Des combattants de la branche armée du Hamas en 2016. Mahmoud Hams/AFP
« La victoire est en vue. » Tel était le ton du discours que tenait le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu le 24 juillet dernier devant le Congrès américain. Alors qu'il fait face à une pression internationale croissante pour accepter un cessez-le-feu et un accord sur la libération des otages à Gaza, il a déclaré à plusieurs reprises que les forces israéliennes s'approchent de leur objectif déclaré d'« éradiquer le Hamas » et de « détruire ses capacités militaires ».
Un narratif alimenté la semaine dernière par les coups sévères portés au mouvement palestinien par Israël, en assassinant deux de ses figures les plus importantes : Ismaïl Haniyé, leader de sa branche politique tué mercredi 31 juillet à Téhéran, et Mohammad Deif, principal commandant militaire du Hamas, dont la mort a été annoncée par l'armée israélienne mais non confirmée par le Hamas.
Sauf que si l'on en croit les dernières révélations de CNN, le mouvement palestinien est encore loin d'avoir dit son dernier mot. Dans une longue enquête publiée lundi par la chaîne américaine, l'on apprend que « près de la moitié des bataillons militaires du Hamas situés dans le nord et le centre de Gaza » auraient « reconstitué en partie leurs capacités de combat », malgré plus de neuf mois de guerre menée par Israël contre l'enclave palestinienne.
Des capacités de reconstitution intactes
Ces conclusions sont fondées sur des analyses des opérations militaires du Hamas depuis le 7 octobre, s'appuyant sur des déclarations militaires israéliennes et du groupe armé, des images du terrain et des interviews avec des experts et des témoins oculaires. Ces éléments démontrent que plusieurs unités ont fait un retour dans des zones-clés dégagées par l'armée israélienne après des batailles acharnées et des bombardements intensifs, récupérant les restes de leurs bataillons dans une tentative désespérée de reconstituer leurs rangs.
« Les Israéliens affirment avoir nettoyé des zones alors qu'ils n'ont pas du tout vaincu tous les combattants qui s'y trouvent », a déclaré à CNN Brian Carter, gestionnaire du Middle East Portfolio Manager for Critical Threats Project (CTP).
L'aile militaire du Hamas, connue sous le nom de Brigades al-Qassam, est selon le CTP divisée en 24 bataillons répartis sur l'ensemble du territoire, selon l'armée israélienne. Au 1ᵉʳ juillet, seuls trois de ces 24 bataillons auraient été rendus « inaptes au combat », ce qui signifie qu'ils ont été détruits par l'armée israélienne.
En revanche, huit bataillons seraient toujours « efficaces au combat », c'est-à-dire capables de mener des missions contre les soldats israéliens sur le terrain à Gaza, tandis que les 13 autres se trouveraient dans une situation « dégradée », à savoir dans la capacité de ne mener que des attaques sporadiques et largement infructueuses de type guérilla.
16 bataillons actifs sur 24
Les analyses démontrent ainsi que le Hamas a pu reconstituer 16 de ses bataillons dans le centre et le nord de Gaza, qui sont pourtant les cibles les plus anciennes de l'armée israélienne depuis le début de leur offensive. « Si les bataillons du Hamas étaient en grande partie détruits, les forces israéliennes ne se battraient pas encore. Cela montre que la capacité du Hamas à reconstituer ses forces de combat est intacte », a déclaré à CNN le colonel Peter Mansour, retraité de l'armée américaine, qui a contribué à superviser le déploiement de 30 000 soldats américains supplémentaires en Irak en 2007. « Les experts militaires américains ont à maintes reprises conseillé à Israël de distinguer nettement le Hamas des civils pour empêcher ses éléments irréconciliables de se reconstituer », ajoute-t-il.
Des sources palestiniennes présentes sur place citées par CNN affirment par ailleurs que « des membres du Hamas en civil supervisent des marchés détruits, réaffectent des bâtiments brûlés en sites pour militants et fonctionnaires, et cachent leurs armes sous les débris ».
« La présence du Hamas dans le nord de Gaza est plus forte que vous ne pouvez l'imaginer. Ils sont parmi les civils. Cela les aide à reconstruire leurs forces », ajoute l'un d'entre eux ayant récemment fui la région après avoir perdu près de 40 membres de sa famille dans une frappe aérienne israélienne. Un autre Palestinien indique avoir vu une prison de fortune dirigée par le Hamas dans Gaza-ville, où des Palestiniens accusés de pillage seraient détenus. « Pour punir les voleurs, ils leur attachent les mains et leur bandent les yeux, a-t-il dit. Ils ont transformé une pièce calcinée en cellule de prison et ils ont placé là un seau pour leurs besoins. »
Israël affirme avoir tué la moitié des commandants du Hamas et plus de 14 000 combattants à Gaza. Des chiffres contestés par le mouvement palestinien, bien qu'il n'ait pas fourni de décompte des victimes parmi ses rangs. « Partout où le Hamas se manifestera, nous entrerons », a déclaré un officier supérieur de l'armée israélienne, sous couvert d'anonymat. « Ce ping-pong peut-il durer éternellement ? Non. Notre société n'est pas faite pour cela. Et la communauté internationale non plus », ajoute-t-il en comparant la campagne de Gaza à « un marathonien qui court sans savoir s'il va dans la bonne direction ».
Bref, vous avez compris : le Hamas est le vainqueur, j'ai pas l'impression que ces 16 bataillons se battent à Gaza
01 h 18, le 06 août 2024