Rechercher
Rechercher

Politique - Réactions

Quatre ans après le 4-Août, « il est temps que justice soit faite »

À l’occasion de la commémoration de la double explosion au port de Beyrouth, les appels à une relance de l’enquête se multiplient, Raï plaide pour une investigation internationale.

Quatre ans après le 4-Août, « il est temps que justice soit faite »

Une personne déposant des fleurs devant des portraits de victimes de la double explosion au port de Beyrouth, lors d’une commémoration mensuelle, le 4 avril 2024. Matthieu Karam/L’Orient-Le Jour

Quatre longues années se sont écoulées depuis la double explosion meurtrière survenue au port de Beyrouth, qui avait fait plus de 235 morts et 7 000 blessés. Contrairement aux années précédentes, la commémoration du drame intervient aujourd’hui dans un contexte particulièrement tendu, marqué par une menace de guerre totale entre Israël et le Hezbollah (contre lequel certains ont pointé un doigt accusateur dans le cadre du dossier du 4-Août). Plusieurs responsables politiques et religieux ont saisi l’occasion pour affirmer que le drame du port demeurera une priorité et presser pour une progression de l’enquête, qui fait du surplace depuis plusieurs mois à cause des interférences politiques dans l’action de la justice.

Quelques heures avant le rassemblement prévu dimanche après-midi à Beyrouth pour rendre hommage aux victimes, L’Orient-Le Jour vous propose un tour d’horizon des réactions politiques, principalement axées sur l’appel à une relance rapide de l’investigation, sous le silence total du tandem chiite, dont de grosses pointures sont dans le viseur de la justice dans le cadre de cette affaire.

Lire aussi

Le 4-Août, au risque de l’oubli

Béchara Raï : le patriarche maronite, qui presse depuis des années pour que justice soit rendue aux victimes de la tragédie, a renouvelé dimanche son forcing dans ce sens : « Nous appelons à mettre fin aux interférences politiques dans l’action de la justice », a-t-il lancé dans son homélie, plaidant pour une enquête internationale, « tant que l’investigation locale (menée par le juge Tarek Bitar) est bloquée ». 

Gebran Bassil : le chef du Courant patriotique libre (allié chrétien du Hezbollah) a jugé « évident » qu’« il y a une volonté interne et externe de ne pas dévoiler la vérité sur le crime du port. Il y a une insistance pour ne fournir aucune information de la part des renseignements étrangers ou des images satellite », a-t-il fustigé sur son compte X. « Parallèlement, il y a une insistance au Liban pour bloquer l’enquête », a-t-il ajouté dans une pique implicite au Hezbollah avec qui les rapports ne sont pas au beau fixe à cause de la présidentielle libanaise et de la guerre à Gaza. « Une telle convergence d’intérêts montre que l’affaire va au-delà de la simple négligence du devoir », a encore dit M. Bassil, quelques mois après la remise en liberté de Badri Daher, ancien directeur des douanes réputé proche du CPL, détenu pendant plusieurs années dans le cadre de l’enquête . « Nous appelons les juges impliqués dans l’affaire à faire leur devoir et publier l’acte d’accusation, sinon ils devraient avoir honte et rentrer chez eux », a poursuivi M. Bassil dans une critique à peine voilée au juge Tarek Bitar.

Sleiman Frangié : le chef des Marada et candidat du tandem Amal-Hezbollah à la présidence de la République a écrit sur son compte X : « Quatre ans plus tard, la plaie est toujours ouverte. La vérité sera certainement atteinte d’une manière responsable, loin de toute politisation. » Des propos qui interviennent à l’heure où Youssef Fenianos, ancien ministre des Travaux publics gravitant dans l’orbite de M. Frangié, s’est abstenu de comparaître devant le juge Bitar dans le cadre de l’enquête et a présenté un recours en dessaisissement contre lui, l’accusant, à l’instar des ténors du « parti de Dieu », de « politiser l’enquête ».

Lire aussi

Ces Libanais que le 4-Août a tatoués au cœur et au corps

Taymour Joumblatt : à son tour, le chef du Parti socialiste progressiste a plaidé pour une relance rapide de l’enquête : « Il est temps que justice soit faite et que la vérité soit dévoilée dans l’affaire de la double explosion au port de Beyrouth, pour les victimes, les blessés et tous les Libanais », a-t-il écrit sur son compte X.

Les Forces libanaises : le parti de Samir Geagea, qui se veut le fer de lance de la bataille politique contre la formation de Hassan Nasrallah, a dénoncé, sur les réseaux sociaux, qu’« ils (le pouvoir en place) veulent faire oublier » le 4-Août. « Mais nous n’oublierons pas. »

Les Kataëb : même son de cloche du côté des Kataëb (qui avaient perdu plusieurs de leurs cadres, dont le secrétaire général, Nazar Najarian, lors de l’explosion). Le chef de ce parti, Samy Gemayel, a affirmé dimanche sur son compte X que le crime ne sera ni pardonné ni oublié. « Vous avez laissé une blessure dans chaque maison », a-t-il lancé à l’adresse de la caste politique. Plus tôt dans la journée, le département média du parti avait publié un communiqué affirmant qu’« il est du devoir de tout Libanais de garder vivace cette cause dans les consciences, en dépit de toutes les tentatives menées par les forces du fait accompli, qu’elles soient militaires, politiques ou judiciaires, de l’étouffer et de museler les voix appelant à ce que les criminels soient sanctionnés ».

- Saad Hariri : c'est également sur X que le chef du courant du Futur a commémoré le souvenir de la double explosion de 2020. « Quatre ans après le crime au port, la quête de la vérité se poursuit », a-t-il écrit. « Seule (le fait d'assurer) la justice pourrait rendre hommage aux martyrs, et rendre à Beyrouth son éclat », a encore dit l'ex-Premier ministre.

Waddah Sadek : toujours du côté des anti-Hezbollah, Waddah Sadek, député relevant du mouvement de contestation, a écrit sur la plateforme X : « Nous n’oublierons pas et nous ne pardonnerons pas. En dépit de leur orgueil et de leurs crimes, le 4-Août ne passera pas (impuni). Un jour, nous aurons un pouvoir judiciaire libre qui rendra justice et sanctionnera les criminels. »

Michel Pharaon : l’ancien ministre et député de Beyrouth a lui aussi réagi. « Le 4-Août revient chaque année sans que soit réduites la colère et la peine causées à Beyrouth et son peuple, sans que l’enquête ne porte ses fruits et sans aucun intérêt de la communauté internationale », a-t-il écrit sur X, déplorant le fait que le Liban « soit devenu un pays où la reddition des comptes n’existe plus depuis des années ». 

Boulos Abdel Sater : un cri similaire a été lancé par l’évêque maronite de Beyrouth qui s’était, lui aussi, érigé en porte-voix des parents des victimes de la tragédie. « Le 4-Août n’est pas une simple commémoration. D’autant plus que nous ne l’avons pas oublié et nous n’allons pas le faire. C’est une occasion de rappeler à ceux qui échappent à la justice, grâce à leur influence (politique), que Dieu les sanctionnera sûrement un jour », a déclaré le dignitaire religieux dans son homélie prononcée lors d’une messe célébrée pour l’occasion à la cathédrale Saint-Georges, dans le centre-ville de Beyrouth.

- Élias Audi : le métropolite grec-orthodoxe de Beyrouth a évoqué le souvenir du 4-Août dans son homélie dominicale. « Quatre ans plus tard, la plaie est toujours ouverte, parce que l’enquête ne s’est pas poursuivie, la vérité n’a pas été dévoilée et les auteurs du crime toujours pas sanctionnés », a déclaré l’évêque, avant de poursuivre : « Où sont les députés, les juges, les responsables politiques et le peuple tout entier. Il est honteux de passer sous silence un crime (contre une) capitale ».

L’ambassade de France à Beyrouth : sur le plan diplomatique, la France, dont le président Emmanuel Macron a été le seul chef d’État à se rendre au chevet d’une capitale meurtrie deux jours après le drame, a elle aussi appelé à une relance de l’enquête. « Quatre ans après l’explosion du 4 août 2020 sur le port de Beyrouth, la France demeure solidaire du Liban et des Libanais dont l’appel à la justice et à la lutte contre l’impunité doit être entendu », peut-on lire sur le compte X de l’ambassade. 

– Le président français, Emmanuel Macron : « Beyrouth, un salut de mon cœur », a de son côté écrit M. Macron sur X. « Quatre ans après l'explosion, mes pensées sont toujours avec les Libanais. Je réaffirme l'engagement indéfectible de la France aux côtés du Liban et notre exigence de justice pour toutes les victimes. »

L’ambassade des États-Unis : à son tour, l’ambassade US à Beyrouth a rendu hommage aux victimes du cataclysme de 2020. « L’équipe de l’ambassade des États-Unis se souvient des victimes de l’explosion au port de Beyrouth », peut-on lire sur le compte X de la mission diplomatique. Celle-ci a également posté la photo d’une horloge fixée à 18 :07, heure du drame.

-Le pape François : le souverain pontife a plaidé pour que justice soit rendue à l’occasion de la quatrième commémoration de la double explosion au port de Beyrouth, « dont les victimes étaient des innocents ». Dans son homélie dominicale, il a également appelé à « œuvrer pour sortir le Liban de ses crises, instaurer la paix au Moyen-Orient et mettre fin à la guerre (en cours à Gaza) qui menace les peuples au Liban, en Syrie et en Israël ».

- Jeanine Hennis-Plasschaert : la coordinatrice spéciale de l'ONU au Liban a insisté, dans une déclaration en marge du rassemblement populaire pour la commémoration du 4-Août, sur l'importance de rendre justice dans ce dossier. « Je me tiens aux côtés des parents des victimes qui plaident depuis 4 ans pour que justice soit rendue », a-t-elle dit, réitérant « la solidarité des Nations unies avec les familles » et affirmant que « justice doit être faite ». « Comment ? On en reparlera », a lancé la diplomate.

- L'ambassade d'Allemagne : « Quatre ans après l'explosion au port de Beyrouth, les victimes et l'opinion publique attendent toujours que justice soit faite. L'Allemagne renouvelle son soutien aux appels à la reddition des comptes »,  a écrit la mission diplomatique sur son compte X. 

- La mission diplomatique de l'Union européenne : « Nous nous souvenons aujourd'hui des victimes de l'explosion au port de Beyrouth et de leurs proches. Il est déplorable que quatre ans plus tard, personne n'a été porté responsable de cette tragédie. Il faut mettre fin à la culture de l'impunité », a écrit la mission de l'UE à Beyrouth sur X.

Quatre longues années se sont écoulées depuis la double explosion meurtrière survenue au port de Beyrouth, qui avait fait plus de 235 morts et 7 000 blessés. Contrairement aux années précédentes, la commémoration du drame intervient aujourd’hui dans un contexte particulièrement tendu, marqué par une menace de guerre totale entre Israël et le Hezbollah (contre lequel certains ont...
commentaires (6)

Comme par hasard, les civils libanais morts et les blessés et mutilés sont passés à la trappe. HB et l’Iran se sentent offusqués lorsque un des leurs se fait assassiner et réclament vengeance en déclarant la guerre à ceux qui sont à l’origine de leurs assassinats, alors que nous, nous rasons les murs en attendant que ces vendus daignent laisser la justice faire son travail. Il y a comme un hic. Les innocents comme les élites libanaises patriotes ne sont toujours pas vengées, et leurs assassins courent toujours en attendant qu’une autre victime soit choisie et tuée pour l’exemple. Pourquoi?

Sissi zayyat

10 h 07, le 05 août 2024

Tous les commentaires

Commentaires (6)

  • Comme par hasard, les civils libanais morts et les blessés et mutilés sont passés à la trappe. HB et l’Iran se sentent offusqués lorsque un des leurs se fait assassiner et réclament vengeance en déclarant la guerre à ceux qui sont à l’origine de leurs assassinats, alors que nous, nous rasons les murs en attendant que ces vendus daignent laisser la justice faire son travail. Il y a comme un hic. Les innocents comme les élites libanaises patriotes ne sont toujours pas vengées, et leurs assassins courent toujours en attendant qu’une autre victime soit choisie et tuée pour l’exemple. Pourquoi?

    Sissi zayyat

    10 h 07, le 05 août 2024

  • "Il y a une volonté interne et externe de ne pas dévoiler la vérité sur le crime du port". Exact, mon cher Bassil! A preuve le refus, exprimé à l’époque par son beau-père, d’une enquête internationale qui, seule, aurait permis d’accéder à la vérité.

    Yves Prevost

    07 h 17, le 05 août 2024

  • Pourquoi l'assemblée pleinière de la Cour de cassation,qui,en tant que dernière instance, doit étudier définitivement les différents recours dans cette affaire, n'a pas été reconstituée après le départ à la retraite de certains de ses membres ? M.Z

    ZEDANE Mounir

    23 h 42, le 04 août 2024

  • La justice ne peut etre rendu tant qu'une milice fait bon comme lui semble, et se maintient au dessus des lois et des regles.

    Aboumatta

    15 h 58, le 04 août 2024

  • Il est facile pour l’équipede l’ambassade des États-Unis de se souvenir des victimes de l’explosion au port de Beyrouth, tout autant pour l’ambassade de France en dépit des rodomontades du président, qui à deux reprises, nous a servi la meme soupe….S’ils compatissaient réellement peut etre devraient ils publier les photos satellites et les informations cruciales qu’ils détiennent, malheureusement et on peut les comprendre leurs intérêts prévalent avant tout…

    C…

    15 h 30, le 04 août 2024

  • Depuis 2005 jusqu'a ce jour, le pays a compte plusieurs dizaines d'assassinats de personnalites politiques et de la presse, une corruption endemique aux plus hauts niveaux de l'etat, le pillage de dizaines de milliards de dollars de l'epargne des Libanais, l'explosion du port de Beyrouth occasionnant plus de 250 morts, 6000 blesses et pres de 200000 logements et commerces detruits.

    Michel Trad

    15 h 04, le 04 août 2024

Retour en haut