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Société - Étude

Deux tiers des Libanais présenteraient au moins un trouble mental

Le Dr Élie Karam, fondateur d’IDRAAC, détaille pour « L'Orient-Le Jour » les résultats inquiétants d’une étude effectuée en 2022. 

Deux tiers des Libanais présenteraient au moins un trouble mental

Un jeune Libanais passe devant une fresque murale où est écrit « Nous sommes fatigués » dans la ville libanaise de Tripoli, le 28 avril 2020. Photo AFP

Présentés lors d’une conférence jeudi, sous le thème de « La santé mentale au Liban suite aux crises multiples » et en collaboration notamment avec le ministère de la Santé, les résultats d’une étude effectuée en 2022 par l’ONG libanaise IDRAAC (Institute for Development, Research, Advocacy, and Applied Care), fondée par le psychiatre et chercheur Élie Karam, est venue confirmer l’impact dévastateur sur la santé mentale des Libanais des crises des cinq dernières années.

Menée en collaboration avec l'institut de sondage Ipsos, l’étude a sondé un échantillon représentatif de la société libanaise formé de 1 000 interviewés. Et le principal résultat est éloquent : les deux tiers de la population libanaise, ou quelque 65 %, souffriraient d’au moins un trouble mental, qu’il s’agisse de dépression, de cas d’angoisse ou de troubles post-traumatiques

« Quand je suis rentré au Liban il y a plus d’une trentaine d’années, j’étais sidéré par le manque de données sur la santé mentale », raconte Élie Karam, qui entreprend alors le projet d’une étude qui sera finalement publiée en 2006, avec le concours de l’université américaine Harvard, qui avait entrepris un projet dans toute la région. Réitérant l’expérience en 2022, les résultats de l’étude étonnent le psychiatre, qui ne s’attendait pas à des chiffres aussi élevés.

Une « catastrophe »

« Nous avons trouvé que deux tiers des Libanais présenteraient au moins un trouble mental », affirme ainsi Élie Karam. Des troubles qui seraient notamment issus de la crise économico-financière, l’explosion du 4 août ou encore de la pandémie de Covid-19, l’actuel conflit avec Israël au Liban-Sud n’avait pas encore commencé lors de cette étude. Ils ont trouvé que plus les personnes ont été affectées par l’un ou l’autre ou plusieurs de ces événements, plus le risque de trouble est grand. 

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« Les questions que nous avons posées donnent une idée probable sur la santé mentale des interviewés parce que pour avoir une idée certaine, il faut des entretiens en face à face », précise Élie Karam. « Nous avons posé des questions comme celles de savoir si l’interviewé arrive à boucler ses fins de mois, s’il considère que les occasions sociales deviennent un problème, si son avenir est assuré… Et nous avons établi un score », explique-t-il. Plus le score est élevé, plus le risque de dépression, d’angoisse ou de trouble post-traumatique est important. Et le problème, ajoute-t-il, c’est que chacun de ses troubles pourrait entraîner l’apparition des autres.

Le Dr Élie Karam, psychiatre et fondateur d'IDRAAC. Photo DR

Le Dr Karam n’hésite pas à qualifier ces résultats de « catastrophe », étant donné l’impact sur le rendement professionnel, sur les relations sociales dans toutes leurs ramifications, sur la qualité de vie. La précédente étude d’IDRAAC avait trouvé que 85 % des Libanais atteints de troubles mentaux sévères ne consultaient pas de professionnels. L’actuelle étude n’apporte pas de réponse à cette question. Le manque d’accès à des médicaments à prix raisonnable, malgré les efforts du ministère de la Santé dans certains dispensaires, ajoute aux obstacles qui se dressent face aux Libanais.

Un autre facteur aggravant vient freiner les voies vers le traitement, même quand les moyens financiers existent : le chercheur cite cette morosité ambiante qui normalise les troubles mentaux, tant et si bien que ceux qui en souffrent ne savent pas toujours les reconnaître dans le mal-être qu’ils ressentent. Les dangers d’un trouble mental non traité sont « multiples », selon le spécialiste, allant d’une chute du rendement au travail, aux problèmes relationnels de toutes sortes, à l’abandon des projets d’avenir, à l’accoutumance aux drogues et à l’alcool…

« Nous remarquons ainsi un laisser-aller autant au niveau de l’individu que de la population », souligne le chercheur. Selon lui, tous les profils interrogés sont affectés, un peu plus les femmes que les hommes, ce qui correspond à une constatation mondiale.

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Le traitement, passage obligé

La principale recommandation du psychiatre à l’intention de personnes souffrant de troubles mentaux est de consulter des professionnels, parce que c’est la seule façon d’alléger la pression. À une question sur les difficultés économiques qui peuvent freiner l’accès au traitement, Élie Karam rappelle que des associations comme IDRAAC et d’autres offrent des services de consultations gratuits. « Quand on se rend compte qu’on souffre d’un trouble mental, il faut faire son possible pour se diriger vers un spécialiste, quitte à commencer par parler à son médecin de famille, qui pourrait nous rediriger vers quelqu’un d’autre », souligne-t-il.

Le Dr Karam insiste également sur la nécessité de faire face à cette situation et à en être conscient. « Il est fondamental de mettre en place au niveau national des solutions en profondeur, qui pourraient s’étaler sur des années », dit-il, précisant que le ministère de la Santé participe à la conférence qui se tient jeudi soir pour annoncer les résultats de l’étude et explorer les solutions possibles. Pour sa part, il compte se lancer dès que possible dans une nouvelle étude qui approfondira les résultats obtenus par celle-ci.

Présentés lors d’une conférence jeudi, sous le thème de « La santé mentale au Liban suite aux crises multiples » et en collaboration notamment avec le ministère de la Santé, les résultats d’une étude effectuée en 2022 par l’ONG libanaise IDRAAC (Institute for Development, Research, Advocacy, and Applied Care), fondée par le psychiatre et chercheur Élie Karam, est venue...
commentaires (9)

Tous les libanais affectés par les répétitives crises provoquées par leurs dirigeants véreux connaissent le remède de leur maladie. Il consiste à arrêter et juger tous les responsables de leurs malheurs qui n’en finit pas de les enfoncer dans leurs dépressions pour qu’enfin ils puissent prétendre à une résilience. Ce se ferait en deux temps trois mouvements. Les pays aidants doivent avoir la volonté de les aider et non des paroles en l’air. Cela ne soulage pas leurs souffrances, bien au contraire.

Sissi zayyat

12 h 07, le 13 septembre 2024

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Commentaires (9)

  • Tous les libanais affectés par les répétitives crises provoquées par leurs dirigeants véreux connaissent le remède de leur maladie. Il consiste à arrêter et juger tous les responsables de leurs malheurs qui n’en finit pas de les enfoncer dans leurs dépressions pour qu’enfin ils puissent prétendre à une résilience. Ce se ferait en deux temps trois mouvements. Les pays aidants doivent avoir la volonté de les aider et non des paroles en l’air. Cela ne soulage pas leurs souffrances, bien au contraire.

    Sissi zayyat

    12 h 07, le 13 septembre 2024

  • Ça ne serait pas plutôt le tiers restant, c’est à dire celui qui reste stoïque, indifférent et non-affecté par les crises successives du Liban, qui devrait se faire soigner?…

    Gros Gnon

    08 h 28, le 13 septembre 2024

  • la depression n est pas un trouble mental....c est le resultat des conditions de vie horribles au Liban . Un trouble mental est un desequilibre qui empeche l individu de voir la realite comme elle est....

    Kantar Maan

    00 h 23, le 13 septembre 2024

  • "Ils ont trouvé que plus les personnes ont été affectées par l’un ou l’autre ou plusieurs de ces événements, plus le risque de trouble est grand. " Euh, comme c'est étonnant.

    Christine KHALIL

    22 h 43, le 12 septembre 2024

  • Pourriez-vous référencer les études mentionnées par le Docteur ? Merci

    Maria

    22 h 39, le 12 septembre 2024

  • En effet.. les palliatifs et traitements rendent l'impact moins violent, mais les dégâts psychiques atteignent notre appareil à penser tant que la justice n'a pas obtempéré.

    charabaty mona

    22 h 31, le 12 septembre 2024

  • Cher Dr Karam, Comme beaucoup de Libanais, je suis atteint d'un trouble mental pour lequel aucun psychiatre n'a de traitement valable. Le seul traitement efficace serait de voir tous les mafieux, milichiens, bandits et assassins de la republique derriere les barreaux.

    Michel Trad

    19 h 13, le 12 septembre 2024

  • "Le traitement, passage obligé". N'importe quoi. Nous avons tous des problèmes que nous apprivoisons plus ou moins bien un jour après l'autre. Il me rappelle Knock: "tout homme sain est un malade qui s'ignore".

    M.E

    18 h 32, le 12 septembre 2024

  • 2/3 des libanais l’était déjà bien avant

    M.J. Kojack

    17 h 38, le 12 septembre 2024

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