
Des Palestiniens inspectent ce qui reste d'un camp de déplacés à Rafah visé dimanche soir par une frappe israélienne, le 27 mai 2024. Photo by Eyad BABA/AFP
Des images et des vidéos insoutenables de corps calcinés et de tentes en feu à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, circulent depuis dimanche soir sur les réseaux sociaux, suite à une frappe israélienne contre le camp de déplacés de Barkasat, tuant 45 personnes, dont certaines auraient « brûlées vives », selon le bilan provisoire le plus récent.
Que sait-on de ce bombardement, vivement condamné par la communauté internationale ?
Le bilan
Le ministère de la Santé du Hamas a annoncé lundi après-midi un nouveau bilan non définitif de 45 personnes tuées. Citant le Croissant-Rouge palestinien, l'agence WAFA indique que de nombreuses victimes ont été « brûlées vives » dans leurs tentes. Il s'agit principalement, selon des responsables palestiniens, de victimes civiles, dont des femmes et des enfants. L'attaque a déclenché un énorme incendie qui a pu être éteint par la Défense civile palestinienne au bout de 45 minutes, selon Al-Jazeera.
Sur des vidéos tournées dimanche soir et diffusées en ligne, on peut voir des corps calcinés ainsi que la dépouille d'un enfant décapité par la frappe. D'autres images montrent des tentes en feu et des personnes à la recherche de survivants.
Le lieu visé
Selon plusieurs sources palestiniennes, dont le Croissant-rouge et la Défense civile, la frappe a visé un « centre pour déplacés de Rafah », récemment établi près de dépôts de l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa). Selon un membre de la Défense civile de Gaza cité par le Washington Post, ce centre était classé comme « zone humanitaire sûre » par l'armée israélienne. Mais le bloc dans lequel se trouve le centre n'apparaît pas sur la carte des « zones humanitaires sûres » publiée en ligne par l'armée israélienne. Pourtant, celle-ci avait annoncé il y a cinq jours l’extension des « zones sûres » pour englober, entre autres, le bloc 2371 où le centre visé se trouve.
Ce camp, appelé « Barkasat », est situé dans le quartier de Tall el-Sultan, dans l'ouest de Rafah. Début mai, Israël avait appelé les habitants de l'est de la grande ville du sud de l'enclave à évacuer, en préparation de son offensive terrestre, sans donner d'ordres spécifiques d'évacuation pour la zone-ouest. D'après l'agence palestinienne Wafa, la région visée abritait « des milliers de déplacés ».
Les munitions utilisées
Aucune confirmation officielle concernant le type et nombre de munitions utilisées n'a été faite, mais selon Wafa, « l'attaque a été menée à l'aide de huit missiles », tandis qu'al-Jazeera indique qu'il s'agit de sept missiles.
L'ambassadeur palestinien à Londres évoque de son côté des « bombes de 2.000 livres », c'est-à-dire 907 kilos, en référence aux bombes « Mark 84 (Mk 84) ». Ces munitions non guidées sont de de fabrication américaine et explosent en plus de 14.000 fragments pouvant se disséminer dans un large rayon d'1km. D'après le New York Times, le 11 mai, une livraison de 3.500 bombes de ce type avait été suspendue par les Etats-Unis. Une enquête menée par le journal américain en décembre avait conclu que ce type de bombes étaient « responsables de certaines des pires attaques contre des civils palestiniens depuis le début de la guerre à Gaza ».
La version israélienne
Après le bombardement, l'armée israélienne a affirmé avoir visé « un complexe du Hamas dans lequel opéraient d'importants terroristes ».
Israël indique que cette opération a permis d'éliminer deux responsables du Hamas en Cisjordanie, Yacine Rabia, chef d'état-major du Hamas en Judée et Samarie, et Khaled Nagar, un haut responsable de la formation islamiste. Selon le compte X de l'armée israélienne, Yacine Rabia « gérait l'ensemble des activités terroristes du Hamas en Judée et Samarie (en Cisjordanie occupée), transférait des fonds vers des cibles terroristes et planifiait des attaques terroristes ». Khaled Nagar serait pour sa part un « haut responsable du quartier général du Hamas en Judée et Samarie ».
« La frappe a été menée contre des cibles légitimes au regard du droit international, grâce à l'utilisation de munitions précises et sur la base de renseignements précis », s'est justifié l'armée israélienne dans un communiqué lundi, assurant « avoir connaissance d'informations selon lesquelles plusieurs civils dans la zone ont été blessés ». L'avocate générale de l'armée israélienne, la générale-major Yifat Tomer Yerushalmi a affirmé lors une conférence, selon des propos cités par le Haaretz, que « les détails de l'incident font toujours l'objet d'une enquête ». Elle a dit prendre « ces allégations », selon lesquelles des civils ont été frappés à Rafah « très au sérieux ».
Le contexte
Cette frappe intervient au lendemain d'une attaque du Hamas sur Tel-Aviv, la première depuis des mois. L'armée israélienne a fait état de huit roquettes tirées depuis Rafah. Elle a été menée alors même que la Cour internationale de justice (CIJ), plus haute juridiction de l'ONU, a enjoint Israël à « arrêter immédiatement son offensive militaire, et toute autre action menée dans le gouvernorat de Rafah, qui serait susceptible d'infliger au groupe des Palestiniens de Gaza des conditions d'existence capables d'entraîner sa destruction physique ou partielle ». Les décisions de la CIJ sont contraignantes, mais elle n'a pas de moyen d'assurer leur application.
C'est un massacre et un génocide ! Le vrai visage d'Israél!
22 h 39, le 27 mai 2024