Voilà plus de trois ans que j’observe ce qui reste dans mon cœur le plus beau des pays mais dont je me suis éloignée par l’esprit au point que le sort que ses cruels prédateurs lui réservent m’importe peu. À la façon d’un corps malade rongé par un mal incurable, il se meurt de l’intérieur, dévoré par un parasite étranger qu’aucun anticorps ne combat.
Mon beau pays, celui de mon enfance, n’existe déjà plus, la réconciliation entre ses habitants est une utopie impossible à construire. Seule la séparation des populations peut éviter le bain de sang ou l’épuration définitive des chrétiens.
Ces jours-ci marquent une nouvelle décennie dans ma vie. Si je ne regarde pas trop en arrière par nostalgie, j’essaie de me concentrer vers le futur qui appartiendra à mes enfants. Comment ne pas s’interroger sur les nuages menaçants qui couvrent la région ? Comment parler à mes enfants d’amour, de paix, de sérénité quand l’histoire de ce Moyen-Orient est faite de peuples qui s’entredéchirent depuis des millénaires, d’envahisseurs et de conquérants qui ont pillé, violé, volé, massacré sans relâche ? Des Mèdes aux Perses, des Ottomans aux Arabes, des Huns aux Mamelouks, des Grecs aux Turcs, des croisés aux haschaschins, des Chaldéens aux Byzantins, de Daech à al-Qaïda, de dictateurs en tyrans, d’imams en templiers, au nom des dieux grecs, au nom de Yahvé, de Jésus, d’Allah.
Comment expliquer à mes enfants que cette région a vécu une interminable succession de massacres et de persécutions alors qu’ici a résonné la voix de Yahvé qui a fait dire à Moïse « Aime ton prochain comme toi-même », celle de Jésus : « Aimez-vous les uns les autres », celle d’Allah par le biais de Mohammad : « Qui tue un homme détruit un monde » ?
Même Aphrodite, la déesse de l’Amour qui est née dans la belle île où nous habitons désormais, a provoqué une guerre entre les Grecs et Troie.
Comment donner à mes enfants l’amour d’un pays dont ils ont le passeport, dont ils se délectent de la cuisine et dont ils connaissent les subtilités de la langue, mais dont ils ont honte de la classe politique et de ses diverses veuleries, lâchetés et complicités ?
Comment leur raconter l’histoire de leur pays, de leurs ancêtres, quand je n’ai moi-même que dégoût quand je vois un État étranger décider à la place du gouvernement de la politique étrangère du Liban, avec un mépris total pour la volonté de son peuple ?
Avec les oliviers et le pétrole, la région semble avoir pour spécialité la production de dictateurs fous qui ont pour seuls projets la destructions de tels ou tels peuples.
N’y a-t-il personne pour arrêter tous ces faiseurs de guerres, ces amoureux de la mort ?
Pour mon anniversaire, je vais m’offrir un billet pour aller loin, très loin de cette région où je n’ai plus aucun espoir de trouver la paix…
Elon Musk a ouvert une agence de voyages… un billet pour Mars me tente très fort !
Chypre
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Très intéressant j’ai des larmes aux yeux
15 h 41, le 09 août 2024