4 août, indique notre correspondant, Michel Hallak. Israël avait déjà bombardé, lundi, les confins chiites des cazas de Jbeil, du Kesrouan et du Metn.
À Jbeil, l'aviation israélienne a frappé au niveau de Ras Osta et Bechtelida, deux villages chiites dans les hauteurs du caza de Jbeil, selon notre correspondant Michel Hallak. Des ambulances se sont rendues sur les lieux et ont porté secours à deux blessés.
Une frappe a également visé Joun, dans la région du Chouf, au sud de Beyrouth, à près de 60 kilomètres de la frontière. Dans la nuit de mardi à mercredi, un raid israélien avait visé la localité de Saadiyate, près de Jiyé, sur la côte du Chouf, à une vingtaine de kilomètres au sud de Beyrouth.
Exode et appels des ambassades
Depuis lundi, des dizaines de milliers de familles ont dû fuir le Liban-Sud et la Békaa. Certaines ont été installées dans des écoles et des instituts transformés en refuges. Mercredi soir, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), affiliée aux Nations unies, a indiqué que le Liban comptait au moins 90 530 nouveaux déplacés. Environ 40 000 d'entre eux seraient répartis dans 283 abris ou centres d'hébergement. Dans ce contexte tendu, circulent de plus en plus de fausses informations sur des menaces de frappes israéliennes dans plusieurs coins du pays.
Certaines ambassades ont appelé leurs ressortissants à quitter le Liban. Le gouvernement britannique a annoncé mardi l'envoi de militaires à Chypre pour préparer une possible évacuation de ses ressortissants du Liban. Le Kremlin a exhorté les ressortissants russes à quitter le Liban dès que possible pour leur propre sécurité, en empruntant des vols commerciaux.
Le conflit continue de faire réagir et d’agiter les sphères diplomatiques.
Les réactions
Le président du Parlement libanais Nabih Berry a déclaré au quotidien arabophone basé à Londres Asharq al-Awsat que les prochaines 24 heures seront décisives pour parvenir à une solution diplomatique entre Israël et le Hezbollah. Il a assuré que lui-même et le Premier ministre, qui est actuellement à New York pour l'Assemblée générale de l'ONU, multiplient les efforts dans ce sens en « coopération avec les États-Unis ».
Le Conseil de sécurité de l'ONU devait se réunir en urgence mercredi, à la demande de la France, à New York où l'inquiétude face à l'escalade entre l'armée israélienne et le Hezbollah a dominé l'ouverture de l'Assemblée générale des Nations Unies.
« Israël pousse la région vers une guerre ouverte », ont averti les chefs de la diplomatie d'Égypte, d'Irak et de Jordanie, condamnant « l'agression israélienne sur le Liban ».
Le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, a déclaré mercredi que l'assassinat récent au Liban de commandants du Hezbollah par Israël ne pouvait pas mettre « à genoux » le mouvement chiite.
« Je suis attristé par les nouvelles provenant du Liban où d'intenses bombardements ont provoqué ces derniers jours de nombreuses victimes et destructions, et je souhaite que la communauté internationale fasse tous les efforts possibles pour mettre un terme à cette terrible escalade. C'est inacceptable », a déclaré le pape François à l'issue de l'audience générale de mercredi. « J'exprime mon soutien au peuple libanais qui a déjà trop souffert dans un passé récent », a ajouté François appelant à prier « pour tous les peuples souffrant à cause de la guerre ».
À l'Assemblée générale de l'ONU, le président américain Joe Biden a déclaré qu’« une guerre totale n’était dans l’intérêt de personne » et qu’« une solution diplomatique était encore possible ».
« Le Liban est au bord du gouffre », avait lancé mardi le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, réclamant un cessez-le-feu dans la bande de Gaza où la guerre « menace d'emporter toute la région dans le chaos ».
Le chef de l'Unrwa, l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens, Philippe Lazzarini, a, pour sa part, dit craindre « une guerre à part entière » et que le Liban devienne comme la bande de Gaza.
Le contexte
Depuis lundi, d'intenses frappes israéliennes visent les bastions du Hezbollah dans le sud et l'est du Liban ainsi que dans la banlieue sud de Beyrouth, faisant près de 600 morts, selon les autorités libanaises, et poussant des dizaines de milliers de Libanais sur les routes.
Le Hezbollah a confirmé mercredi qu'un de ses responsables militaires, Ibrahim Mohammad Kobeissi, avait été tué dans un bombardement israélien mardi sur la banlieue sud de Beyrouth, qui a fait au total six morts et 15 blessés selon les autorités libanaises.
Dans ce contexte, les écoles et universités resteront fermées jusqu'à la fin de la semaine au Liban. De nombreuses compagnies aériennes ont suspendu leurs vols vers Beyrouth.
Israël avait annoncé à la mi-septembre avoir déplacé « le centre de gravité de (ses) opérations militaires » vers le nord du pays, le long de la frontière libanaise, pour permettre le retour de dizaines de milliers d'habitants déplacés par les violences transfrontalières.
Le Hezbollah a, de son côté, promis de continuer à attaquer Israël « jusqu'à la fin de l'agression à Gaza », où la guerre a été déclenchée le 7 octobre 2023 par l'attaque sans précédent du mouvement Hamas sur le sol israélien. Depuis, les échanges de tirs n'ont pas cessé le long de la frontière nord d'Israël avec le Liban. Ces tirs ont gagné en intensité depuis la vague d'explosions meurtrières des appareils de transmission du Hezbollah, attribuée à Israël, les 17 et 18 septembre au Liban, puis une frappe israélienne le 20 septembre sur la banlieue sud de Beyrouth, qui a décapité l'unité d'élite du mouvement.
N'importe quel béotien peut tirer sur son voisin, mais seuls des êtres humains d'exception peuvent imposer la paix. La paix, ce mot magique que personne n'ose utiliser dans notre région et qui est pourtant la seule solution capable d'assurer un avenir viable à tous les peuples de la région. J'espérais une initiative des érudits et des braves dans ce sens mais mes appels sont restés sans réponse. Le fait de sacrifier le Liban aux intérêts de la Théocratie persane me semble participer davantage d'un crime que d'un choix politique. Une orientation que 2 Libanais sur 3 refusent. Journaliste.
20 h 04, le 25 septembre 2024